Vu la requête enregistrée le 27 novembre 1998 au greffe de la cour, présentée pour la SARL HERBE et la SCI des TOURNIES, représentées par Me Brenac, commissaire à l'exécution de leurs plans de cessions respectifs, ainsi que pour Mme ROMEU, demeurant 8 place de l'hôtel de ville à Verniolles (09340), et pour M. ROMEU, demeurant 16 rue Lautréamont à Saint-Cyprien Plage (66750), par la SCP "Jean Ravina et associés" avocat au barreau de Toulouse ;
Les requérants demandent à la cour :
1?) d'annuler le jugement en date du 22 septembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leurs demandes tendant à ce que l'Etat soit condamné à réparer les préjudices subis du fait des redressements irréguliers pratiqués par l'administration fiscale ;
2?) de condamner l'Etat à verser : 1) à Me Brenac, en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SARL HERBE et de celui de la SCI des TOURNIES, respectivement les sommes de 3 280 756 F et 4 641 847 F en réparation du préjudice subi par ces deux sociétés ; 2) à Mme ROMEU la somme de 724 267 F ; 3) à M. ROMEU la somme de 322 703,27 F ;
3?) de condamner l'Etat à verser à chacun des requérants la somme de 20 000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2001 :
- le rapport de M. A. DE MALAFOSSE, président assesseur ;
- les observations de Me RAVINA, avocat, pour Me BRENAC représentant la SARL HERBE et la SCI des TOURNIES, pour Mme Maryse ROMEU et pour M. René ROMEU ;
- et les conclusions de M. M. HEINIS, commissaire du gouvernement ;
Considérant que si la requête par laquelle la SARL HERBE, la SCI des TOURNIES, Mme ROMEU et M. ROMEU ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner l'Etat à réparer les préjudices subis en raison des fautes commises par les services fiscaux de l'Ariège n'a pas été précédée d'une demande préalable à l'autorité administrative, ces mêmes requérants ont adressé au ministre délégué au budget, le 30 octobre 1996, une demande d'indemnisation qui a fait l'objet d'une décision expresse de rejet du 5 février 1997 que les intéressés ont porté à la connaissance du tribunal par mémoire enregistré le 4 avril 1997 ; que cette décision, intervenue avant que le tribunal administratif ne rende le jugement attaqué, a lié le contentieux devant le tribunal, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'irrecevabilité liée au défaut de décision administrative préalable a été invoquée par l'administration dans un mémoire produit avant la présentation de la demande d'indemnisation du 30 octobre 1996 ; qu'ainsi, les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande comme irrecevable pour défaut de décision administrative préalable ; que ce jugement doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SARL HERBE, la SCI des TOURNIES, Mme ROMEU et M. ROMEU devant le tribunal administratif de Toulouse ;
Considérant que la SARL HERBE, qui a exploité à partir de 1984 une discothèque dans des locaux qui lui étaient donnés en location par la SCI des TOURNIES, a été assujettie, à la suite d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les exercices clos le 31 août de chacune des années 1984 à 1988, à des suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée qui provenaient en majeure partie d'une reconstitution des recettes de l'entreprise et qui ont été mises en recouvrement le 22 septembre 1989 pour la taxe sur la valeur ajoutée et le 31 décembre 1989 pour l'impôt sur les sociétés ; que, par un jugement du 15 décembre 1994 devenu définitif, le tribunal administratif de Toulouse a accordé la décharge de ces impositions en tant qu'elles procédaient de cette reconstitution ; que la SARL HERBE et la SCI des TOURNIES, aujourd'hui en liquidation à la suite de la cession de leurs actifs dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire, ainsi que Mme ROMEU, gérante de ces deux sociétés, et M. ROMEU, qui était le dirigeant de fait de la SARL HERBE et s'était porté caution des deux sociétés, soutiennent que les services fiscaux ont fait preuve, tant à l'occasion de la vérification que dans le déroulement de la procédure qui a abouti à l'établissement des impositions supplémentaires, de comportements fautifs qui sont à l'origine des préjudices dont ils demandent réparation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'avant même d'introduire, le 27 janvier 1990, sa réclamation contre les impositions dont il s'agit, qui était assortie d'une demande de sursis de paiement, et sans même attendre, par conséquent, les suites données à cette demande alors que l'octroi du sursis de paiement aurait suspendu l'exigibilité des impositions en attendant que la décharge de celles-ci fût accordée par le tribunal administratif, la SARL HERBE s'est déclarée, le 15 janvier 1990, en état de cessation de paiement ; que l'administration apporte des éléments qui tendent à établir qu'en réalité, la déclaration de cessation de paiement s'explique par la dégradation de la situation financière de la société avant même l'établissement des impositions supplémentaires ; qu'ainsi, la décision de la SARL HERBE de se déclarer en état de cessation de paiement, ainsi que celle de la SCI des TOURNIES qui a été faite le 5 février 1990 et qui a été présentée comme la suite inévitable de celle de la SARL HERBE, n'apparaissent pas comme la conséquence directe de l'établissement de ces impositions ; qu'il n'est pas démontré que le "passif fiscal" représenté par les impositions supplémentaires compromettait définitivement les chances de la SARL HERBE de redresser sa situation ; que, par suite, les préjudices invoqués par les deux sociétés précitées et par Mme ROMEU, qui correspondent aux conséquences de la cession, dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire, des actifs de ces sociétés et de leur cessation d'activité, découlent en définitive de la décision de la SARL HERBE de déposer son bilan et non du seul établissement des impositions ; que M. ROMEU n'établit pas qu'il a subi un "préjudice moral" imputable au seul fait qu'il a "conduit et suivi toute la procédure de contestation des redressements fiscaux injustifiés" ; qu'ainsi, en l'absence de lien de causalité entre les fautes administratives invoquées et les préjudices dont il est demandé réparation, il y a lieu de rejeter les demandes d'indemnisation présentées par la SARL HERBE, la SCI des TOURNIES, Mme ROMEU et M. ROMEU ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que l'Etat n'est pas la partie perdante ; qu'il ne saurait, par suite, être condamné à verser aux requérants la somme qu'ils réclament au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse en date du 22 septembre 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SARL HERBE, la SCI des TOURNIES, Mme ROMEU et M. ROMEU devant le tribunal administratif de Toulouse est rejetée.