Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 24 avril 2006, présentée pour M. Gilles X, demeurant ..., par Me Etelin, avocat ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 115 301,61 € majorée des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable, et de la capitalisation de ces intérêts, dans un délai de trois mois, sous astreinte de 75 € par jour de retard ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 115 301,61 € majorée des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable, et de la capitalisation de ces intérêts, dans un délai de trois mois, sous astreinte de 75 € par jour de retard ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement communautaire du 30 janvier 1997 arrêtant des mesures de soutien exceptionnelles en faveur du marché de la viande bovine en France en application de la décision 97/18/CE ;
Vu l'arrêté du 3 décembre 1990 fixant les mesures de police sanitaire relatives à l'encéphalopathie spongiforme bovine ;
Vu l'arrêté du 30 mars 2001 fixant les modalités de l'estimation des animaux abattus sur ordre de l'administration ;
Vu le code rural ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2008 :
- le rapport de M. Richard, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X demande l'annulation du jugement du 30 janvier 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 115 301,61 € majorée des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation du préjudice résultant de l'abattage de son troupeau de bovins, atteint d'encéphalite spongiforme bovine ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le moyen tiré de ce que le tribunal administratif aurait omis de statuer sur des moyens substantiels n'est pas assorti de précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que le jugement attaqué a été notifié à M. X le 21 février 2006 ; que, par suite, la requête de M. X, enregistrée le lundi 24 avril 2006, est recevable ;
Au fond :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du règlement communautaire du 30 janvier 1997 arrêtant des mesures de soutien exceptionnelles en faveur du marché de la viande bovine en France en application de la décision 97/18/CE : « 1. Le montant de la compensation à verser par l'autorité compétente française aux producteurs ou à leurs mandataires au titre de l'article 1er paragraphe 1 est égal à la valeur marchande objective en cours en France de chaque animal considéré, établie sur la base d'un système d'évaluation individuelle et objective approuvé par l'autorité compétente française. 2. La Communauté cofinance au taux de 70 % les dépenses liées au montant de la compensation visé au paragraphe 1 versé pour les animaux abattus conformément aux dispositions de l'article 1er. 3. Par dérogation au paragraphe 1, l'autorité compétente française est autorisée à verser des montants supplémentaires pour les bovins abattus au titre du présent régime. La Communauté ne cofinance pas cette dépense » ; qu'aux termes de l'article L. 221-2 du code rural : « Des arrêtés conjoints du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances fixent les conditions d'indemnisation des propriétaires dont les animaux ont été abattus sur l'ordre de l'administration, ainsi que les conditions de la participation financière éventuelle de l'Etat aux autres frais obligatoirement entraînés par l'élimination des animaux… » ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 30 mars 2001 fixant les modalités de l'estimation des animaux abattus sur ordre de l'administration : « Lorsqu'un troupeau fait l'objet d'un abattage total sur ordre de l'administration dans le cadre des dispositions prises pour l'application des articles L. 221-1 ou L. 223-8 du code rural, les animaux abattus et faisant l'objet d'une indemnisation en application de l'article L. 221-2 du code rural sont estimés aux frais de l'administration par deux experts sur la base de leur valeur de remplacement. La valeur de remplacement inclut la valeur marchande objective de chaque animal et les frais directement liés au renouvellement du cheptel… » ; qu'aux termes de l'article 2 du même arrêté : « Dans chaque département, le préfet établit une liste d'experts répartis en deux catégories. La première catégorie comprend des éleveurs du département reconnus pour leur autorité morale et leur probité. La seconde catégorie comprend des spécialistes de l'élevage choisis pour leur connaissance de la zootechnie, du marché et de la commercialisation des animaux. Les compétences techniques ou responsabilités professionnelles de chaque expert figurent sur la liste » ; que selon l'article 6 du même arrêté : « Le préfet arrête le montant définitif de l'indemnisation et le notifie au propriétaire des animaux. Si, à titre très exceptionnel, ce montant dépasse le montant majoré tel que défini en annexe en moyenne par catégorie d'animaux, le préfet arrête le montant définitif de l'indemnisation après avis conforme de la directrice générale de l'alimentation et au vu du rapport des experts et des justificatifs des éléments visés à l'article 5 » ;
Considérant qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier que, pour arrêter par sa décision litigieuse du 9 octobre 2001 le montant de l'indemnisation pris en charge par l'Etat au titre de l'abattage du troupeau de M. X, déclaré atteint d'encéphalopathie spongiforme bovine, le préfet de la Haute-Garonne a entendu opposer à M. X la note de service du 28 novembre 2001 ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que l'administration se serait fondée sur ce texte pour calculer l'indemnisation allouée au requérant manque en fait ;
Considérant que le préfet de la Haute-Garonne n'était pas tenu de suivre l'estimation du préjudice chiffré par les experts et pouvait se fonder sur d'autres éléments ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le troupeau de M. X aurait présenté des caractéristiques et des performances supérieures à la moyenne ; que M. X n'avait ainsi aucun droit à une indemnisation supérieure à la somme de 572 000 F, calculée à partir du tarif de base annexé à l'arrêté du 30 mars 2001 fixant les modalités de l'estimation des animaux abattus sur ordre de l'administration ;
Considérant, toutefois, que si les experts ont à tort intégré dans les frais de vétérinaire des frais kilométriques calculés pour chaque animal à analyser, l'administration n'apporte aucun élément de nature à démontrer que l'évaluation faite par les experts des autres frais sanitaires serait erronée ; que, dans ces conditions, lesdits frais sanitaires doivent être fixés, après déduction des frais kilométriques du vétérinaire par animal, à la somme de 43 283,20 F ;
Considérant que l'administration ne justifie pas la réduction de l'évaluation de la charge de travail supplémentaire, de transport et d'approche, à laquelle les experts ont procédé, alors que ces derniers ont détaillé le coût des frais de repérage des animaux et de leur transport, et les dépenses de main d'oeuvre liées à l'abattage d'urgence, à l'achat et à la réception des animaux, aux problèmes de contention et de surveillance du troupeau ; que, dans ces conditions, il convient de retenir la somme de 66 176 F au titre de ces frais ;
Considérant que l'administration ne justifie pas le caractère forfaitaire des frais de désinfection qu'elle propose de retenir ; que ces frais doivent au contraire être déterminés en fonction de la surface à désinfecter ; que, dans ces conditions, la somme de 2 680 F proposée par les experts doit être retenue ;
Considérant que l'administration ne fournit pas d'éléments sur la fixation des frais relatifs aux besoins supplémentaires de repeuplement liés à la difficulté d'adaptation des bovins, alors que les experts donnent des explications détaillées sur leur méthode d'évaluation de ces frais ; que, dans ces conditions, la somme de 63 000 F proposée par les experts doit être retenue ;
Considérant, enfin, que la somme forfaitaire de 7 920 F correspondant au déficit en production de viande, ou déficit momentané de production, retenue par l'administration, n'est pas contestée par M. X ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander à être indemnisé du fait de la perte de son cheptel, à hauteur de la somme de 755 059,92 F ; que le préfet de la Haute-Garonne ayant fixé l'indemnisation de M. X à la somme de 657 070 F, ce dernier est fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme complémentaire de 97 989,92 F restant due, soit 14 938,47 € ;
Considérant que M. X a droit aux intérêts sur la somme de 14 938,47 € à compter du 7 mars 2003, date de réception de sa réclamation préalable par l'administration ;
Considérant que M. X a demandé la capitalisation des intérêts lors de l'enregistrement de sa requête d'appel devant la cour administrative d'appel, le 24 avril 2006 ; que la capitalisation des intérêts, si elle peut être demandée à tout moment devant le juge, ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus pour une année entière ; qu'à la date du 24 avril 2006, il était dû au moins une année d'intérêt ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation de M. X ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme de 1 000 € qu'il demande au titre des frais non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. X la somme de 14 938,47 €. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 7 mars 2003. Les intérêts échus à la date du 24 avril 2006 seront capitalisés à cette date et, s'il y a lieu, à chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 30 janvier 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. X la somme de 1 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
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No 06BX00859