Vu enregistrée au greffe de la cour le 9 septembre 2002, la requête présentée par Me Taran, pour la SA MERINVIL, dont le siège est ..., représentée par son président-directeur général en exercice ;
La SA MERINVIL demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 6 juin 2002 en tant que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période allant du 1er avril 1993 au 31 mars 1997 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 573 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 février 2006 :
- le rapport de M. Margelidon, premier conseiller,
- les observations de Mme X... représentant le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,
- et les conclusions de Mme Jayat , commissaire du gouvernement ;
Considérant que la SA MERINVIL fait appel du jugement, en date du 6 juin 2002, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période allant du 1er avril 1993 au 31 mars 1997 ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que, si la société soutient que le tribunal a omis de répondre à son moyen tiré d'une erreur de calcul commise par l'administration dans le montant total de la taxe faisant l'objet du rappel, il ressort de l'article 1er du dispositif du jugement attaqué et des motifs qui servent de support nécessaire audit article que les premiers juges ont répondu à ce moyen ; qu'ainsi le moyen relatif à la régularité du jugement manque en fait ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales : « L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L.256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement… » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société a reçu deux avis de mise en recouvrement les 31 mai 1999 et 15 juillet 1999 faisant tous deux référence à la notification de redressements du 16 décembre 1997 ; que les montants en litige sont relatifs à la remise en cause, d'une part, de la taxe sur la valeur ajoutée déduite sur le fondement de l'article 236 de l'annexe II du code général des impôts, d'autre part, du régime d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée sous lequel s'était placée la société ; que, si les deux avis portent la mention « taxe sur la valeur ajoutée, code général des impôts, article 256 et suivants », l'administration n'était pas dans l'obligation, compte tenu des activités faisant l'objet des redressements en cause et des régimes d'imposition y afférents, d'indiquer le fondement légal spécifiquement applicable à chaque montant ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 275 du code général des impôts : « I. Les assujettis sont autorisés à recevoir ou à importer en franchise de la taxe sur la valeur ajoutée les biens qu'ils destinent à une livraison à l'exportation. (…) Pour bénéficier des dispositions qui précèdent, les intéressés doivent, selon le cas, adresser à leurs fournisseurs (…) une attestation, visée par le service des impôts dont ils relèvent, certifiant que les biens sont destinés à faire l'objet, en l'état ou après transformation, d'une livraison mentionnée au premier alinéa (…) » ; que la livraison des biens constituant normalement, en vertu de l'article 269 du même code, le fait générateur de la taxe, l'attestation visée à l'article 275-I ci-dessus doit être exigée par les fournisseurs préalablement à cette livraison ;
Considérant que la société requérante n'établit pas être en possession de l'attestation exigée par les dispositions précitées ; qu'à défaut de pouvoir produire ladite attestation, elle ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 284 du code général des impôts qui prévoient que : « Toute personne qui a été autorisée à recevoir des biens ou services en franchise (…) est tenue au paiement de l'impôt lorsque les conditions auxquelles est subordonné l'octroi de la franchise (…) ne sont pas remplies », dès lors qu'il résulte clairement de ces dernières dispositions que les personnes « autorisées à recevoir des biens en franchise » sont celles qui ont délivré à leurs fournisseurs, préalablement à la livraison, les attestations en cause ;
Considérant, il est vrai, que la société se prévaut d'une note de service, en date du 10 mai 1974, de la direction des services fiscaux de la Charente-Maritime qui prévoit que, dans la région délimitée du cognac, les bons émis par le Bureau National Interprofessionnel du Cognac se substituent à l'attestation prévue par l'article 275 du code général des impôts ; que, toutefois, cette note de service ne saurait être utilement invoquée sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, dès lors qu'il s'agit d'un document interne à l'administration, qui n'ayant pas fait, de la part de cette dernière, l'objet d'une diffusion destinée aux contribuables, ne peut être regardé comme comportant une interprétation formelle du texte fiscal au sens des dispositions de l'article L.80 A ;
Considérant, cependant, que sur le fondement de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales, la société se prévaut d'un courrier du ministre du budget en date du 7 octobre 1987, adressé à un député, et relatif à la situation fiscale en matière de taxe sur la valeur ajoutée d'un négociant en eaux-de-vie de cognac ; que, néanmoins, seuls peuvent se prévaloir des dispositions de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales les contribuables qui se trouvent dans la situation de fait sur laquelle l'appréciation invoquée a été portée, ainsi que les contribuables qui ont participé à l'acte ou à l'opération qui a donné naissance à cette situation sans que les autres contribuables puissent utilement invoquer une rupture à leur détriment du principe d'égalité ; qu'en se bornant à soutenir qu'elle se trouve dans une situation identique, la société requérante n'établit pas être en droit d'invoquer à son profit le courrier ministériel du 7 octobre 1987 sur le fondement de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales ; qu'il suit de là que les cessions litigieuses de récépissés-warrants ont été soumises à bon droit à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que la société conteste l'application à son cas des dispositions de l'article 257-10° du code général des impôts selon lesquelles : « Sont également soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (…) Les achats à des non-redevables de la taxe sur la valeur ajoutée : a) de produits passibles d'un droit de fabrication ou de consommation (…) » ; qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a acquis des récépissés-warrants représentatifs d'eaux de vie auprès de particuliers, non redevables de la taxe ; que l'acquisition desdits récépissés-warrants doit être regardée comme le transfert de propriété d'eaux-de-vie soumises aux droits visés par les dispositions précitées, dont le cessionnaire a la libre disposition ; que, par suite, l'administration était en droit d'appliquer auxdits achats les dispositions en cause ; que la société requérante ne peut se prévaloir utilement de la note de service du 10 mai 1974 de la direction des services fiscaux de Charente-Maritime qui, n'ayant pas fait, de la part de celle-ci, l'objet d'une diffusion destinée aux contribuables, ne peut être regardée que comme une note de service interne ne comportant pas une interprétation formelle du texte fiscal au sens des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ; qu'il en est de même pour la documentation de base 3-A-1223 du 1er septembre 1981 qui ne donne pas des dispositions applicables une interprétation différente de celle qui a été faite en l'espèce ;
Considérant qu'aux termes de l'article 236 de l'annexe II au code général des impôts : « A titre temporaire, la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les dépenses de logement, de restaurant, de réception et de spectacles est exclue du droit à déduction. Toutefois, cette exclusion n'est pas applicable : (…) 2° Aux dépenses relatives à la fourniture à titre gratuit d'un logement sur les chantiers ou dans les locaux d'une entreprise du personnel de sécurité, de gardiennage ou de surveillance » ; qu'il résulte de l'instruction que la société a réalisé des travaux de construction d'un logement pour un montant de 552 479 F, lequel est mis à disposition de la directrice générale de la société ; qu'eu égard à ses fonctions, l'occupante du logement en cause ne peut être regardée comme étant investie d'une mission principale et permanente de surveillance du chai ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction de taxe sur la valeur ajoutée relative auxdites dépenses ;
Considérant que si la société soutient qu'un remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 61 024 F lui a été refusé à tort, il résulte de l'instruction que la société n'a pas demandé le remboursement dudit crédit ; qu'en outre, ses conclusions ne sont assorties d'aucun moyen permettant au juge d'en apprécier le bien-fondé ; qu'elles ne peuvent donc qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA MERINVIL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la SA MERINVIL la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA MERINVIL est rejetée.
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N° 02BX01874