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13/08/2025 | FRANCE | N°506757

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 13 août 2025, 506757


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution de la décision n° 2387 du 12 mars 2025 par laquelle la formation restreinte du conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) a suspendu, pour une durée de deux ans, son droit d'exercer tout acte chirurgical, tout acte obstétrical et tout

acte d'échographie non diagnostique, a limité son exercice à des consultations...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 30 juillet 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision n° 2387 du 12 mars 2025 par laquelle la formation restreinte du conseil national de l'ordre des médecins (CNOM) a suspendu, pour une durée de deux ans, son droit d'exercer tout acte chirurgical, tout acte obstétrical et tout acte d'échographie non diagnostique, a limité son exercice à des consultations de gynécologie médicale et a subordonné la reprise de son exercice à la justification d'obligations de formations ;

2°) d'enjoindre au CNOM de reconnaître son absence d'insuffisance professionnelle et d'en tirer toutes les conséquences s'agissant de son droit d'exercer son activité en gynécologie médicale et obstétrique ;

3°) de mettre à la charge du CNOM la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite, d'une part, en ce que la décision contestée préjudicie de manière grave et immédiate à sa situation, eu égard à la privation brutale de revenus qu'elle entraîne et à ses effets pour sa carrière, et, d'autre part, en ce qu'il est d'intérêt public qu'il poursuive son activité dans un contexte de carence de professionnels dans sa spécialité ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- cette décision a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière dès lors que le rapport d'expertise a été déposé tardivement, est entaché de subjectivité, d'imprécisions et de préjugés quant à son âge et n'a pas été établi de manière impartiale, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation quant à l'existence d'une insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, eu égard à sa participation à de nombreux congrès et réunions scientifiques et à des décennies de pratique ayant toujours donné satisfaction ;

- elle est manifestement disproportionnée dès lors qu'il ne représente aucun danger pour ses patients et que les formations requises pourraient être accomplies sur une durée d'un an.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Aux termes de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique : " I.- En cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional (...) pour une période déterminée, qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée. (...). VI.- Si le conseil régional (...) n'a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l'affaire est portée devant le Conseil national de l'ordre. / VII.- La décision de suspension temporaire du droit d'exercer pour insuffisance professionnelle définit les obligations de formation du praticien. / La notification de la décision mentionne que la reprise de l'exercice professionnel par le praticien ne pourra avoir lieu sans qu'il ait au préalable justifié auprès du conseil régional (...) avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision ".

3. Lorsqu'un praticien suspendu en application de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique saisit le juge administratif d'une demande de suspension de cette décision par la voie du référé, il appartient à celui-ci, afin d'apprécier si la condition d'urgence est remplie, de prendre en considération non seulement la situation et les intérêts du praticien, mais aussi l'intérêt général qui s'attache au respect des exigences de la santé publique et de la sécurité des patients, qui sont susceptibles de justifier, même en l'absence de poursuites disciplinaires, que ce praticien soit invité à compléter et actualiser ses connaissances et à approfondir sa pratique professionnelle, avant de pouvoir reprendre le cours normal de ses activités.

4. Pour caractériser l'urgence à suspendre l'exécution de la décision du 12 mars 2025 par laquelle le Conseil national de l'ordre des médecins l'a suspendu, pour une durée de deux ans, du droit d'exercer tout acte chirurgical, tout acte obstétrical et tout acte d'échographie non diagnostique et a subordonné la reprise de son exercice professionnel à la justification d'obligations de formations, M. A..., qui est âgé de 69 ans et a exercé pendant quarante ans en tant que médecin contractuel remplaçant dans une centaine de maternités de l'hôpital public, fait valoir que cette décision l'empêche de continuer à effectuer des missions en maternité, ce qui a pour effet de le priver de près d'un tiers de ses revenus, l'exposant à de graves difficultés financières pour faire face aux charges de sa famille, et bouleverse ses conditions de vie de façon irréversible, en l'exposant injustement à l'opprobre et à une cessation définitive d'activité. Toutefois, s'il est constant que la mesure contestée lui interdit d'effectuer des actes en chirurgie et en obstétrique, elle ne l'empêche pas d'exercer en médecine générale et pour des consultations de gynécologie médicale. Par ailleurs, s'il fait valoir qu'il est d'intérêt public qu'il puisse continuer à pratiquer en maternité dans un contexte de carence de spécialistes, il convient, ainsi qu'il est dit au point 3, de prendre également en compte l'intérêt général qui s'attache à la sauvegarde de la sécurité des patients et de la qualité des soins qui leur sont dispensés. Il en résulte qu'en l'état de l'instruction, la condition d'urgence, appréciée globalement, ne peut pas être regardée comme remplie.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le sérieux des moyens invoqués, que la requête de M. A... doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du même code.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A....

Fait à Paris, le 13 août 2025

Signé : Suzanne von Coester


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 506757
Date de la décision : 13/08/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 aoû. 2025, n° 506757
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, FELIERS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:506757.20250813
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