Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a saisi le tribunal administratif de la Martinique d'une demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n° 1700445 du 14 mars 2019 de cette juridiction.
Par un jugement n° 2000441 du 11 octobre 2021, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2021, M. C... A..., représenté par la SELARL Grimaldi et associés, agissant par Me Grimaldi, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Martinique du 11 octobre 2021 précité ;
2°) de prononcer toute mesure d'exécution que nécessite le jugement n° 1700445 du 14 mars 2019 du tribunal administratif de la Martinique dans le délai de dix jours suivant l'arrêt à intervenir sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
3°) d'enjoindre à la collectivité territoriale de Martinique de réexaminer sa demande d'avancement de grade après réexamen de sa valeur professionnelle ainsi que celle des autres agents remplissant les conditions pour bénéficier d'un d'avancement au grade adjoint technique principal de 1ère classe au titre de l'année 2016 ;
4°) d'enjoindre à la collectivité territoriale de Martinique, après réexamen de sa valeur professionnelle et eu égard à l'absence de ratio d'avancement, de l'inscrire au tableau d'avancement au grade d'adjoint technique principal de 1ère classe au titre de l'année 2016 ;
5°) de mettre à la charge de la collectivité territoriale de Martinique une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- l'audience a été tenue irrégulièrement par voie de télécommunication audiovisuelle dès lors que l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020, applicable jusqu'à la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré par le décret du 14 octobre 2020 ne s'appliquait plus en Martinique depuis le 1er juin 2021, d'autant qu'une partie n'a pas été entendue ;
Sur le bien-fondé du jugement :
- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la collectivité territoriale de Martinique n'a pas exécuté le jugement du tribunal dès lors qu'elle a commis les mêmes erreurs en ne respectant pas les règles statutaires d'avancement, dès lors qu'au vu des éléments en possession de la commission administrative paritaire, il ne pouvait qu'être classé dans les premiers du tableau d'avancement ; cette commission a commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il présentait une meilleure valeur professionnelle que ceux qui ont été promus ;
- la collectivité n'a toujours pas procédé à sa notation ou à son évaluation pour l'année 2016 ; elle n'a pas transmis à la commission administrative paritaire du 13 mai 2019 les noms des 35 agents remplissant les conditions de l'avancement au grade d'adjoint technique principal de 1ère classe, classés par ordre de mérite.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 mars 2022 et 12 janvier 2023, la collectivité territoriale de Martinique, représentée par Me Catol, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 5 janvier 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 7 février 2023.
Vu :
- le jugement du tribunal administratif de la Martinique n° 1700445 du 14 mars 2019 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 ;
- le décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 ;
- le décret n° 2021-931 du 13 juillet 2021 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Au cours de l'audience publique, ont été entendus :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de M. Duplan, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement n° 1700445 du 14 mars 2019, devenu définitif, le tribunal administratif de la Martinique a, d'une part, annulé la décision implicite de rejet par laquelle le président du conseil exécutif de Martinique a rejeté la demande d'avancement au grade d'adjoint technique principal de 1ère classe de M. C... A... et, d'autre part, enjoint à la collectivité territoriale de Martinique de réexaminer sa demande d'avancement au titre de l'année 2016.
2. M. C... A... a demandé au tribunal administratif de la Martinique de prescrire les mesures d'exécution de ce jugement. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal, après avoir jugé que la collectivité territoriale de Martinique a entièrement exécuté le jugement du 14 mars 2019, a rejeté sa demande.
Sur la régularité du jugement :
3. L'article 1er de l'ordonnance du 18 novembre 2020, dans sa version modifiée par la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 précise que : " Sauf lorsqu'elles en disposent autrement, les dispositions de la présente ordonnance sont applicables à l'ensemble des juridictions de l'ordre administratif jusqu'à la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré par le décret du 14 octobre 2020 susvisé, prorogé dans les conditions prévues par l'article L. 3131-13 du code de la santé publique. / Par dérogation au premier alinéa du présent article, les articles 2 et 4 sont applicables jusqu'au 30 septembre 2021. ". Aux termes de l'article 2 de cette même ordonnance : " I. - Sur décision du président de la formation de jugement insusceptible de recours, les audiences des juridictions de l'ordre administratif peuvent se tenir en utilisant un moyen de télécommunication audiovisuelle permettant de s'assurer de l'identité des parties et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats. En cas d'impossibilité technique ou matérielle de recourir à un tel moyen, le juge peut, à leur demande, décider d'entendre les parties et leurs avocats par tout moyen de communication électronique, y compris téléphonique, permettant de s'assurer de leur identité et de garantir la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges entre les parties et leurs avocats. Lorsqu'une partie est assistée d'un conseil ou d'un interprète, il n'est pas requis que ce dernier soit physiquement présent auprès d'elle. / II. - un moyen de télécommunication audiovisuelle depuis un lieu distinct de la salle d'audience. (...) Le greffe dresse le procès-verbal des opérations. (...). ".
4. Les dispositions précitées de l'article 2 de l'ordonnance du 18 novembre 2020 ont pour objet, pour la période allant du 14 octobre 2020 à la date de la cessation de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 1er de la loi du 14 novembre 2020, de permettre au président de la formation de jugement d'une juridiction relevant de l'ordre administratif de recourir, pour la tenue des audiences, à des moyens de télécommunication audiovisuelle permettant de certifier l'identité des personnes et d'assurer la qualité et la confidentialité des échanges. Il appartient au président de la formation de jugement de ne recourir à ces moyens dérogatoires de communication que pour autant que certaines parties ou leurs conseils ou encore certains membres de la formation de jugement ou le rapporteur public sont dans l'incapacité, pour des motifs liés à la crise sanitaire, d'être physiquement présents dans la salle d'audience et que la nature et les enjeux de l'affaire n'y font pas obstacle.
5. Aux termes de l'article 1er du décret du 13 juillet 2021 déclarant l'état d'urgence sanitaire dans certains territoires : " L'état d'urgence sanitaire est déclaré sur les territoires de La Réunion et de la Martinique à compter du 14 juillet 2021 à 0 heure ". Aux termes de l'article 3 de la loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire dans sa version applicable du 12 septembre 2021 au 12 novembre 2021 : " (...) III. -L'état d'urgence sanitaire déclaré sur les territoires de La Réunion et de la Martinique par le décret n° 2021-931 du 13 juillet 2021 déclarant l'état d'urgence sanitaire dans certains territoires de la République est prorogé jusqu'au 15 novembre 2021 inclus. (...) "
6. Il résulte des dispositions précitées que le 23 septembre 2021, date de l'audience du tribunal, le territoire de la Martinique était en situation d'état d'urgence sanitaire. Dès lors, le président de la formation de jugement pouvait décider, sur le fondement des articles 1er et 2 de l'ordonnance du 18 novembre 2020 précités, de tenir l'audience en utilisant un moyen de télécommunication audiovisuelle. Par suite, et alors que l'avis d'audience adressé au conseil du requérant indiquait expressément que l'audience se tiendrait en utilisant un moyen de télécommunication audiovisuelle en application de l'article 2 de l'ordonnance du 18 novembre 2020, le moyen tiré de ce que le tribunal ne pouvait tenir une audience dématérialisée le 23 septembre 2021 ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
7. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution (...). Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ".
8. Il résulte de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de la Martinique du 14 mars 2019, que le tribunal a enjoint à la collectivité territoriale de Martinique de " de réexaminer la demande d'avancement au grade d'adjoint technique principal de 1ère classe de M. A... au titre de l'année 2016 ", ce qui ne confère à l'intéressé aucun droit à être promu. En conséquence de cette injonction, il appartenait à la collectivité territoriale de Martinique de convoquer une nouvelle réunion de la commission administrative paritaire, afin que celle-ci réexamine et se prononce de nouveau sur la seule demande d'avancement de M. A... qui avait été écartée dès lors que l'exécution de la chose jugée n'impliquait pas que la collectivité établisse un nouveau tableau d'avancement pour 2016, dans la mesure où il n'est pas contesté que les nominations prononcées pour l'avancement au grade d'adjoint technique principal de 1ère classe étaient devenues définitives.
9. En l'espèce, il n'est pas contesté que la commission administrative paritaire s'est prononcée à nouveau sur la situation de M. A..., proposé par son employeur pour figurer sur le tableau d'avancement, dans sa séance du 13 mai 2019. Lors de sa séance, la commission administrative paritaire s'est prononcée en prenant en compte l'ancienneté de M. A... depuis la date corrigée de son entrée dans la fonction publique le 8 juin 1982, ainsi que sa valeur professionnelle telle qu'indiquée dans le rapport d'évaluation de son supérieur hiérarchique qui lui avait été transmis ainsi qu'il résulte du procès-verbal de la séance, témoignant de ce que l'autorité administrative avait procédé à un examen de la valeur professionnelle du requérant, qui ne peut dès lors soutenir utilement que la commission administrative paritaire n'aurait pas eu transmission de son évaluation professionnelle au titre de l'année 2016. Au vu des éléments tenus à sa disposition par l'autorité administrative compétente, la commission administrative paritaire a émis un avis défavorable en soulignant les manquements de M. A... relevés dans ce rapport sur sa manière de servir.
10. Si M. A... soutient que la commission administrative paritaire aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il présentait une meilleure valeur professionnelle que ceux qui ont été promus et qu'il aurait dû être classé parmi les premiers du tableau d'avancement, une telle argumentation qui conduit à contester la légalité de la décision implicite, rendue sur la base du nouvel avis de la commission administrative paritaire refusant son avancement, relève d'un litige distinct qui ne se rapporte pas à l'exécution du jugement du 14 mars 2019 et dont il n'appartient pas à la juridiction de connaître dans le cadre de cette instance.
11. Il suit de là que la collectivité territoriale de Martinique doit être regardée comme ayant entièrement exécuté le jugement susvisé.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent par voie de conséquence, qu'être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la collectivité territoriale de la Martinique, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par la collectivité territoriale de Martinique au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la collectivité territoriale de Martinique présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à la collectivité territoriale de Martinique.
Délibéré après l'audience du 23 octobre 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Ghislaine Markarian, présidente,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme Caroline Gaillard, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 novembre 2023.
La rapporteure,
Caroline B...
La présidente,
Ghislaine Markarian
La greffière,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au préfet de la Martinique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21BX04522 2