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12/12/2023 | FRANCE | N°21BX03284

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 12 décembre 2023, 21BX03284


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme D... C... née B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le président du centre communal d'action sociale d'Orthez l'a placée en disponibilité d'office à titre conservatoire à compter du 1er janvier 2015 et a suspendu sa rémunération ainsi que ses droits à déroulement de carrière et à la retraite.



Par un jugement n°1901247 en date du 15 juin 2021, le tribunal administr

atif de Pau a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requête, en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... née B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le président du centre communal d'action sociale d'Orthez l'a placée en disponibilité d'office à titre conservatoire à compter du 1er janvier 2015 et a suspendu sa rémunération ainsi que ses droits à déroulement de carrière et à la retraite.

Par un jugement n°1901247 en date du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2021, Mme D... C..., représentée par Me Tucoo-Chala, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Pau du 15 juin 2021 ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance.

Elle soutient que :

- l'arrêt de la cour administrative d'appel du 20 décembre 2018 ayant annulé l'arrêté du 24 décembre 2014 prononçant son licenciement faisait obstacle à ce qu'elle soit placée en disponibilité d'office à compter du 1er janvier 2015 ;

- l'arrêté du 29 juillet 2019 est insuffisamment motivé ;

- elle n'avait pas épuisé ses droits à congés de maladie ordinaire du fait de la réintégration ;

- elle bénéficiait du droit à être maintenue en congés de maladie ordinaire à plein traitement dès lors qu'aucune offre de reclassement ne lui avait été faite, en application de l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- elle n'était pas inapte définitivement à toutes fonctions mais pouvait reprendre ses fonctions sur un poste aménagé ou un autre poste.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2022, la commune d'Orthez, représentée par Me Mandile, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'argumentation de Mme C... n'est pas clairement exposée et est identique à celle exposée en première instance ;

- Mme C... ayant sollicité et obtenu sa mise à la retraite, la requête est dépourvue d'objet ;

- les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction a été fixée au 2 janvier 2023 par une ordonnance du 22 novembre 2022.

Par décision du 16 septembre 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux a accordé à Mme C... l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°84-53 du 21 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-298 du 20 mars 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Duplan, rapporteur public ;

- les observations de Me Tucoo-Chala, représentant Mme C...,

- et celles de Me Mandile représentant le centre communal d'action social d'Orthez.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C..., agent social de 2ème classe du centre communal d'action sociale (CCAS) d'Orthez exerçant les fonctions d'aide à domicile, a été victime le 24 avril 2012 d'un accident de service. Le président du CCAS d'Orthez l'a placée à compter de cette date en congé de maladie ordinaire imputable au service, puis en congé de maladie ordinaire non imputable au service à compter du 23 décembre 2013. Par un avis du 2 avril 2014, le comité médical départemental s'est prononcé favorablement à la prolongation de ce congé de maladie ordinaire au-delà de six mois consécutifs, a estimé que Mme C... présentait une inaptitude définitive et absolue à ses fonctions, et a préconisé l'engagement d'une procédure de reclassement de l'intéressée. Mme C... a alors présenté une demande de reclassement, laquelle a été implicitement rejetée par le président du CCAS d'Orthez. Par un arrêté du 5 mai 2014, ce dernier a placé Mme C... en congé de maladie ordinaire non imputable au service pour la période du 23 décembre 2013 au 22 décembre 2014, et par un arrêté du 24 décembre 2014, a prononcé son licenciement pour inaptitude physique définitive et absolue à l'exercice de ses fonctions à compter du 1er janvier 2015. Cet arrêté a été annulé par un arrêt de la Cour du 20 décembre 2018 devenu définitif. Par arrêté du 4 avril 2019, le président du CCAS d'Orthez a alors réintégré l'intéressée dans les effectifs du CCAS avec effet rétroactif au 1er janvier 2015. Puis par un arrêté du 1er juillet 2019, cette même autorité a placé Mme C... en disponibilité d'office à titre conservatoire à compter du 1er janvier 2015, dans l'attente de l'avis du comité médical départemental sur son aptitude à exercer ses fonctions, a mis fin à sa rémunération et a suspendu ses droits à déroulement de carrière et à la retraite. Par un arrêté du 29 juillet 2019, le président du CCAS a retiré cet arrêté du 1er juillet 2019 tout en reprenant son contenu, et en précisant que la fin de la rémunération et de la suspension des droits à déroulement de carrière et à la retraite prendraient également effet à compter du 1er janvier 2015. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 en tant qu'il la place en disponibilité d'office, met fin à sa rémunération et suspend ses droits à déroulement de carrière et à la retraite. Elle relève appel du jugement en date du 15 juin 2021 rejetant sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En faisant valoir que la requête d'appel de Mme C... est dépourvue d'objet dès lors que l'intéressée a fait valoir ses droits à la retraite et a été radiée des cadres de la fonction publique par un arrêté du 16 décembre 2019, le centre communal doit être regardé comme invoquant non une exception de non-lieu de la requête d'appel, mais une irrégularité du jugement en tant que les premiers juges n'ont pas prononcé un non-lieu à statuer. Toutefois, la circonstance que Mme C... ne faisait plus partie des cadres de l'administration ne privait pas d'objet sa contestation d'une mesure antérieurement prise, le 29 juillet 2019 et la plaçant rétroactivement en disponibilité d'office à titre conservatoire.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, les décisions plaçant d'office un fonctionnaire en disponibilité en raison de l'expiration de ses droits statutaires à congé de maladie ne relèvent d'aucune des catégories de décisions qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Mme C... ne peut donc utilement soutenir que l'arrêté du 29 juillet 2019 serait insuffisamment motivé.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 104 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, devenu article L. 613-1 du code général de la fonction publique : " Les dispositions de la présente loi sont applicables aux fonctionnaires nommés dans des emplois permanents à temps non complet, sous réserve des dérogations prévues par décret en Conseil d'Etat rendues nécessaires par la nature de ces emplois ". Aux termes de l'article 40 du décret du 20 mars 1991 pris pour l'application de ces dispositions : " A l'expiration de ses droits à congé de maladie ou de grave maladie, le fonctionnaire temporairement inapte pour raison de santé à reprendre son service est placé dans la position de disponibilité dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas de l'article 19 du décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 susvisé ". Les fonctionnaires nommés dans des emplois à temps non complet ont droit aux congés de maladie prévus au 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions.

5. Mme C... soutient qu'elle n'avait pas épuisé ses droits à congés de maladie. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 5 mai 2014, elle a été placée en congé de maladie ordinaire non imputable au service pour la période du 23 décembre 2013 au 22 décembre 2014. Contrairement à ce que soutient la requérante, sa réintégration juridique dans les effectifs de l'administration à compter du 1er janvier 2015 par l'arrêté du 4 avril 2019 n'a pas eu pour effet de reconstituer ses droits à congés de maladie ordinaire, cette reconstitution ne pouvant procéder que de la reprise d'activité effective, laquelle était soumise à l'avis du comité médical. Le moyen doit, par suite, être écarté.

6. En troisième lieu, Mme C... soutient que l'arrêté du 29 juillet 2019 méconnaît l'autorité de chose jugée de l'arrêt du 20 décembre 2018, devenu définitif, par lequel la Cour a annulé l'arrêté du 24 décembre 2014 la licenciant pour inaptitude physique au motif que son employeur n'avait pas satisfait à l'obligation de reclassement telle que prévue par l'article 41 du décret du 20 mars 1991 précité. Aux termes de cet article : " Le fonctionnaire qui est définitivement inapte physiquement à l'exercice de ses fonctions à l'issue d'un congé de maladie, (...) et qui ne peut être reclassé en application du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 susvisé est licencié ". Et aux termes de l'article 81 de la loi du 21 janvier 1984, devenu L. 826-3 du code général de la fonction publique : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi, emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ".

7. Toutefois, d'une part, ainsi qu'il a été dit, par arrêté du 4 avril 2019, le président du centre communal a réintégré la requérante dans les effectifs au 9ème échelon du grade d'agent social titulaire à temps non complet, avec effet rétroactif au 1er janvier 2015, et ce, jusqu'à l'admission à la retraite de Mme C..., à sa demande, prononcé par arrêté en date du 16 décembre 2019, à compter du 1er janvier 2020.

8. D'autre part, il appartenait au centre communal, dans le cadre de la nouvelle procédure de reclassement que l'administration devait engager, de saisir à nouveau le comité médical pour qu'il se prononce sur l'aptitude de l'intéressée à exercer ses fonctions et, le cas échéant, la possibilité de l'affecter dans un autre emploi de son grade, ce que celui-ci a fait par un avis émis le 6 novembre 2019 en estimant que Mme C... présentait une inaptitude définitive et absolue à ses fonctions et que son état de santé lui permettait de remplir d'autres fonctions correspondant aux emplois de son grade. Le président du centre communal était tenu de placer la requérante, à titre conservatoire et dans l'attente de l'avis du comité médical, en disponibilité qui était la seule position statutaire régulière prévue par son statut, et ce avec effet rétroactif au 1er janvier 2015, dès lors que, à cette date, Mme C... avait épuisé ses droits à congé de maladie. L'arrêté attaqué n'ayant pas pour objet de procéder à la reconstitution rétroactive de la carrière de l'intéressée en exécution de l'arrêt de la Cour, le moyen ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Sur les frais de l'instance :

10. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions du CCAS d'Orthez présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... née B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le CCAS d'Orthez sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... née B... et au centre communal d'action sociale d'Orthez.

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Ghislaine Markarian, présidente,

M. Frédéric Faïck, président assesseur,

M. Julien Dufour, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 décembre 2023.

Le rapporteur,

Julien A...

La présidente,

Ghislaine Markarian

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21BX03284 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03284
Date de la décision : 12/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARKARIAN
Rapporteur ?: M. Julien DUFOUR
Rapporteur public ?: M. DUPLAN
Avocat(s) : MANDILE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-12;21bx03284 ?
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