Vu la requête, enregistrée le 7 janvier 2004, présentée pour la société L'ELEPHANT, société à responsabilité limitée, dont le siège est La Braudiére à Romagne (86700), représentée par sa gérante en exercice ; la société L'ELEPHANT demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 03/299 du 6 novembre 2003 par lequel le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande en décharge de l'obligation de payer la somme de 112 184 euros mise à sa charge par un avis à tiers détenteur notifié le 22 novembre 2002 par le trésorier-payeur général de la Vienne ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui rembourser les frais bancaires consécutifs aux poursuites et à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
…………………………………………………………………………………………….
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2006 :
- le rapport de M. Lerner, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Doré, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les conclusions de la requête de la société L'ELEPHANT doivent être regardées comme tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant de l'avis à tiers détenteur décerné à son encontre, le 22 novembre 2002, par le trésorier-payeur général de la Vienne pour avoir paiement de l'impôt sur les sociétés des années 1997, 1998 et 1999 et de la contribution sociale afférente aux années 1997 et 1999 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'en regardant la demande de la société L'ELEPHANT comme tendant à la décharge de l'obligation de payer susdécrite, les premiers juges ne se sont pas mépris sur le sens et l'étendue des conclusions qui leur étaient soumises ;
Sur la décharge de l'obligation de payer :
En ce qui concerne la contestation relative à l'absence de lettre de rappel :
Considérant que l'article L. 255 du livre des procédures fiscales, relatif aux impôts recouvrés par les comptables du Trésor, dispose que : « Lorsque l'impôt n'a pas été payé à la date limite de paiement et à défaut d'une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement avec constitution de garanties dans les conditions prévues par l'article L. 277, le comptable du Trésor chargé du recouvrement doit envoyer au contribuable une lettre de rappel avant la notification du premier acte de poursuites devant donner lieu à des frais » ; qu'une contestation relative à l'absence de la lettre de rappel, qui, selon ces dispositions législatives, doit précéder le premier acte de poursuites devant donner lieu à des frais, se rattache à la régularité en la forme de cet acte et non à l'exigibilité de l'impôt ; qu'il résulte de ce qui précède que le litige qui oppose le requérant au Trésor public et qui porte sur la contestation de l'avis à tiers détenteur en date du 22 novembre 2002, au motif qu'il n'aurait pas été précédé de la lettre de rappel prévue par l'article L. 255 du livre des procédures fiscales, relève de la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire ;
En ce qui concerne la contestation relative à l'irrégularité de la décision de rejet de la demande adressée au trésorier-payeur général de la Vienne :
Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 281, R. 281-1 et R. 281-2 du livre des procédures fiscales, les contestations relatives aux actes de recouvrement des impôts doivent faire l'objet d'une demande présentée au trésorier-payeur général ; qu'aux termes de l'article R. 281-4 du même livre : « Le chef de service se prononce dans un délai de deux mois à partir du dépôt de la demande, dont il doit accuser réception. Si aucune décision n'a été prise dans ce délai ou si la décision rendue ne lui donne pas satisfaction, le redevable doit, à peine de forclusion, porter l'affaire devant le juge compétent tel qu'il a été défini à l'article L. 281. Il dispose pour cela de deux mois à partir : a) Soit de la notification de la décision du chef de service ; b) Soit de l'expiration du délai de deux mois accordé au chef de service pour prendre sa décision » ;
Considérant que l'irrégularité de la notification de la décision de rejet d'une réclamation par le chef de service n'a d'incidence, le cas échéant, que sur le délai imparti au contribuable pour contester cette décision mais est sans influence sur la régularité de la procédure de recouvrement ; qu'ainsi et en tout état de cause, la circonstance que le trésorier-payeur général de la Vienne n'aurait ni accusé réception de la réclamation que lui avait adressée la société L'ELEPHANT le 12 décembre 2002, ni rendu une décision explicite, reste sans incidence sur la validité de l'avis à tiers détenteur en litige ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
En ce qui concerne la contestation relative à la demande de sursis de paiement :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales : « Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge peut, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, être autorisé à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes (…) » ; qu'en application de l'article R. 196-1, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant la mise en recouvrement du rôle ou la notification d'un avis de mise en recouvrement ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le bénéfice du sursis de paiement des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale généralisée, sur le fondement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, est subordonné à la condition de former une demande expresse en ce sens à l'occasion d'une réclamation présentée dans le délai prévu par les dispositions susmentionnées de l'article R. 196-1 ; qu'il revient au contribuable de justifier qu'il a formé une demande de sursis de paiement dans le délai légal ; que la société L'ELEPHANT ne justifie pas, par les pièces qu'elle a produites au dossier, avoir demandé qu'il soit sursis au paiement des cotisations à l'impôt sur les sociétés des années 1997, 1998 et 1999 et à la contribution sociale des années 1997 et 1999 à l'occasion d'une réclamation présentée avant l'expiration du délai imparti à l'article R. 196-1 ; qu'ainsi, les impositions en cause demeuraient exigibles à la date d'émission de l'avis à tiers détenteur en litige ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, que la société L'ELEPHANT, qui ne saurait utilement se prévaloir de ce que le signataire des mémoires en défense de l'administration n'aurait pas régulièrement reçu de délégation de signature, cette circonstance étant sans incidence sur la régularité de la procédure et sur le bien-fondé des impositions, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société L'ELEPHANT la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La contestation de la société L'ELEPHANT relative à l'absence de lettre de rappel est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société L'ELEPHANT est rejeté.
3
N° 04BX00001