La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/04/2013 | FRANCE | N°10BX00624

France | France, Cour administrative d'appel de, 5ème chambre (formation à 3), 09 avril 2013, 10BX00624


Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2010 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 8 mars 2010, présentée pour la Sepanso Béarn Pyrénées dont le siège est Maison de la nature et de l'environnement Domaine de Sers à Pau (64000), par Me Moutet-Fortis ;

La Sepanso Béarn Pyrénées demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700971 en date du 4 janvier 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a, d'une part, renvoyé la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées devant le préfet des Pyrénées-Atlantiques aux fins d'édiction d'un arrêt

complémentaire fixant le volume maximum d'eau souterraine pouvant être prélevé pour le ...

Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2010 sous forme de télécopie et régularisée par courrier le 8 mars 2010, présentée pour la Sepanso Béarn Pyrénées dont le siège est Maison de la nature et de l'environnement Domaine de Sers à Pau (64000), par Me Moutet-Fortis ;

La Sepanso Béarn Pyrénées demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700971 en date du 4 janvier 2010 par lequel le tribunal administratif de Pau a, d'une part, renvoyé la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées devant le préfet des Pyrénées-Atlantiques aux fins d'édiction d'un arrêté complémentaire fixant le volume maximum d'eau souterraine pouvant être prélevé pour le fonctionnement de la base d'eaux vives et, d'autre part, rejeté le surplus de sa demande tendant à l'annulation de la décision, en date du 25 novembre 2005, par laquelle le préfet des Pyrénées-Atlantiques a autorisé la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées à réaliser les travaux d'aménagement d'une base d'eaux vives en rive droite du Gave de Pau, sur les territoires des communes de Pau, Bizanos et Mazères-Lezons et à prélever 15 m3/s au maximum dans le Gave de Pau pour alimenter le stade d'eaux vives ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Sepanso Béarn Pyrénées soutient :

- que l'étude d'impact est insuffisante dans la mesure où : 1°) la présentation de l'étendue du patrimoine naturel classé du site est entachée d'erreurs et d'imprécisions importantes ; 2°) les incidences de l'aménagement de la base d'eaux vives sur les habitats naturels sont sous-évaluées ; 3°) les incidences de l'activité de la base d'eaux vives sur la faune du site ont été minorées ; 4°) l'insalubrité des eaux du Gave de Pau a été minorée ; 5°) l'impact hydrologique du changement climatique n'est pas pris en compte ; 6°) l'étude d'impact méconnaît gravement le risque d'inondation ; 7°) en minorant les incidences sur le patrimoine naturel, sur les risques sanitaires, sur les risques d'inondation, l'étude d'impact justifie le choix d'un site géographiquement et économiquement inopportun ;

- que le projet méconnaît les articles L. 414-1 et L. 414-4 du code de l'environnement ;

- que l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance du droit communautaire découlant de la directive " Oiseaux " du 2 avril 1979 et de la directive " Habitats " du 21 mai 1992 ; qu'aucun élément ne vient justifier l'atteinte portée à l'environnement du site ;

- que le projet autorisé est incompatible avec les objectifs fixés par le schéma départemental d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Adour Garonne ;

- que l'arrêté méconnaît les objectifs fixés par la directive cadre sur l'eau du 23 octobre 2000 ;

- que les modalités de récupération économique du coût de cet investissement public sur les utilisateurs n'ont jamais été précisées dans le dossier d'enquête publique ; que le bilan coût/avantage de l'opération est très incertain alors que les décisions publiques dans le domaine de l'eau doivent respecter le principe de récupération des coûts et des services, tel que défini sous l'article L. 210-1 alinéa 3 du code de l'environnement ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 mai 2010, présenté pour la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées, par Me Gil-Fourrier qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la Sepanso Béarn Pyrénées à lui verser 3 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

La communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées soutient :

- que l'étude d'impact porte sur l'emprise de la base d'eaux vives, objet de l'arrêté litigieux, et non sur le périmètre de l'ensemble du projet " Porte des Gaves " ;

- qu'il n'y a aucune ambiguïté, que ce soit dans l'étude d'impact ou dans le document d'incidences Natura 2000, sur les périmètres respectifs de la zone naturelle d'intérêt écologique, floristique et faunistique (ZNIEFF), de la zone verte du SDAGE Adour Garonne et du SIC Gave de Pau ; qu'aucune sujétion environnementale n'a été omise, qui aurait entraîné une appréciation erronée des impacts du projet sur l'environnement ;

- que l'étude d'impact expose sans aucune minoration l'étendue de la superficie à défricher ; que les habitats naturels n'ont pas été sous-évalués ; que les conditions de reconstitution de la saligue sont présentes et seront favorisées ;

- que l'étude d'impact et le document d'incidences Natura 2000 sont pertinents quant aux effets du projet sur l'avifaune ;

- que l'insalubrité des eaux du Gave de Pau a été pertinemment analysée ;

- que l'impact hydrologique d'un éventuel réchauffement climatique serait compensé par la gestion des barrages d'EDF ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait à l'étude d'impact de traiter la question du réchauffement climatique ;

- que la libre expansion des crues a été respectée conformément au SDAGE Adour Garonne et au plan de prévention du risque inondation (PPRI) ;

- que la procédure d'autorisation au titre de la loi sur l'eau ne donne pas lieu à la démonstration de l'utilité publique du projet ; qu'en lieu et place d'un environnement en déréliction, la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées s'est engagée à réaliser un projet propre, en lien avec la nature, conciliant développement économique et touristique et valeurs environnementales et écologiques ;

- qu'aux dates de l'enquête publique et de l'arrêté litigieux, le Gave de Pau n'avait pas été désigné comme zone spéciale de conservation et site Natura 2000 ; que la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées a toutefois procédé à une évaluation appropriée des incidences du projet sur le site, eu égard aux objectifs de conservation dudit site ; que le document d'incidence Natura 2000 a démontré que le projet de base d'eaux vives ne saurait porter atteinte à l'état de conservation du site du Gave de Pau ;

- que l'arrêté en litige a également été pris conformément aux dispositions de la directive " Oiseaux " ; que le projet est compatible avec le SDAGE Adour Garonne ;

- que l'arrêté litigieux respecte les dispositions de la directive cadre 2000/60/CE et les principes de l'article L. 211-1 du code de l'environnement, le projet ne générant aucune dégradation supplémentaire du site et participant à l'amélioration de l'état des écosystèmes aquatiques et terrestres et des zones humides qui en dépendent ;

- que le financement du projet n'est pas du tout incertain et bénéficie de subventions de l'Etat, du Conseil régional et du Conseil général ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2010, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient :

- qu'il y a lieu de se reporter aux observations produites par le préfet des Pyrénées-Atlantiques devant le tribunal administratif de Pau ;

- que la circonstance que le tracé des contours des différentes zones reportées sur la cartographie n'entache pas l'analyse de l'état initial du site et de son environnement figurant au dossier soumis à enquête publique d'une irrégularité de nature à vicier la procédure ; que l'emplacement exact du parcours d'eaux vives est précisé dans le volet " état initial du site et de son environnement " ;

- que, pas plus qu'en première instance, la requérante n'apporte la preuve que le pétitionnaire aurait minoré la surface à défricher ; qu'en tout état de cause, ce moyen manque en fait ;

- que l'étude d'impact analyse correctement les incidences de l'activité de la base d'eaux vives sur la faune du site ;

- que la critique de minoration de l'insalubrité des eaux du Gave est infondée ; que la baignade ne figure pas au nombre des sports d'eaux vives auxquels le site est destiné ; qu'un arrêté complémentaire a fixé le volume maximum d'eau souterraine pouvant être prélevé pour le fonctionnement de la base ;

- que le projet en cause n'étant pas susceptible d'avoir des incidences prévisibles sur le climat, aucune étude spécifique sur ce point n'était nécessaire en application de l'article R. 122-3 du code de l'environnement ;

- que l'étude d'impact consacre un paragraphe 2.5.4 à la question de l'inondabilité du site et ne méconnaît donc pas ce risque ;

- qu'il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier l'opportunité du choix du site retenu, ni de le comparer avec un autre site ; que, si la requérante semble alléguer un détournement de procédure, elle ne l'établit nullement ;

- que le document d'évaluation des incidences et l'étude d'impact ont suffisamment analysé les incidences pendant les travaux et durant la phase de fonctionnement de la base d'eaux vives sur les habitats et les espèces classées d'intérêt communautaire ; que, dès lors que des mesures compensatoires sont prévues pour assurer la cohérence globale du réseau Natura 2000, le préfet n'a commis aucune erreur de droit en accordant son autorisation ;

- que les directives " Oiseaux " et " Habitats " ont été transposées en droit national par les articles L. 411-1, L. 414-1 et R. 414-1 du code de l'environnement ; que la requérante ne peut dès lors se prévaloir de la prétendue violation des directives en cause ;

- qu'il ressort des éléments du dossier que le projet est compatible avec le SDAGE, et notamment avec les mesures A2, A5, C16 et C26 ;

- que le projet en cause permet la réhabilitation d'un site dégradé en prévoyant notamment l'extension d'une zone de saligues ; qu'en outre, l'opportunité du choix du site d'implantation n'est pas susceptible d'une discussion contentieuse devant le juge administratif ; qu'ainsi, le moyen tiré de la prétendue violation de l'article L. 211-1 du code de l'environnement et de l'article 1er de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 doit être écarté ;

- que, compte tenu des précisions apportées par la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées, le moyen tiré de la violation de l'article L. 210-1 alinéa 3 du code de l'environnement doit être écarté ;

Vu l'ordonnance fixant en dernier lieu la clôture de l'instruction au 4 août 2010 à 12 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 79/409/CEE du 2 avril 1979 ;

Vu la directive n° 92/43/CEE du conseil du 21 mai 1992 ;

Vu la directive n° 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 12 mars 2013 :

- le rapport de Mme Florence Demurger, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gosselin, rapporteur public ;

- les observations de Me Cros, avocat de la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées et de M. Rodes, représentant la Sepanso Béarn Pyrénées ;

1. Considérant que, par arrêté du 25 novembre 2005, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a autorisé la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées à réaliser les travaux d'aménagement d'une base d'eaux vives en rive droite du Gave de Pau, sur le territoire des communes de Pau, Bizanos, Gelos et Mazères-Lezons et à prélever un maximum de 15 m3 d'eau par seconde dans le Gave afin d'alimenter ladite base ; que l'aménagement de cet ouvrage comprend un bassin de départ, un parcours de compétition de 250 m de longueur, un bassin d'arrivée, un parcours de transition et d'entraînement, une zone de gradins naturels destinée à accueillir 4 000 spectateurs, un bassin d'initiation kayak dans le bras du Gave de Pau, des cheminements desservant le stade d'eaux vives ainsi qu'une passerelle enjambant le Gave en aval du stade, à l'usage des piétons, cyclistes et cavaliers ; que, par jugement en date du 4 janvier 2010, le tribunal administratif de Pau a, d'une part, renvoyé la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées devant le préfet des Pyrénées-Atlantiques aux fins d'édiction d'un arrêté complémentaire fixant le volume maximum d'eau souterraine pouvant être prélevé pour le fonctionnement de la base d'eaux vives et, d'autre part, rejeté le surplus de la demande présentée par la Sepanso Béarn Pyrénées tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral autorisant la réalisation de la base d'eaux vives ; que, par la présente requête, la Sepanso Béarn Pyrénées interjette appel de ce jugement ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 122-3 du code de l'environnement : " I. - Le contenu de l'étude d'impact doit être en relation avec l'importance des travaux et aménagements projetés et avec leurs incidences prévisibles sur l'environnement. II. - L'étude d'impact présente successivement : 1° Une analyse de l'état initial du site et de son environnement, portant notamment sur les richesses naturelles et les espaces naturels agricoles, forestiers, maritimes ou de loisirs, affectés par les aménagements ou ouvrages ; 2° Une analyse des effets directs et indirects, temporaires et permanents du projet sur l'environnement, et en particulier sur la faune et la flore, les sites et paysages, le sol, l'eau, l'air, le climat, les milieux naturels et les équilibres biologiques, sur la protection des biens et du patrimoine culturel et, le cas échéant, sur la commodité du voisinage (bruits, vibrations, odeurs, émissions lumineuses) ou sur l'hygiène, la santé, la sécurité et la salubrité publique ; 3° Les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue des préoccupations d'environnement, parmi les partis envisagés qui font l'objet d'une description, le projet présenté a été retenu ; 4° Les mesures envisagées par le maître de l'ouvrage ou le pétitionnaire pour supprimer, réduire et, si possible, compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement et la santé, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 414-21 du même code : " . - Le dossier d'évaluation d'incidences, établi par le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage, comprend : 1° Une description du programme ou du projet, accompagnée d'une carte permettant de localiser les travaux, ouvrages ou aménagements envisagés par rapport au site Natura 2000 ou au réseau des sites Natura 2000 retenus pour l'évaluation et, lorsque ces travaux, ouvrages ou aménagements sont à réaliser dans le périmètre d'un site Natura 2000, d'un plan de situation détaillé ; 2° Une analyse des effets notables, temporaires ou permanents, que les travaux, ouvrages ou aménagements peuvent avoir, par eux-mêmes ou en combinaison avec d'autres programmes ou projets dont est responsable le pétitionnaire ou le maître d'ouvrage, sur l'état de conservation des habitats naturels et des espèces qui ont justifié la désignation du ou des sites. II. - S'il résulte de l'analyse mentionnée au 2° du I que les travaux, ouvrages ou aménagements peuvent avoir des effets notables dommageables, pendant ou après la réalisation du programme ou du projet, sur l'état de conservation des habitats naturels et des espèces qui ont justifié la désignation du ou des sites, le maître d'ouvrage ou le pétitionnaire complète le dossier d'évaluation en indiquant les mesures de nature à supprimer ou réduire ces effets dommageables, ainsi que l'estimation des dépenses correspondantes (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que l'étude d'impact présente, en page 113, une cartographie complète et précise permettant de constater que le site retenu pour la réalisation de la base d'eaux vives recoupe un site d'intérêt communautaire Natura 2000, une zone naturelle d'intérêt écologique, floristique et faunistique (ZNIEFF) de type II ainsi qu'un site inscrit ; que cette carte précise également que le Gave de Pau constitue un cours d'eau classé par le schéma départemental d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Adour Garonne en tant qu'axe bleu et zone verte ; que le document d'évaluation des incidences par rapport au site Natura 2000 reprend, en page 16, la même cartographie ; que si, pour ce qui est de cette dernière, le tracé des contours des différentes zones comporte manifestement des inexactitudes, cette circonstance n'entache pas l'analyse de l'état initial du site et de son environnement figurant au dossier soumis à enquête d'une irrégularité de nature à vicier la procédure, dès lors qu'il n'est pas contesté que la cartographie de la page 113 présente les limites exactes des différentes zones ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que l'étude d'impact, qui détaille parcelle par parcelle la surface à défricher, mentionne que l'aménagement du projet nécessite le défrichement de 2,3331 hectares constitués par les espaces recouverts de végétation arbustive ou arborée dans le parc de l'ancien camping, la zone résiduelle de saligues dégradée en limite de la gravière, les saligues de la berge du Gave au niveau du chenal de restitution des eaux au droit de la passerelle et la zone de faciès mixte de l'îlot Nord ; qu'en se bornant à soutenir que le défrichement lié à la réalisation du projet en cause concernerait une superficie de près de 6 hectares, la Sepanso Béarn Pyrénées ne justifie pas du bien-fondé du moyen tiré de ce que ladite étude aurait minoré l'étendue de la superficie à défricher ; qu'il résulte par ailleurs de l'instruction que l'habitat prioritaire 91 FO (forêt alluviale de chênes et d'ormes), au sens du réseau Natura 2000, n'est pas présent sur le site du projet ; que la Sepanso Béarn Pyrénées ne peut valablement soutenir que la zone de l'ancien camping correspondrait à une zone d'habitat 91FO dès lors que cette zone ne comporte que des espèces d'arbres exogènes et plantées par l'homme comme ornement ; qu'il ressort en outre du document d'incidence que l'habitat prioritaire 91 EO (aulnes et frênes) situé dans l'emprise du projet de base d'eaux vives s'étend sur une surface de 2,7 hectares et qu'il sera impacté par les défrichements sur une surface de 2 150 m2 ; que la Sepanso Béarn Pyrénées n'établit pas que les documents soumis à enquête auraient minoré la superficie ainsi défrichée ; qu'enfin, l'étude d'impact a reconnu les incidences du défrichement sur l'habitat 91 EO précédemment mentionné et prévoit, à titre de compensation, de reconstituer une zone de saligues de cet habitat sur une surface de 7 200 m2 aux abords du parcours de restitution, et de reconstituer 5 400 m2 de saligues sur une largeur de 12 mètres aux abords du cheminement piétonnier ; qu'en se bornant à qualifier de " peu convaincante " cette mesure de compensation, la Sepanso Béarn Pyrénées, qui ne conteste pas que les secteurs choisis ne présenteraient pas les conditions nécessaires à la reconstitution de la saligue, ne démontre pas que l'étude d'impact et le document d'incidence n'auraient pas prévu les mesures nécessaires à la réduction et à la compensation des conséquences dommageables du projet sur l'environnement ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'étude d'impact présente le Gave de Pau comme un cours d'eau de première catégorie piscicole avec présence de poissons migrateurs et consacre des développements relatifs aux impacts du projet sur la population piscicole, avec notamment un tableau étudiant l'impact du fonctionnement de la base d'eaux vives sur la circulation des eaux en fonction du volume d'eau restitué dans le Gave, lequel varie selon les saisons et les heures de la journée ; que les inconvénients engendrés par la circulation de la base d'eaux vives sont analysés et que diverses mesures de franchissement des poissons migrateurs, approuvées par le Conseil supérieur de la pêche, sont présentées ; que, dans ces conditions, l'association requérante ne peut valablement soutenir que l'étude d'impact serait insuffisante sur ce point ; que, s'agissant de la population d'oiseaux d'eau, il ne résulte pas de l'instruction que le secteur concerné par le projet abriterait de manière permanente des espèces d'oiseaux protégées ; que l'étude d'impact présente les incidences de la base d'eaux vives sur l'avifaune tant en ce qui concerne les impacts liés au défrichement qu'en ce qui concerne les impacts liés au fonctionnement ; qu'il est également mentionné que les saligues du bord du Gave, qui sont préservées dans leur quasi-totalité, constituent le seul milieu susceptible d'être fréquenté par les espèces protégées de la directive " Oiseaux " et que cette zone assurera un rôle tampon entre la base d'eaux vives et le Gave ; que, dans ces conditions, la Sepanso Béarn Pyrénées n'est pas fondée à soutenir que l'étude d'impact aurait insuffisamment pris en compte la question du maintien de la population d'oiseaux d'eau ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que l'étude d'impact consacre des développements circonstanciés à la question de la qualité de l'eau (pages 75 à 83) et présente une analyse bactériologique du Gave de Pau en annexe 8 ; qu'il est ainsi mentionné que, pour l'année 2003, la qualité physico-chimique de l'eau était moyenne en amont et médiocre en aval et que, au cours des dix dernières années, les résultats d'analyse des eaux de baignade présentaient une mauvaise qualité bactériologique ; que la Sepanso Béarn Pyrénées ne peut dès lors valablement soutenir que l'étude d'impact aurait minoré l'insalubrité des eaux du Gave, ni qu'elle aurait mentionné à tort une utilisation exceptionnelle des eaux souterraines pour le fonctionnement de la base d'eaux vives ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que si la Sepanso Béarn Pyrénées soutient que l'étude d'impact n'expose pas l'impact hydrologique du changement climatique sur le projet en cause, elle ne se prévaut de la méconnaissance d'aucune disposition législative ou réglementaire qui imposerait d'analyser la question du " réchauffement climatique " ;

8. Considérant, en sixième lieu, que l'étude d'impact détaille de manière précise la situation du secteur concerné par l'emprise du projet au regard du risque d'inondation ; qu'elle indique notamment que la partie haute du site est inondable dès la crue centennale par le bras de dérivation du Gave tandis que la partie basse, inondable régulièrement, n'est pas concernée par les travaux à l'exception de ceux à réaliser dans la zone de restitution du Gave ; que la même étude détaille le dispositif d'alerte mis en place et précise que le stade d'eaux vives est lui-même conçu pour résister aux inondations ; que, dans ces conditions, l'étude d'impact ne peut être regardée comme ayant minoré le risque d'inondation ; qu'elle n'a pas davantage sous-estimé l'impact des ouvrages à réaliser sur l'écoulement des eaux ; que si la Sepanso Béarn Pyrénées soutient que la cartographie accompagnant le plan de prévention des risques d'inondation de Mazères, Bizanos et Gelos présente des erreurs en ce qui concerne les côtes de référence de l'île de Coy, sur laquelle se trouve le projet litigieux, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse ;

9. Considérant, en septième lieu, qu'il résulte des développements qui précèdent que l'étude d'impact n'a pas sous-estimé les conséquences du projet en termes d'impact sur le patrimoine naturel, de risques sanitaires et d'inondation ; qu'il résulte en outre de l'instruction que le projet contesté a notamment vocation à permettre la réhabilitation d'un espace très dégradé, faisant l'objet de pollutions diverses, de défrichements sauvages, de décharges multiples et d'incursions d'engins motorisés et que la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées s'est fixée pour objectif la réalisation d'un projet conciliant le développement économique et touristique et les valeurs environnementales et écologiques ; que la Sepanso Béarn Pyrénées ne peut valablement soutenir que l'étude d'impact aurait été menée dans le but de justifier le choix d'un site " géographiquement et économiquement inopportun " ;

Sur la légalité interne :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 214-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions des articles L. 214-2 à L. 214-6 les installations ne figurant pas à la nomenclature des installations classées, les ouvrages, travaux et activités (...) entraînant des prélèvements sur les eaux superficielles ou souterraines, restitués ou non, une modification du niveau ou du mode d'écoulement des eaux (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 214-2 du même code : " Les installations, ouvrages, travaux et activités visés à l'article L. 214-1 sont (...) soumis à autorisation ou à déclaration suivant les dangers qu'ils présentent et la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les écosystèmes aquatiques (...) " ; que l'article L. 214-10 de ce code dispose : " Les décisions prises en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 et L. 214-8 peuvent être déférées à la juridiction administrative dans les conditions prévues à l'article L. 514-6 " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 514-6 : " - Les décisions prises en application des articles L. 512-1, L. 512-3, L. 512-7, L. 512-8, L. 512-12, L. 512-13, L. 513-1 à L. 514-2, L. 514-4, L. 515-13 I et L. 516-1 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. Elles peuvent être déférées à la juridiction administrative (...) " ;

11. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 414-1 du code de l'environnement : " V. - Les sites Natura 2000 font l'objet de mesures destinées à conserver ou à rétablir dans un état favorable à leur maintien à long terme les habitats naturels et les populations des espèces de faune et de flore sauvages qui ont justifié leur délimitation (...) Elles ne conduisent pas à interdire les activités humaines dès lors qu'elles n'ont pas d'effets significatifs par rapport aux objectifs mentionnés à l'alinéa ci-dessus. (...) IV. - Les sites désignés comme zones spéciales de conservation et zones de protection spéciale par décision de l'autorité administrative concourent, sous l'appellation commune de "sites Natura 2000", à la formation du réseau écologique européen Natura 2000 " ; que l'article L. 414-4 du même code dispose : " I. - Les programmes ou projets de travaux, d'ouvrage ou d'aménagement soumis à un régime d'autorisation ou d'approbation administrative, et dont la réalisation est de nature à affecter de façon notable un site Natura 2000, font l'objet d'une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site. (...) II. - L'autorité compétente ne peut autoriser ou approuver un programme ou projet mentionné au premier alinéa du I s'il résulte de l'évaluation que sa réalisation porte atteinte à l'état de conservation du site. III. - Toutefois, lorsqu'il n'existe pas d'autre solution que la réalisation d'un programme ou projet qui est de nature à porter atteinte à l'état de conservation du site, l'autorité compétente peut donner son accord pour des raisons impératives d'intérêt public. Dans ce cas, elle s'assure que des mesures compensatoires sont prises pour maintenir la cohérence globale du réseau Natura 2000 (...) " ;

12. Considérant que, si le projet de base d'eaux vives autorisé par l'arrêté litigieux se trouve inclus dans une zone Natura 2000, il ne résulte pas de l'instruction qu'il aura un impact significatif sur l'avifaune et la faune piscicole présente sur le site ; que, ainsi qu'il a été dit précédemment, le projet contesté présente l'intérêt de réhabiliter un espace dégradé par la pollution, les défrichements sauvages, la présence de décharges et d'une gravière inexploitée et prévoit également la restauration et l'extension d'une zone de saligues sur plus d'un hectare ; qu'enfin, des mesures compensatoires ont été prévues par la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées afin de favoriser le maintien de la cohérence globale du réseau Natura 2000 ; que, par suite, en délivrant l'autorisation sollicitée, le préfet des Pyrénées-Atlantiques n'a méconnu ni les dispositions précitées du code de l'environnement, ni, en tout état de cause, les directives susvisées n° 79/409/CEE du 2 avril 1979 et n° 92/43/CEE du 21 mai 1992 ;

13. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 212-1 du code de l'environnement dispose : " XI. - Les programmes et les décisions administratives dans le domaine de l'eau doivent être compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux " ;

14. Considérant que l'arrêté litigieux prévoit, dans son article 2, l'obligation pour la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées d'assurer un suivi régulier de la qualité physico-chimique et bactériologique des eaux ; qu'il comporte des prescriptions destinées à assurer la vie, la circulation et le développement des poissons ; qu'ainsi, la Sepanso Béarn Pyrénées n'est pas fondée à soutenir que ledit arrêté ne serait pas compatible avec la mesure A 2 contenue dans le SDAGE Adour/Garonne qui prévoit que les arrêtés d'autorisation précisent, en fonction de l'importance du projet et de la sensibilité des milieux, la fréquence et les moyens d'autocontrôle devant être mis en oeuvre par le pétitionnaire pour vérifier les effets écologiques des projets sur le milieu ;

15. Considérant que, si le projet en cause comporte la destruction de 2 150 mètres carrés de saligues constituant l'habitat prioritaire 91 EO, il prévoit par ailleurs la reconstitution de cette zone et son extension sur plus d'un hectare ; qu'ainsi, l'arrêté d'autorisation ne peut être regardé comme incompatible avec la mesure A 5 du SDAGE, qui prévoit que, dans les zones vertes, toute autorisation soumise à la loi sur l'eau ne peut être délivrée que si le document qui évalue son impact sur l'environnement montre qu'elle ne remet pas en cause l'équilibre et la valeur biologique du milieu et si les mesures compensatoires rétablissent cet équilibre et cette valeur biologique ;

16. Considérant que la mesure C 16 du SDAGE prévoit que l'usage des eaux douces souterraines est affecté par ordre de priorité décroissante à l'alimentation en eau potable, au thermalisme, à l'agriculture et l'industrie ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le fonctionnement de la base d'eaux vives nécessiterait un recours régulier aux eaux souterraines, et partant, que l'ordre de priorité rappelé ci-dessus n'aurait pas été respecté ;

17. Considérant que, s'agissant de la mesure C 26 du SDAGE, qui prévoit que les actes administratifs relatifs au prélèvement d'eaux de surface ou souterraines définissent, en plus des débits autorisés, les volumes maximaux prélevables, le tribunal administratif de Pau a, par le jugement attaqué, renvoyé la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées devant le préfet des Pyrénées-Atlantiques afin que soit pris un arrêté complémentaire fixant le volume maximal d'eau souterraine pouvant être prélevé ; que, par arrêté du 8 avril 2010 modifiant l'arrêté en litige, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a fixé à 82 800 m3 le volume annuel maximal d'eau souterraine pouvant être prélevé ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la limite ainsi fixée serait insuffisante ;

18. Considérant, en troisième lieu, que le projet en litige, qui permet la réhabilitation d'un site dégradé en prévoyant notamment l'extension d'une zone de saligues, ne porte pas atteinte au principe de la gestion équilibrée de la ressource en eau consacré par l'article L. 211-1 du code de l'environnement ; que, si l'association requérante soutient que les dispositions de l'arrêté litigieux seraient incompatibles avec les objectifs poursuivis par la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, il est constant que cette directive a été transposée au livre II du code de l'environnement par la loi n° 2004-338 du 21 avril 2004, dont il n'est pas soutenu qu'elle aurait méconnu les objectifs ou des dispositions précises et inconditionnelles de la directive ou qu'elle l'aurait incomplètement transposée ; que le moyen tiré de la méconnaissance des objectifs de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 doit, par suite, être également écarté ;

19. Considérant, en quatrième et dernier lieu qu'aux termes de l'article L. 210-3 du code de l'environnement : " Les coûts liés à l'utilisation de l'eau, y compris les coûts pour l'environnement et les ressources elles-mêmes, sont supportés par les utilisateurs en tenant compte des conséquences sociales, environnementales et économiques ainsi que des conditions géographiques et climatiques. " ; qu'il résulte de l'instruction que le coût de l'aménagement de la base d'eaux vives, évalué à 5,65 M d'euros hors taxes, sera pris en charge par la communauté d'agglomération de Pau-Pyrénées et que l'exploitation de cette installation se fera dans le cadre d'une délégation de service public ; qu'en se bornant à soutenir, sans d'ailleurs le démontrer, que le coût du projet serait disproportionné, l'association requérante n'établit pas, en tout état de cause, que l'autorisation litigieuse aurait méconnu les dispositions législatives précitées ;

20. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Sepanso Béarn Pyrénées n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau n'a que partiellement fait droit à sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à la Sepanso Béarn Pyrénées la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de condamner la requérante à verser à la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées une somme de 1 500 euros en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la Sepanso Béarn Pyrénées est rejetée.

Article 2 : La Sepanso Béarn Pyrénées versera à la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Sepanso Béarn Pyrénées, à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et à la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées. Copie sera adressée au préfet des Pyrénées-Atlantiques.

Délibéré après l'audience du 12 mars 2013 où siégeaient :

M. Michel Dronneau, président,

M. Jean-Michel Bayle, président-assesseur,

Mme Florence Demurger, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 avril 2013.

Le rapporteur,

Florence DEMURGERLe président,

Michel DRONNEAULe greffier,

Evelyne GAY-BOISSIERES

La République mande et ordonne à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,

Evelyne GAY-BOISSIERES

''

''

''

''

2

N° 10BX00624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de
Formation : 5ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 10BX00624
Date de la décision : 09/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-006-03-01 Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. DRONNEAU
Rapporteur ?: Mme Florence DEMURGER
Rapporteur public ?: M. GOSSELIN
Avocat(s) : SCP GINESTET MOUTET LECLAIR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.de;arret;2013-04-09;10bx00624 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award