Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 17 novembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour.
Par un jugement n° 2014445 du 22 mars 2022, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 25 avril 2022, le 10 mai 2023 et le 17 novembre 2023, M. A..., représenté par Me Chevalier, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles 18 et 19 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'un détournement de procédure et méconnaît l'obligation de loyauté de l'administration à l'égard des administrés dès lors que le préfet a omis de statuer sur sa demande de renouvellement de titre de séjour.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations.
Par un courrier du 15 novembre 2023, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de la requête de M. A... tendant à l'annulation de décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination qui sont inexistantes, l'arrêté attaqué du 17 novembre 2020 ne comportant pas de telles décisions et, par ailleurs, ces conclusions étant nouvelles en appel.
Par un mémoire, enregistré le 17 novembre 2023, M. A... a répondu à ce courrier et fait valoir qu'il n'a pas entendu contester des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Haëm, président-rapporteur,
- et les observations de Me Chevalier, avocat de M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant sri lankais, né le 24 décembre 1983 et entré en France le 20 décembre 2010, a bénéficié en 2018 d'une mesure de régularisation, sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, devenu l'article L. 435-1 du même code, et s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", valable du 27 juillet 2018 au 26 juillet 2019 et qui a été renouvelée jusqu'au 21 août 2020. Par un arrêté du 17 novembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour. M. A... fait appel du jugement du 22 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, la décision contestée, qui vise, notamment, les articles L. 313-3, L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne les faits sur lesquels s'est fondé le préfet de la Seine-Saint-Denis pour estimer que la présence en France de M. A... constituait une menace pour l'ordre public, à savoir les faits, commis le 29 septembre 2020, de détention illégale d'arme prohibée de catégorie D2, d'état d'ébriété sur la voie publique et de menaces sur la personne d'autrui qui lui ont valu d'être interpellé et placé en garde à vue. Elle indique également que l'intéressé, qui est sans enfant et sans attaches familiales en France, ne justifie pas d'obstacles l'empêchant de poursuivre une vie privée et familiale normale dans son pays d'origine, le Sri Lanka. Par suite, la décision attaquée, qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fondent, est suffisamment motivée.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire (...) peut, par une décision motivée, être refusée (...) à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public ". Aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-5-1 de ce code : " L'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire (...) doit être en mesure de justifier qu'il continue de remplir les conditions requises pour la délivrance de cette carte (...). / Si l'étranger cesse de remplir l'une des conditions exigées pour la délivrance de la carte de séjour dont il est titulaire (...), la carte de séjour peut lui être retirée ou son renouvellement refusé par une décision motivée (...) ".
4. D'une part, il ne ressort ni de la motivation de la décision en litige, rappelée au point 2, ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui a entendu rejeter la demande de renouvellement de la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " présentée par M. A... en raison d'une menace pour l'ordre public, n'aurait pas procédé préalablement à un examen particulier de cette demande au regard des dispositions des articles L. 313-10 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite et en tout état de cause, les moyens tirés d'une violation de l'obligation de loyauté et d'un détournement de procédure doivent être écartés.
5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a été interpellé, le 29 septembre 2020, pour des faits de détention illégale d'arme prohibée de catégorie D2, d'état d'ébriété sur la voie publique et de menaces sur la personne d'autrui. En particulier, il ressort des procès-verbaux de police versés au dossier qu'à cette date, M. A..., en état d'ébriété et porteur de deux cutters, l'un de vingt centimètres, l'autre de dix centimètres environ, a été maintenu par des agents de la SNCF à la Gare du Nord, puis interpellé par des agents de police, après avoir menacé un couple, avec un comparse et à l'aide de l'un de ses cutters. De plus, la circonstance que M. A... n'a pas fait l'objet de poursuites pénales pour ces faits, mais d'un avis de classement par le procureur de la République à la suite d'une notification d'un " rappel solennel à l'auteur des faits que son comportement constitue une infraction punie par la loi ", ne saurait permettre de remettre en cause la matérialité des faits retenus par le préfet. En outre, le requérant persiste à nier ou à minimiser les faits qui lui sont reprochés, y compris le port, sans motif légitime, de deux cutters qu'il présente, sans convaincre, comme des " outils de travail ", alors qu'au surplus, il a été interpellé un jour au cours duquel il ne travaillait pas, et ne présente pas ainsi de gages sérieux et avérés de distanciation ou de remise en question par rapport à ces faits, d'une gravité certaine, ainsi que de non réitération. Au surplus, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas sérieusement contesté que M. A... est également connu des services de police pour des faits de violences volontaires aggravées, port ou détention d'armes prohibées et dégradation de biens privés commis le 27 mars 2015 et pour des faits de dégradation ou détérioration d'un bien appartenant à autrui commis le 11 novembre 2020. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune erreur de droit, ni fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en estimant que le séjour en France de M. A... constituait une menace pour l'ordre public et, en conséquence, en refusant de renouveler son titre de séjour.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. M. A... se prévaut de la durée de son séjour en France depuis le mois de décembre 2010 et fait état de la présence sur le territoire de membres de sa famille, notamment de sa sœur, ainsi que d'une activité professionnelle, notamment comme " employé polyvalent " auprès de la Sarl " Superette Bobigny " depuis le mois d'avril 2017. Toutefois, l'intéressé, qui a fait l'objet de trois mesures d'éloignement en date des 5 décembre 2012, 25 septembre 2015 et 26 mai 2017, qu'il n'a pas exécutées, et dont la situation au regard du séjour n'a été régularisée qu'en 2018, ne peut se prévaloir à la date de la décision contestée que d'une durée de séjour régulier relativement brève sur le territoire français. En outre, il ne justifie pas davantage d'une insertion professionnelle ancienne sur le territoire et n'apporte aucun élément précis sur les liens de toute nature, notamment d'ordre amical, qu'il aurait noués en France. Par ailleurs, si l'intéressé produit différents titres de séjour ou cartes nationales d'identité de tantes, oncles et cousins résidant en France, M. A... n'établit, ni n'allègue sérieusement, aucune circonstance particulière de nature à faire obstacle à ce qu'il poursuive normalement sa vie privée et familiale à l'étranger et, en particulier, au Sri Lanka où réside, notamment, son épouse et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de vingt-six ans. Enfin, il n'établit, ni n'allègue sérieusement, qu'il serait dans l'impossibilité de se réinsérer dans son pays d'origine. Ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la nature et de la gravité des faits commis par l'intéressé, la décision en litige portant refus de renouvellement de titre de séjour ne peut être regardée comme ayant porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts, notamment de préservation de l'ordre public, en vue desquels cette mesure a été prise, ou comme étant entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 14 décembre 2023, à laquelle siégeaient :
- M. d'Haëm, président,
- Mme d'Argenlieu, première conseillère,
- Mme Saint-Macary, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2023.
Le président-rapporteur,
R. d'HAËML'assesseure la plus ancienne,
L. d'ARGENLIEULa greffière,
E. TORDO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22PA01878