Vu la requête enregistrée le 21 décembre 2005 au greffe de la cour sous le n° 05BX02454, présentée par le PREFET DE LA GIRONDE ; le PREFET DE LA GIRONDE demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 2 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Bordeaux a, d'une part, annulé son arrêté en date du 7 novembre 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ainsi que la décision en date du même jour fixant le pays de destination et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour à l'intéressé ;
- de rejeter la demande de M. X ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 mars 2006 :
- les conclusions de Mme Jayat, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la demande d'asile de M. X, ressortissant angolais, qui serait entré en France le 20 août 2002, a été rejetée par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 décembre 2003, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 26 mai 2005 ; que le PREFET DE LA GIRONDE lui a opposé un refus de séjour le 22 juillet 2005 ; que M. X a déposé le 3 août 2005 une demande de réexamen de sa demande d'asile ; que la préfecture de la Gironde lui a délivré à cette occasion une « attestation spéciale » indiquant que l'admission au séjour lui était refusée ; que l'office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande le 9 août 2005, décision confirmée par la commission des recours le 28 novembre 2005 ; que dès le 7 novembre 2005, le PREFET DE LA GIRONDE a ordonné la reconduite à la frontière de M. X ; que, par le jugement attaqué du 2 décembre 2005, le magistrat délégué du tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette décision ainsi que celle fixant le pays de renvoi et a enjoint au PREFET DE LA GIRONDE de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour et de se prononcer sur sa situation dans un délai de huit jours ;
Considérant que M. X se prévaut, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision du 3 août 2005, dénommée « attestation spéciale », refusant à M. X son admission au séjour et ne mentionnant pas les voies et délais de recours ;
Considérant que la décision du 3 août 2005 énonce trois des différentes hypothèses limitativement énumérées par l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et permettant de refuser légalement l'admission en France d'un demandeur d'asile ; que, cependant, elle ne précise pas lequel de ces motifs, susceptibles de fonder un tel refus, est retenu ; que dès lors qu'elle ne comporte pas l'énoncé des circonstances de fait et de droit en constituant le fondement, elle ne satisfait pas aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs ; qu'au surplus, le PREFET DE LA GIRONDE ne produit aucune pièce de nature à justifier de la compétence de Mme Muzotte, adjointe au chef de bureau des étrangers, pour signer cette décision ;
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 741-1 à L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le demandeur d'asile bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé à l'encontre de cette dernière, jusqu'à la notification de la décision de la commission de recours des réfugiés sauf dans les hypothèses limitativement énumérées par l'article L. 741-4 justifiant un refus d'admission au séjour ; que dès lors que le refus d'admission au séjour opposé à M. X le 3 août 2005 était entaché d'illégalité externe, le PREFET DE LA GIRONDE ne pouvait légalement se fonder sur cette décision pour ordonner le 7 novembre 2005 la reconduite à la frontière de l'intéressé sans attendre que la commission de recours des réfugiés statue sur son recours formé à l'encontre du rejet par l'office français de protection des réfugiés et apatrides de sa demande de réexamen ; que, dès lors, le PREFET DE LA GIRONDE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette décision ainsi que, par voie de conséquence, celle fixant le pays de renvoi ; qu'il ne conteste pas que cette annulation impliquait nécessairement les mesures d'exécution prescrites par ce jugement ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et par application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, de condamner l'Etat à verser à Maître Cesso, avocat de M. X, sous réserve qu'il renonce au bénéfice des sommes versées au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 1 300 euros au titre des frais non compris dans les dépens qu'aurait exposés l'intéressé en l'absence de cette aide ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du PREFET DE LA GIRONDE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Maître Cesso une somme de 1 300 euros au titre de l'article 37 de la loi du 19 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au bénéfice des sommes versées au titre de l'aide juridictionnelle.
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N° 05BX02454