Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 23 janvier 2001, présentée pour M. Jean-Philippe X, demeurant ..., par Me Touzet, avocat ;
M. X demande à la cour :
- d'annuler le jugement du 7 novembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation des préjudices qu'il a subis du fait des décisions, jugées illégales, prises à son encontre par la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux ;
- de faire droit à l'ensemble de ses conclusions présentées devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 décembre 2005 :
- le rapport de Mme Roca ;
- les observations de M. X ;
- les observations de Me Cazcarra pour la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux ;
- et les conclusions de M. Valeins, commissaire du gouvernement ;
Considérant que par une décision en date du 17 octobre 1994, M. X agent contractuel de la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux, employé dans les fonctions de chargé de mission « désign-bois-environnement » a été licencié pour insuffisance de résultats et pour carence dans l'organisation de son travail ; que, par jugement du 21 novembre 1995, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cette décision et a enjoint à ladite chambre de réintégrer l'intéressé sous peine d'astreinte de 1 000 F par jour de retard ; que, par une décision du 31 janvier 1996, le président de la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux a réintégré, à compter du 20 janvier 1995, M. X en qualité de chargé de mission « développement local et aménagement rural » ; que cette décision a été annulée par jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 9602032 du 16 octobre 1997, devenu définitif ; que, par une nouvelle décision du 13 novembre 1997, confirmée le 28 novembre 1997, le président de la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux a, compte tenu de la suppression du poste d'animation du centre de design industriel aquitain intervenue le 1er juin 1996, de nouveau réintégré M. X en qualité de chargé de mission « développement local et aménagement rural » ; qu'enfin, par une décision du 6 octobre 1998, le président de la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux a retiré sa décision de réintégration du 13 novembre 1997, confirmée le 28 novembre 1997, et a réintégré à compter du 20 janvier 1995 M. X dans ses fonctions de chargé de mission « désign-bois-environnement » ; que, par un arrêt rendu le 5 juillet 2004, la présente cour a considéré que le poste d'animation du centre de design Aquitain ayant été supprimé le 1er juin 1996, l'emploi attribué à M. X constitue, tant en ce qui concerne le niveau hiérarchique que la rémunération, un emploi équivalent à celui qu'il occupait avant son licenciement ; que M. X interjette appel du jugement rendu le 7 novembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté ses conclusions en indemnité dirigées contre la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux, à raison des conséquences préjudiciables des différentes décisions prises par cette dernière à son égard ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'en opposant à la demande de M. X tendant à la réparation des préjudices nés de la décision du 31 janvier 1996, l'autorité de la chose jugée le 16 octobre 1997, le tribunal administratif de Bordeaux a implicitement mais nécessairement rejeté le moyen invoqué par l'intéressé, tiré de ce que cette demande indemnitaire n'aurait pas le même objet et la même cause que celle ayant donné lieu au jugement du 16 octobre 1997 ;
Considérant que, contrairement à ce que prétend le requérant, il ressort de la motivation du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à chacun des arguments développés par M. X, ont pris en compte l'activité exercée par ce dernier au cours de l'année 1998 et la rémunération y afférente pour apprécier la réalité du préjudice allégué ; qu'ainsi ledit jugement n'est entaché d'aucune irrégularité ;
Au fond :
Considérant, en premier lieu, que, par le jugement précité du 16 octobre 1997, devenu définitif, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté les conclusions de M. X tendant à ce que la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux soit condamnée à réparer les préjudices matériel et moral qu'il aurait subis du fait de la décision du 31 janvier 1996 le réintégrant au sein de cet établissement en qualité de chargé de mission « développement local aménagement rural » ; qu'ainsi l'autorité de la chose jugée s'oppose à ce que le requérant formule une nouvelle demande tendant au même objet et ayant la même cause juridique que celle précédemment jugée ; que, dès lors, c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont accueilli l'exception tirée de l'autorité de la chose jugée, opposée par la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux à ce chef de préjudice ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'est pas contesté que la décision du président de la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux en date du 13 novembre 1997, qui réintègre à nouveau M. X en qualité de chargé de mission « développement local et aménagement rural », méconnaît l'autorité de la chose jugée et est, par suite, illégale, dès lors que l'annulation de la décision de licenciement prise à l'encontre de l'intéressé impliquait qu'il fût replacé dans le poste de chargé de mission « désign, bois, environnement » qu'il occupait avant son licenciement ; que la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux n'a satisfait à cette obligation que par décision du 6 octobre 1998 ; qu'ainsi M. X a été illégalement évincé de ses fonctions pendant la période comprise entre le 13 novembre 1997 et le 6 octobre 1998 ; qu'il est en droit d'obtenir réparation du préjudice qu'il a subi du fait de cette éviction fautive ; que, toutefois, en refusant de rejoindre son poste à la chambre de commerce et d'industrie à la suite de la décision du 13 novembre 1997 prononçant sa réintégration, le requérant a lui même commis une faute de nature à atténuer la responsabilité de l'établissement dans une proportion de 50 % ;
Considérant qu'en l'absence de service fait, M. X ne peut prétendre au paiement des rémunérations dont il a été privé pendant cette période, ni au versement de cotisations sociales ; que, toutefois, il est fondé à demander la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie à réparer le préjudice financier qu'il a subi du fait de la décision illégale du 13 novembre 1997 ; qu'il résulte de l'instruction, et contrairement à ce qu'ont affirmé les premiers juges, que si M. X a exercé pendant la période dont il s'agit une activité d'ingénierie, en profession libérale, et a assuré la direction d'une agence de design industriel, les revenus qu'il a déclarés au titre de cette activité ont été inférieurs à ceux que lui aurait procurés le poste de chargé de mission à la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux ; que, par ailleurs, M. X a subi, du fait de la décision précitée, des troubles dans ses conditions d'existence ; qu'il sera fait une juste appréciation de la réparation qui lui est due en l'évaluant à la somme de 15 000 euros ; que, compte tenu du partage de responsabilité retenu, la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux doit être condamnée à verser à M. X la somme de 7500 euros ; qu'il suit de là que le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges lui ont refusé tout droit à réparation pour ladite période ;
Considérant, en troisième lieu, que les conclusions de M. X tendant à ce que la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux soit condamnée à réparer les préjudices nés de la décision du 6 octobre 1998, présentées pour la première fois en appel, ont le caractère de conclusions nouvelles et sont, par suite, irrecevables ;
Considérant, en quatrième lieu, que le comportement de la chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux n'a pas revêtu, dans les circonstances de l'espèce, le caractère d'une résistance abusive ;
Considérant, enfin, que si M. X entend contester le rejet de ses conclusions concernant la réparation du préjudice que lui aurait causé la mention de son nom sur l'organigramme de la chambre de commerce et d'industrie au poste « développement local aménagement rural », il n'émet aucune critique des motifs qui ont conduit les premiers juges à prononcer ce rejet ; qu'il ne saurait, dès lors, prétendre à une indemnisation à ce titre ;
DECIDE
Article 1er : La chambre de commerce et d'industrie de Bordeaux est condamnée à verser à M. X la somme de 7 500 euros.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 novembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus de la requête de M. X est rejeté.
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N° 01BX00182