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01/12/2023 | FRANCE | N°23NT00687

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 01 décembre 2023, 23NT00687


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes, à titre principal, d'annuler la décision implicite née le 16 août 2018 par laquelle la communauté de communes du Pays Fléchois a rejeté leur demande indemnitaire, de condamner cette collectivité à leur verser la somme totale de 15 870 euros en réparation des préjudices causés à leur propriété du fait d'un défaut d'entretien de la voie publique, lors de deux sinistres d'inondation survenus les 4 et 9 juin 201

8 ; à titre subsidiaire, d'ordonner avant-dire droit une expertise.



Par un jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Nantes, à titre principal, d'annuler la décision implicite née le 16 août 2018 par laquelle la communauté de communes du Pays Fléchois a rejeté leur demande indemnitaire, de condamner cette collectivité à leur verser la somme totale de 15 870 euros en réparation des préjudices causés à leur propriété du fait d'un défaut d'entretien de la voie publique, lors de deux sinistres d'inondation survenus les 4 et 9 juin 2018 ; à titre subsidiaire, d'ordonner avant-dire droit une expertise.

Par un jugement n°1914084 du 3 janvier 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 13 mars 2023, Mme B... C..., représentée par la SCP Pavet Benoist Dupuy Renou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite de refus d'indemnisation du 16 août 2018 ;

3°) de condamner la communauté de communes du Pays Fléchois à lui verser la somme totale de 10 870 euros en réparation des préjudices matériels causés à sa propriété et la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral et de la privation de jouissance ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays Fléchois la somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation des faits et d'une erreur de droit au regard des principes de la responsabilité pour dommages de travaux publics ;

- il est entaché d'une contradiction de motifs dès lors que les premiers juges ne pouvaient, sans se contredire, à la fois affirmer que les éléments produits ne permettaient pas d'établir un lien de causalité et estimer dans le même temps que la désignation d'un expert n'était pas nécessaire ;

- les dommages dont elle a été victime résultant d'inondations et de coulées de boues les 4 et 9 juin 2018 procèdent de l'état du chemin rural n°45 desservant leur propriété, ouvrage à la charge de la communauté de communes du Pays Fléchois, dont la responsabilité est engagée même sans faute ;

- elle entend reprendre devant la cour l'intégralité des éléments de fait et des moyens de droit exposés devant le tribunal administratif de Nantes ;

- les préjudices dont elle est fondée à être indemnisée s'élèvent à la somme de 15 870 euros.

La procédure a été communiquée à la communauté de communes du Pays Fléchois, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'environnement ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté n° DIRCOL 2016-0178 de la préfète de la Sarthe portant modification des statuts de la communauté de communes du Pays Fléchois ;

- l'arrêté du 23 juillet 2018 du ministre de l'intérieur portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne,

- et les conclusions de M. Berthon,

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... sont propriétaires d'une maison d'habitation située au 136, chemin le Mont de Veau, sur les parcelles cadastrées section YA n°179 et 205, au lieudit Le Douçay, sur le territoire de la commune de La Flèche. Les 4 et 9 juin 2019, à la suite de violentes pluies accompagnées de coulées de boue, le sous-sol et le garage de leur habitation ont été fortement endommagés. Par un arrêté du 23 juillet 2018, la commune de La Flèche a été reconnue en état de catastrophe naturelle en raison des événements météorologiques survenus le 9 juin 2018. La demande par laquelle M. et Mme C... ont sollicité la condamnation de la communauté de communes du Pays Fléchois à leur verser une indemnité de 15 870 euros en réparation de leurs préjudices, qu'ils imputent à l'absence de dispositifs d'évacuation des eaux pluviales et au défaut d'entretien du chemin rural n°45 didu Mont de Veauau, a été rejetée le

3 janvier 2023 par un jugement du tribunal administratif de Nantes dont Mme C... relève appel.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Nantes a suffisamment répondu aux moyens contenus dans les mémoires produits par M. et

Mme C... en première instance, tenant à l'existence de préjudices indemnisables et d'un lien de causalité entre les dommages qu'ils avaient subis et l'ouvrage public dont ils dénonçaient le défaut d'entretien. Si le tribunal administratif a retenu, pour rejeter la requête indemnitaire qui lui était soumise, qu'il ne résultait pas de l'instruction que les inondations dont ont été victimes les requérants auraient trouvé leur cause directe dans l'état du chemin rural desservant leur propriété, il a, pour porter cette appréciation, tenu compte des éléments dont se prévalaient les requérants, qu'il a examinés dans sa décision et qu'il a considéré comme insuffisants. Alors qu'il n'était pas tenu de répondre, à peine d'irrégularité de sa décision, à tous les arguments avancés par les parties, l'absence de mention du rapport d'expertise établi par la société Polyexpert le

10 septembre 2018, lequel ne comporte au demeurant aucun développement relatif au lien de causalité entre l'ouvrage public et les inondations, ne saurait caractériser une insuffisance de motivation du jugement. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur les conclusions indemnitaires :

3. En premier lieu, le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage n'est pas inhérent à l'existence même de l'ouvrage public ou à son fonctionnement et présente, par suite, un caractère accidentel. Toutefois, ce n'est que si un lien de causalité entre cet ouvrage et les dommages invoqués est établi que le maitre de l'ouvrage sera tenu de réparer le préjudice subi.

4. Il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté par la communauté de communes du Pays Fléchois qu'à la date des sinistres en cause, cette structure intercommunale, dont est membre la commune de La Flèche, détenait la compétence en matière " d'entretien des chemins ruraux (revêtus et non revêtus) desservant les habitations et de liaison ", ainsi que le prévoyaient ses statuts alors applicables, annexés à l'arrêté de la préfète de la Sarthe du 25 mai 2016. Or, le chemin rural n°45 contigu à l'ouest de la parcelle cadastrée YA n°205, dessert la propriété des requérants, ainsi que d'autres habitations. Par suite, l'entretien et l'aménagement de ce chemin relevaient à cette date, ainsi que le soutiennent les requérants, de la compétence de cette communauté de communes.

5. M. et Mme C... soutiennent que les fossés le long de ce chemin rural n'étaient pas entretenus, entraînant le ruissellement des eaux pluviales le long du chemin, qu'une buse située au bout du chemin privé d'accès à leur habitation était bouchée, et qu'un poteau électrique implanté dans le fossé a fait obstacle à l'écoulement des eaux.

6. Toutefois, pas plus en appel qu'en première instance appel, les requérants n'apportent de précisions suffisantes de nature à démontrer, dans le contexte d'épisodes pluvieux exceptionnels qui ont justifié la reconnaissance par les autorités compétentes de l'état de catastrophe naturelle, que l'inondation du sous-sol et du garage de leur habitation aurait pour cause l'ouvrage public constitué par le chemin rural ou ses éléments indissociables, accotements et fossés, dont l'entretien et la surveillance incombent à la communauté de communes. Le plan et les photographies, non datées et dont les lieux de prise de vue ne peuvent être localisés avec certitude, qu'ils produisent, ne permettent pas de comprendre la configuration des lieux, la situation du garage par rapport aux fonds privés supérieurs, le cheminement des eaux d'inondation jusqu'à leur propriété, ni les aménagements qu'eux-mêmes ont pu effectuer pour l'écoulement des eaux pluviales sur l'allée menant à leur maison orientée perpendiculairement à la voie publique et distante d'une cinquantaine de mètres de celle-ci d'après les éléments graphiques produits. S'ils se prévalent d'un " rapport d'expertise catastrophe naturelle " du

10 septembre 2018, établi par la société Polyexpert, ce rapport se borne à proposer et à chiffrer une indemnisation de leurs dommages matériels et ne comporte aucune analyse des causes des inondations et coulées de boue dans leur maison. Enfin, si les requérants font état du creusement et du curage de fossés par la communauté de communes en novembre 2018, cette circonstance ne suffit pas à attester de ce que l'état de ce chemin rural aurait eu pour effet de détériorer et d'aggraver les conditions d'écoulement des eaux naturelles sur leur propriété à la date des sinistres. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que les inondations dont ont été victimes les requérants, dont l'habitation est au demeurant située en zone inondable du plan de prévention des risques naturels du 22 janvier 2014, auraient trouvé leur cause directe dans l'ouvrage public dont ils soulignent le défaut d'entretien.

7. Si Mme C... déclare à la fin de ses écritures qu'elle " reprend devant la cour l'intégralité des éléments de fait et des moyens de droit exposés devant le tribunal administratif de Nantes ", elle ne fournit pas les précisions indispensables à l'appréciation de leur bien-fondé ni ne joint à sa requête une copie du mémoire de première instance qui contenait ces précisions.

8. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu de diligenter une mesure d'expertise avant-dire droit, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices qu'elle a subis avec son époux et à l'annulation de la décision par laquelle la communauté de communes du Pays Fléchois lui a refusé cette indemnisation.

Sur les frais liés au litige :

9. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par Mme C... doivent dès lors être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme C..., à la communauté de communes du Pays Fléchois et à la commune de La Flèche.

Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er décembre 2023.

Le rapporteur,

G.-V. VERGNE

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au préfet de la Sarthe, en ce qui le concerne, et à tous mandataires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00687


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00687
Date de la décision : 01/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SCP PAVET BENOIST DUPUY RENOU

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-01;23nt00687 ?
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