Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés respectivement au greffe de la cour les 12 et 28 novembre 1990, présentés pour les consorts X..., demeurant ... et tendant à ce que la cour :
- annule le jugement du 2 octobre 1990 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier de Dax (Landes) soit condamné à leur verser diverses sommes en réparation des préjudices qui leur ont été causés par le décès de Melle Martine X... survenu le 24 avril 1978 ;
- accueille leur demande et condamne le centre hospitalier à leur verser les indemnités qu'ils demandent ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 1991 :
- le rapport de M. Baixas, conseiller ;
- les observations de Me Defos de Rau, avocat des consorts X... ; - les observations de Me Thoumieux, avocat du centre hospitalier de Dax ; - et les conclusions de M. de Malafosse, commissaire du gouvernement ;
Sur la prescription quadriennale :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 : "Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en réponse à la réclamation par laquelle l'avocat des requérants a demandé au centre hospitalier de Dax de les indemniser du préjudice causé par le décès de Melle Martine X... survenu le 24 avril 1978, l'assureur du centre hospitalier agissant par délégation expresse de son assuré a, par lettre du 27 octobre 1978 proposé de différer l'examen d'une éventuelle indemnisation dans l'attente des précisions apportées par la procédure pénale diligentée par les requérants à l'encontre du praticien ayant opéré la victime ; que l'avocat du centre hospitalier a spontanément au cours des années qui ont suivi et jusqu'en 1983, sollicité par écrit, et reçu de l'avocat des requérants des informations sur l'évolution de cette procédure pénale, qui s'est achevée par un jugement du tribunal correctionnel du 13 juillet 1984 et un arrêt du 28 avril 1987 de la Cour d'appel ; qu'ainsi et à raison de la proposition de l'assureur confortée par le comportement de l'avocat du centre hospitalier, les requérants ont pu légitimement croire que leurs droits à indemnité étaient sauvegardés au moins jusqu'à l'intervention d'une décision du juge pénal ; que cette attitude, non démentie jusqu'à ce que le centre hospitalier oppose devant le tribunal administratif la prescription quadriennale doit être considérée, comme ayant constitué dans les circonstances de l'espèce un fait interruptif de la prescription quadriennale au sens des dispositions de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 précité ; que dans ces conditions la prescription quadriennale ne pouvait être utilement opposée à la demande par laquelle les consorts X... ont, le 12 février 1988 demandé au tribunal administratif de Pau de condamner le centre hospitalier de Dax à les indemniser ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les consorts X... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté leurs demandes d'indemnisation en accueillant la prescription quadriennale que le centre hospitalier de Dax leur avait opposée ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par les consorts X... à l'appui de leurs requêtes tant devant le tribunal administratif que devant la cour ;
Sur la responsabilité et les préjudices :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que les négligences médicales qui ont entraîné la mort de Melle X... sont constitutives d'une faute lourde de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce il sera fait une juste appréciation du préjudice subi par les consorts X... en condamnant le centre hospitalier de Dax, d'une part, à leur verser une somme de 10.000 F au titre des frais d'obsèques, d'autre part, à payer à chacun des père et mère de la victime une somme de 50.000 F ainsi qu'une somme de 20.000 F à chacun de ses frère, soeur et grand-mère ;
Sur l'application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner le centre hospitalier de Dax à payer aux consorts X... une somme de 5.000 F au titre des dépenses exposées par eux et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 2 octobre 1990 est annulé.
Article 2 : Le centre hospitalier de Dax est condamné à verser aux consorts X... la somme de 10.000 F au titre des frais d'obsèques. Il versera également à chacun des père et mère de la victime une somme de 50.000 F et à chacun des frère, soeur et grand-mère paternelle de la victime une somme de 20.000 F.
Article 3 : Le centre hospitalier de Dax est condamné à verser aux consorts X... une somme de 5.000 F au titre de l'article R.222 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts X... est rejeté.