Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 4 avril 2005 sous le n° 05BX00674, présentée pour le DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES par la SCP d'avocats Cornet-Vincent-Segurel ;
Il demande à la cour :
- d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 3 février 2005 en tant qu'il a annulé la décision du président du conseil général des Deux-Sèvres du 6 avril 2004 infligeant la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de 6 mois à M. X et qu'il l'a condamné à verser une indemnité à ce dernier ;
- de condamner M. X à lui verser une somme de 3 500 euros en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu l'ensemble des pièces du dossier ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 82-447 du 28 mai 1982 ;
Vu le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement convoquées à l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mai 2007 :
- le rapport de Mme Fabien, premier conseiller,
- les observations de Me Vendé pour le DEPARTEMENT DES DEUX SEVRES,
- et les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par décision du 6 avril 2004, le président du conseil général des Deux-Sèvres a infligé la sanction de l'exclusion temporaire pour une durée de 6 mois à M. X, attaché territorial ; que cette décision se fonde sur la diffusion par l'intéressé d'un premier tract syndical en novembre 2003 contenant des propos injurieux et outrageants à l'encontre du directeur de l'administration générale et des finances, d'un second tract au cours de la séance publique du conseil général du 15 décembre 2003 appelant les agents à ne pas exécuter correctement leurs missions en tenant des propos diffamatoires à l'encontre de l'exécutif départemental et enfin sur l'envoi d'un message électronique particulièrement offensant envers l'un de ses collègues et sa hiérarchie ; que le DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES fait appel des articles 1 à 4 du jugement du 3 février 2005 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a annulé cette décision et l'a condamné à verser à M. X une indemnité en réparation du préjudice financier subi par ce dernier ; que celui-ci demande, par la voie de l'appel incident, la réformation de ce jugement en tant qu'il lui a alloué une indemnité inférieure à 10 000 euros et a rejeté sa demande présentée en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que M. X soutient n'être pas à l'origine des tracts litigieux diffusés à l'en-tête du syndicat CFTC des agents publics du DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES et n'avoir d'ailleurs plus fait partie de ce syndicat au moment des faits reprochés ; que, cependant, s'il a produit en première instance une lettre datée du 25 novembre 2003 qu'il aurait adressée à M. Y, président dudit syndicat ayant également fait l'objet d'une sanction disciplinaire, lui faisant part de sa démission de ses fonctions de vice-président-trésorier au motif qu'il était écarté des prises de décision et lui précisant qu'il pouvait néanmoins assumer à titre transitoire les responsabilités de délégué, ce document ne saurait permettre d'établir qu'il n'a pas participé à l'élaboration et à la diffusion des tracts litigieux ; qu'il ne conteste pas que l'exemplaire de la « Lettre » de novembre 2003 adressé à l'administration est revêtu de sa signature manuscrite ; que la version de cette « Lettre » diffusée aux agents du département comporte son nom ainsi que celui de M. Y en qualité de personnes à contacter ; qu'il est constant qu'il n'a pris aucune initiative permettant de faire connaître son éventuel désaveu des propos contenus dans ce document ; qu'il a indiqué au conseil de discipline avoir déposé dans la salle du conseil général le second tract du 15 décembre 2003 avant la séance publique à laquelle il a d'ailleurs assisté en compagnie de M. Y ; que, dans ces conditions, le DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a estimé que M. X ne pouvait être regardé comme ayant participé à la rédaction et à la diffusion des tracts litigieux ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X en première instance et en appel ;
Considérant que les dispositions du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux n'ont pas pour objet de réglementer l'exercice de la liberté d'expression des fonctionnaires et ne sauraient porter atteinte à l'exercice par ces derniers du droit syndical ; que si M. X fait valoir que le décret précité ne prévoit pas expressément la possibilité pour l'intéressé de récuser un membre du conseil de discipline, que ce conseil comporte des agents et élus de la collectivité lorsque celle-ci n'est pas affiliée au centre de gestion de la fonction publique territoriale ainsi que des élus désignés au scrutin majoritaire et non proportionnel, que le vote n'a pas lieu obligatoirement à bulletin secret et que le fonctionnaire est privé de saisir le conseil de discipline de recours lorsque l'autorité territoriale ne prononce pas une sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline, de telles circonstances ne sont pas de nature à démontrer que les dispositions de ce décret méconnaissent le principe général des droits de la défense imposant que l'intéressé puisse faire valoir ses observations sur les griefs retenus à son encontre ou qu'elles ne garantissent pas l'impartialité des membres du conseil de discipline ; que le moyen tiré de l'illégalité, par la voie de l'exception, du décret du 18 septembre 1989 n'est en conséquence pas fondé ;
Considérant que le conseil de discipline a le 18 mars 2004 émis, au scrutin secret, par six voix contre trois, un avis favorable à la sanction d'exclusion pour une durée de 6 mois envisagée à l'encontre de M. X ; que ce dernier n'établit pas que les membres de ce conseil auraient manqué d'impartialité ; qu'en particulier, si des tracts du syndicat CGT-FO ont dénoncé en 2002 les formes d'action adoptées par les représentants du syndicat CFTC des agents publics du DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES, il n'est pas soutenu et il ne ressort pas des pièces du dossier que la représentante du personnel membre de la CGT-FO siégeant le 18 mars 2004 aurait précédemment pris position en sa défaveur sur les faits ayant donné lieu à l'engagement de la procédure disciplinaire ou qu'elle aurait manifesté une animosité personnelle à son encontre ; que M. X n'est pas fondé à soutenir que la procédure suivie devant le conseil de discipline n'aurait pas été contradictoire ou que les membres de ce conseil auraient été insuffisamment informés alors que, d'une part, il résulte du procès-verbal de séance que ces derniers ont entendu lecture du rapport de saisine de l'autorité territoriale et les observations orales de cette dernière et de M. X ainsi que de leurs conseils et qu'un débat contradictoire a eu lieu sur l'ensemble des faits lui étant reprochés et que, d'autre part, l'intéressé n'établit pas que les membres du conseil n'auraient pas eu accès à l'ensemble des documents annexés au rapport de saisine ainsi qu'aux observations écrites qu'il a remises en séance ; qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984 et du décret du 18 septembre 1989 que le magistrat, membre du conseil de discipline qu'il préside, prend part au vote de l'avis émis par ce conseil ; que M. X n'est en conséquence pas fondé à soutenir que la procédure suivie devant le conseil de discipline aurait été irrégulière ;
Considérant que la décision du 6 avril 2004, qui vise les textes applicables et énonce avec précision les faits reprochés à M. X en les qualifiant de manquements à l'obligation de réserve et d'obéissance hiérarchique, est suffisamment motivée ;
Considérant que l'exercice du droit syndical doit pour les fonctionnaires se concilier avec le respect de la discipline nécessaire au bon fonctionnement du service public ; que les propos contenus dans la « Lettre » de novembre 2003 à l'encontre du directeur de l'administration générale et des finances excèdent, par leur caractère outrageant et en l'absence de tout lien avec la défense des intérêts professionnels, les limites que les fonctionnaires doivent respecter en raison de leur obligation de réserve ainsi que du devoir de correction auquel ils sont tenus notamment à l'égard de leur hiérarchie ; que le tract, diffusé en séance publique du conseil général le 15 décembre 2003 et faisant part de la prétendue intention du personnel de s'abstenir d'accomplir l'ensemble de ses obligations de service en cas de vote de la réforme du régime indemnitaire, était, par ses termes outranciers et les menaces de désobéissance qu'il comportait, de nature à nuire au bon déroulement des délibérations de l'assemblée départementale ; que cette diffusion est en outre intervenue en méconnaissance des prescriptions de l'article 9 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 aux termes desquelles les tracts syndicaux sont distribués aux agents dans l'enceinte des bâtiments administratifs autres que ceux ouverts au public ; que, enfin, le message adressé par M. X le 12 décembre 2003 à l'un de ses collègues comporte à l'encontre de ce dernier des accusations particulièrement désobligeantes dépassant largement la liberté de ton pouvant être tolérée dans le cadre de relations normales de travail ; qu'en conséquence, le président du conseil général des Deux-Sèvres n'a pas commis d' erreur dans la qualification juridique des faits en estimant que les faits précités étaient constitutifs de manquements aux devoirs de réserve et d'obéissance hiérarchique ; qu'eu égard à la gravité de ces fautes disciplinaires, au grade de M. X, à sa manière antérieure de servir ainsi qu'au blâme dont il avait fait déjà l'objet le 19 décembre 2002, il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant le 6 avril 2004 qu'ils justifiaient la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de six mois ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES est fondé à demander l'annulation des articles 1 à 4 du jugement attaqué et que l'appel incident formé par M. X ainsi que sa demande présentée devant le tribunal administratif de Poitiers doivent être rejetés ;
Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'affaire, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande présentée à ce titre par le DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES ;
DECIDE :
Article 1er : Les articles 1 à 4 du jugement du tribunal administratif de Poitiers en date du 3 février 2005 sont annulés.
Article 2 : L'appel incident et la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Poitiers sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions présentées par le DEPARTEMENT DES DEUX-SEVRES et M. X en application de l'article L 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 05BX00674