Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés au greffe de la Cour les 12 mars 2001 et 18 janvier 2002, présentés pour la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF dont le siège est B.P. 19 à Chateauneuf sur Loire (45110) par Me Y... de Yturbe, avocat ; la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF demande à la Cour :
1) de réformer le jugement du 7 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Basse-Terre n'a que partiellement fait droit à ses demandes indemnitaires présentées à l'encontre de la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre dans le cadre du solde du marché de construction d'un immeuble de bureaux ;
2) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre à lui verser les sommes de 179 633,60 F et 9 640,69 F avec intérêts, ainsi que la somme de 494 147 F ou, subsidiairement, de 340 893 F au titre des intérêts moratoires ;
3) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre à lui payer la somme de 30 000 F en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 96-1182 du 30 décembre 1996 et notamment son article 50 ;
Vu l'arrêté du 31 mai 1997 pris pour son application ;
Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 modifié approuvant le cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2005,
- le rapport de M. Rey ;
- les observations de Me X... pour Me Y... de Yturbe, avocat de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF ;
- et les conclusions de M. Chemin, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un marché signé le 17 décembre 1992, la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre a confié la réalisation d'un immeuble de bureaux à un groupement d'entreprises solidaires dont le mandataire était la SNC Satom Guadeloupe et dont la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF était le co-traitant chargé du lot n° 3 « Charpentes métalliques » ; que cette société a sous-traité le montage des charpentes à la société Caraïbes Steel Structures qui a été acceptée et dont les conditions de paiement ont été agréées par le maître d'ouvrage ; qu'après que les travaux aient été réceptionnés avec effet au 26 octobre 1994, le décompte général a été notifié au mandataire du groupement le 2 octobre 1995 ; que ce décompte a été, en ce qui concerne le lot qui lui était attribué, accepté avec réserves par la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF qui a adressé le 27 octobre 1995, par l'intermédiaire de la SNC Satom Guadeloupe, un mémoire en réclamation à la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre qui y a répondu par un courrier du 20 décembre 1995 ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Basse-Terre n'a admis que certaines des prétentions de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF ; que celle-ci en demande la réformation en ce qu'il a rejeté ses demandes relatives à la retenue opérée à la suite de la mise en demeure adressée par le sous-traitant au maître d'ouvrage ainsi qu'aux frais occasionnés par la libération tardive de la caution et en ce qu'il a retenu, pour le calcul des intérêts moratoires dus en raison des retards de mandatement des acomptes, le taux fixé par l'arrêté du 31 mai 1997 au lieu de celui prévu à l'article 3-4.9 du cahier des clauses administratives particulières ;
Sur les conclusions tendant au remboursement de la retenue opérée sur demande du sous-traitant :
Considérant qu'aux termes de l'article 50-32 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux auquel se réfère le marché litigieux : « Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable » ; que, si par une lettre du 20 décembre 1995 le président de la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre s'est prononcé sur les divers chefs de la réclamation présentée par la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF sur le décompte général qui avait été adressé le 2 octobre 1995 au mandataire du groupement d'entreprises solidaires dont faisait partie ladite société, cette lettre indiquait, s'agissant de la retenue correspondant à la somme réclamée par le sous-traitant de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, que « le règlement sera réalisé conformément à l'accord auquel vous serez parvenu avec votre sous-traitant » ; qu'ainsi, sur ce point, la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre n'avait pas définitivement pris parti sur la réclamation de la société ; que, par suite, c'est à tort que, pour rejeter la demande de cette société, les premiers juges se sont fondés sur ce que, faute d'avoir présenté un nouveau mémoire en réclamation et d'avoir contesté la réponse du maître d'ouvrage dans le délai contractuel, la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF n'était plus recevable à contester le décompte général sur ce point ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13-6 du cahier des clauses administratives générales : « Si un sous-traitant de l'entrepreneur met en demeure le maître de l'ouvrage de lui régler directement certaines sommes qu'il estime lui être dues par l'entrepreneur au titre du contrat de sous-traitance, en application des dispositions des articles 6 et 8 ou 12 et 13 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, la personne responsable du marché peut retenir les sommes réclamées sur celles qui restent à payer à l'entrepreneur. Les sommes ainsi retenues ne portent pas intérêt. Si le droit du sous-traitant est définitivement établi, la personne responsable du marché paie le sous-traitant et les sommes dues à l'entrepreneur sont réduites en conséquence » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du jugement du tribunal de commerce d'Orléans en date du 21 novembre 2001, devenu définitif, que la société Caraïbes Steel Structures a renoncé au paiement de la somme retenue par la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre sur le solde du marché dû à la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, suite à la mise en demeure que la société Caraïbes Steel Structures avait adressée à l'organisme consulaire ; que, par suite, la retenue n'ayant plus d'objet, la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF est fondée à en demander le paiement ; qu'il y a ainsi lieu de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre à lui verser à ce titre la somme non contestée de 27 384,97 euros hors taxes ;
Considérant que l'absence de droit à intérêts sur la somme retenue en application de l'article 13-6 du cahier des clauses administratives générales précité prend fin à la date où le droit du sous-traitant est définitivement établi ; qu'en l'espèce ce droit doit être regardé comme établi à la date à laquelle la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre a reçu notification du jugement du tribunal de commerce d'Orléans, soit le 28 janvier 2002 ; qu'à défaut de mandatement dans le délai prévu à l'article 3-3.6 du cahier des clauses administratives particulières, cette somme portera intérêt au taux contractuel à compter de cette date ;
Sur le montant des intérêts moratoires :
Considérant que, si l'arrêté du 31 mai 1997 pris pour l'application de l'article 50 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1996 a légalement fixé au 1er janvier 1997 la date à partir de laquelle les intérêts moratoires relatifs aux marchés publics, dont la procédure de passation a été lancée avant le 19 décembre 1993, seraient calculés par référence aux taux d'intérêt applicables de façon usuelle pour le financement à court terme des entreprises, il n'a eu, ni pour objet, ni pour effet de substituer ce taux à celui prévu par un marché public de travaux en dérogation à celui alors fixé en vertu du code des marchés publics ; que, par suite, c'est à tort que le Tribunal administratif de Basse-Terre a accordé les intérêts dus sur l'avance consentie le 1er mai 1993 et sur les acomptes au taux fixé par l'arrêté du 31 mai 1997 au lieu de celui prévu à l'article 3-4.9 du cahier des clauses administratives particulières annexé au marché du 17 décembre 1992 ; que le montant non contesté desdits intérêts s'élève à la somme de 24 563,20 euros hors taxes déduction faite de la somme déjà accordée à ce titre par le tribunal administratif ; qu'il y a lieu de faire application de ce taux contractuel également sur la retenue opérée sur le solde ;
Sur le préjudice causé par la libération tardive de la caution :
Considérant que le Tribunal administratif de Basse-Terre a estimé qu'à la date du 27 juillet 1994 à laquelle l'entreprise a demandé la mainlevée de la caution bancaire, la chambre de commerce et d'industrie aurait dû la libérer ; que, par suite, la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF a droit au remboursement des frais de cautionnement qu'elle a exposés à compter de cette date jusqu'à la date de libération de la caution ; que ces frais, dont elle justifie le montant en appel, s'élèvent à 1 651,15 euros ; qu'il y a lieu de condamner la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre à verser à la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF ladite somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2002, date de la mainlevée effective de la caution ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 8 octobre 2004 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu d'y faire droit à cette date ainsi qu'à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, tant en première instance qu'en appel, et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle, en revanche, à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre demande au titre des mêmes frais ;
DECIDE :
Article 1er : La chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre est condamnée à verser à la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF les sommes de 27 384,97 euros hors taxes assorties des intérêts au taux fixé par l'article 3-4.9 du cahier des clauses administratives particulières à compter du 28 février 2002 et la somme de 1 651,15 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 janvier 2002.
Article 2 : La chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre est condamnée à verser à la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF la somme de 24 563,20 euros hors taxes au titre des intérêts sur l'avance forfaitaire et les acomptes.
Article 3 : Les intérêts échus à la date du 8 octobre 2004 seront capitalisés à cette date ainsi qu'à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Basse-Terre en date du 7 décembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : La chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre versera à la SOCIETE BAUDIN CHATEAUNEUF une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la chambre de commerce et d'industrie de Pointe à Pitre tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
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No 01BX00638