Vu la requête, enregistrée le 13 juillet 2006, présentée par le PREFET DES DEUX-SEVRES ;
Le PREFET DES DEUX-SEVRES demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n°0601514 du 13 juin 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté du 30 mai 2006 décidant la reconduite à la frontière de Sékou Yalany X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;
2°) de rejeter la demande présentée par Sékou Yalany X devant le Tribunal administratif de Poitiers ;
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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir, entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2006, présenté son rapport et entendu les observations de Me Devaine pour M. X et les conclusions de Mme Billet-Ydier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que LE PREFET DE DEUX-SEVRES relève appel du jugement, en date du 13 juin 2006, par lequel le magistrat délégué par le Tribunal administratif de Poitiers a annulé son arrêté du 30 mai 2006, prescrivant à l'encontre de M. Sékou Yalani X, ressortissant guinéen, une mesure de reconduite à la frontière, ensemble sa décision du même jour fixant le pays de destination de l'intéressé ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au delà d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait » ; que, par décision du 23 septembre 2005, le préfet des Deux-Sèvres a refusé à M. X le renouvellement du titre de séjour dont il était jusqu'alors titulaire en qualité de conjoint d'une ressortissante française; que M. X s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification de cette décision, régulièrement faite le 9 novembre 2005 ; qu'ainsi, le recours pour excès de pouvoir qu'il a formé contre ladite décision devant le Tribunal administratif de Poitiers étant dépourvu d'effet suspensif, il figurait au nombre des étrangers à l'encontre desquels l'autorité préfectorale peut prendre une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant que si M. X soutient qu'il est bien intégré dans la société française au sein de laquelle il vivait, à la date de l'arrêté contesté, depuis quatre ans, qu'il dispose d'un travail convenablement rémunéré, s'acquitte de ses obligations fiscales, et vit de manière autonome dans un appartement dont il acquitte régulièrement le loyer, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant à son encontre une mesure de reconduite à la frontière, le préfet des Deux-Sèvres ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une telle mesure sur la situation personnelle de l'intéressé ; que LE PREFET DES DEUX-SEVRES est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Poitiers a prononcé, pour ce motif, l'annulation de l'arrêté contesté du 26 mai 2006 prescrivant la reconduite à la frontière de M. X, ensemble, et par voie de conséquence, la décision distincte, contenue dans le même arrêté, désignant la République de Guinée comme son pays de destination ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au juge d'appel des reconduites à la frontière, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X ;
Considérant que M. Chiaro, secrétaire général de la préfecture des Deux-Sèvres, qui a signé l'arrêté contesté, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de ce département en date du 19 janvier 2005, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de ladite préfecture, à l'effet notamment de signer les arrêtés de reconduite à la frontière ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté ne peut donc être accueilli ;
Considérant que M. X entend exciper de l'illégalité de la décision susmentionnée du 23 septembre 2005 refusant le renouvellement de son titre de séjour, et se prévaut à cet effet de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, aux termes duquel : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) » ; que, toutefois, si M. X fait état de sa bonne intégration dans la société française et de la présence en France de son frère, ainsi que de l'épouse et de l'enfant de celui-ci, il ne justifie pas être dépourvu d'autres attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il est au contraire constant qu'il y a un enfant naturel, avec lequel il n'établit pas avoir rompu toute relation ; qu'ainsi, compte tenu des circonstances de l'espèce, la décision du 23 septembre 2005 n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;
Considérant que, pour les mêmes raisons, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté du 30 mai 2006 ne méconnaît pas davantage les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que M. X soutient qu'il est exposé à un risque de représailles en cas de retour dans son pays d'origine ; que ce moyen, qui doit être regardé comme dirigé contre la décision désignant la République de Guinée comme pays de destination de l'intéressé, n'est pas assorti de précisions suffisantes pour permettre d'en mesurer la portée ; qu'il doit dès lors être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que LE PREFET DES DEUX-SEVRES est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D E C I D E
Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Poitiers en date du 13 juin 2006 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Poitiers est rejetée.
Article 3: Les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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06BX01475