Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 janvier 2003, présentée pour la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (ASF), dont le siège social est ..., par la SCP La Sade, X... ;
La société ASF demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement du 24 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Toulouse l'a condamnée à payer à M. et Mme Edouard Z... et à M. Jean-François Z... la somme de 85 000 euros en réparation des préjudices qu'ils subiraient du fait la présence de l'autoroute A 64 ;
2° de rejeter la demande présentée pour M. et Mme Edouard Z... et M. Jean-François Z... devant le tribunal administratif de Toulouse ;
3° de condamner les consorts Z... à lui payer une somme de 750 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 2004,
le rapport de M. Bayle, premier conseiller ;
les observations de Me X... de la SCP La Sade X... pour la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (ASF) ;
les observations de Me Y... de la SCP Lassus Noume Manga Masson Y... pour M. et Mme Edouard Z... ;
et les conclusions de M. Péano, commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le président du Tribunal administratif de Toulouse le 17 février 1998, que la maison d'habitation appartenant aux consorts Z... sur le territoire de la commune de Montrejeau, qui a été construite dans un environnement rural calme et offrant une vue dégagée, sur des espaces boisés en particulier, est dorénavant située à 55 mètres de l'emprise de l'autoroute A 64, en contre bas du talus de plus de quatre mètres de hauteur qui supporte cet ouvrage ; que, si les niveaux de pression acoustique induits par l'autoroute ne dépassent pas les plafonds définies par la réglementation relative à la limitation du bruit des aménagements et des infrastructures de transports terrestres, l'émergence sonore résultant de cet ouvrage, dont l'importance peut être prise en compte pour déterminer l'existence de nuisances, alors même que les prescriptions des articles R. 48-1 à R. 48-5 du code de la santé publique ne sont pas applicables aux bruits provenant des infrastructures de transports et des véhicules qui y circulent, est supérieure de plus de 17 dB (A), au regard de mesures acoustiques prises le 19 mai 1995 ; que la lumière issue de la circulation nocturne constitue également un inconvénient, en période estivale, pour les occupants de la maison ; que, si les consorts Z... n'apportent pas d'éléments de nature à établir qu'ils subiraient du fait de l'autoroute des atteintes excessives à l'intimité de leur vie privée, la construction de cet ouvrage les a privés de la vue dont ils bénéficiaient ; que ces gênes, qui excèdent, par leur importance, celles que doivent normalement supporter dans l'intérêt général les propriétaires voisins d'une autoroute, présentent un caractère anormal et spécial de nature à diminuer la valeur vénale de la propriété des consorts Z... ; qu'il résulte de ce qui précède que la société des AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse l'a reconnue responsable des préjudices subis de ce chef par les consorts Z... ;
Sur la réparation :
Considérant que l'expert commis par l'ordonnance du 17 février 1998, dont la compétence technique ne peut être discutée devant la Cour, à qui il n'appartient pas de contrôler l'appréciation de cette compétence à laquelle s'est livré le président du Tribunal administratif de Toulouse en désignant l'intéressé, a évalué la valeur vénale de la propriété des consorts Z... avant la construction de l'autoroute à un montant de 1 100 000 F, sur la base de l'estimation, par le service des domaines, de maisons implantées dans des communes proches et d'une évaluation de la propriété dont s'agit par un notaire de Montrejeau en août 1995 ; que, si les consorts Z... se prévalent d'une estimation amiable, en date du 14 juin 1998, qui évalue le coût de la reconstruction de la maison et de l'aménagement de la propriété à l'identique à un montant de 2 986 010, 78 F, ils n'assortissent pas ce document des pièces justifiant cette évaluation, qui atteint presque le double du coût du terrain et des travaux de construction supportés par les propriétaires à peine plus de dix ans auparavant et qui, dans ces conditions, doit être regardée comme exagérée ; qu'ainsi, les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation de la perte de valeur vénale de la propriété en l'évaluant à la somme de 70 000 euros ; qu'il suit de là, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que les consorts Z... ne sont pas fondés à demander, par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement attaqué du tribunal administratif de Toulouse ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les consorts Z..., qui n'ont pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, soient condamnés à verser à la société ASF la somme qu'elle demande sur ce fondement ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner la société ASF à payer aux consorts Z... une somme globale de 1 300 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société AUTOROUTES DU SUD DE LA FRANCE (ASF) est rejetée.
Article 2 : La société ASF versera à M. et Mme Edouard Z... et à M. Jean-François Z... une somme globale de 1 300 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 03BX00099