La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/06/2025 | FRANCE | N°504976

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 juin 2025, 504976


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 5 et 17 juin 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution de la décision n° CS 2025-08 du 31 mars 2025 par laquelle la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage lui a infligé une sanction consistant notamment en l'interdiction, penda

nt une durée de deux ans, de participer à toute compétition ou activité autorisée ou ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 5 et 17 juin 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision n° CS 2025-08 du 31 mars 2025 par laquelle la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage lui a infligé une sanction consistant notamment en l'interdiction, pendant une durée de deux ans, de participer à toute compétition ou activité autorisée ou organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle, une organisation signataire du code mondial antidopage ou l'un de leurs membres, d'exercer au sein de ces organismes des fonctions d'encadrement ou toute activité administrative et de prendre part à toute activité sportive impliquant des sportifs de niveau national ou international et financée par une personne publique ;

2°) de mettre à la charge de l'Agence française de lutte contre le dopage la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la décision contestée l'expose dans l'immédiat à un licenciement pour faute grave, le prive durablement de sa seule source de revenus et fait obstacle à la poursuite de sa carrière professionnelle ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- cette décision est entachée d'irrégularité en ce qu'elle a été prise en méconnaissance des règles relatives à la convocation des membres de la commission des sanctions ;

- elle méconnaît les droits de la défense en ce qu'elle se fonde, pour écarter l'hypothèse d'une ingestion accidentelle par voie de contamination alimentaire, sur des considérations qui n'ont pas été portées à sa connaissance ;

- elle est entachée d'une double erreur de droit en matière de preuve, d'une part, en ce qu'elle omet de faire application du principe de prépondérance des probabilités mentionné à l'article 6 de la délibération du collège de l'Agence du 27 mai 2021 et, d'autre part, en ce qu'elle fait peser sur lui la charge de la preuve de l'origine de la présence des substances incriminées dans son organisme ;

- c'est à tort que la commission des sanctions a écarté l'hypothèse d'une ingestion accidentelle par voie de contamination alimentaire en dépit de l'absence de mobile sportif, de son profil, des données d'ordre médical et des témoignages recueillis ;

- la sanction qui lui a été infligée est disproportionnée et entachée d'une erreur de droit au regard des conditions d'application du régime propre aux substances d'abus.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du sport ;

- le décret n° 2021-1776 du 23 décembre 2021 portant publication de l'amendement à l'annexe I de la convention internationale contre le dopage dans le sport, adopté à Paris le 14 novembre 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. M. B... A..., joueur professionnel, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la décision du 31 mars 2025 par laquelle, à la suite d'un contrôle antidopage réalisé le 21 mai 2023, la commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage lui a infligé une sanction consistant notamment en l'interdiction, pendant une durée de deux ans, de participer à toute compétition ou activité autorisée ou organisée par une fédération sportive, une ligue professionnelle, une organisation signataire du code mondial antidopage ou l'un de leurs membres, d'exercer au sein de ces organismes des fonctions d'encadrement ou toute activité administrative et de prendre part à toute activité sportive impliquant des sportifs de niveau national ou international et financée par une personne publique.

3. Aux termes du I de l'article L. 232-9 du code du sport : " Est interdite la présence, dans l'échantillon d'un sportif, des substances figurant sur la liste des interdictions mentionnée au dernier alinéa du présent article, de leurs métabolites ou de leurs marqueurs. Il incombe à chaque sportif de s'assurer qu'aucune substance interdite ne pénètre dans son organisme. / La violation de l'interdiction mentionnée à l'alinéa précédent est établie par la présence, dans un échantillon fourni par le sportif, d'une substance interdite, de ses métabolites ou de ses marqueurs, sans qu'il y ait lieu de faire la preuve que l'usage de cette substance a revêtu un caractère intentionnel ou a résulté d'une faute ou d'une négligence du sportif ".

4. Aux termes du I de l'article L. 232-23 du même code : " La commission des sanctions de l'Agence française de lutte contre le dopage peut prononcer à l'encontre des personnes ayant enfreint les dispositions des articles L. 232-9 (...) : (...) / 2° Une suspension temporaire ou définitive : / a) De participer, à quelque titre que ce soit, à une compétition autorisée ou organisée par une organisation signataire du code mondial antidopage ou l'un de ses membres, par une ligue professionnelle ou une organisation responsable de manifestations internationales ou nationales non signataires, par une fédération sportive, ou donnant lieu à remise de prix en argent ou en nature ; / b) De participer à toute activité, y compris les entraînements, stages ou exhibitions, autorisée ou organisée par une organisation signataire du code mondial antidopage ou l'un de ses membres, par une ligue professionnelle ou une organisation responsable de manifestations internationales ou nationales non signataires, ou par une fédération sportive, une ligue professionnelle ou l'un de leurs membres, à moins que ces activités ne s'inscrivent dans des programmes reconnus d'éducation ou de réhabilitation en lien avec la lutte contre le dopage ; / c) D'exercer les fonctions de personnel d'encadrement ou toute activité administrative au sein d'une fédération sportive, d'une ligue professionnelle, d'une organisation signataire du code mondial antidopage ou de l'un de leurs membres ; / d) Et de prendre part à toute activité sportive impliquant des sportifs de niveau national ou international et financée par une personne publique (...) ".

5. Aux termes du I de l'article L. 232-23-3-3 de ce code : " (...) la durée des mesures de suspension mentionnées au 2° du I de l'article L. 232-23 à raison d'un manquement à l'article L. 232-9 (...) : (...) 2° Est de deux ans lorsque ce manquement implique une substance ou méthode spécifiée. Cette durée est portée à quatre ans lorsqu'il est démontré par l'Agence française de lutte contre le dopage que le sportif a eu l'intention de commettre ce manquement (...) ". Toutefois, aux termes du I de l'article L. 232-23-3-10 du même code : " Lorsque l'intéressé établit dans un cas particulier l'absence de faute ou de négligence de sa part, la période de suspension prévue aux articles L. 232-23-3-3 à L. 232-23-3-9 n'est pas applicable ". En outre, le II de l'article L. 232-23-3-10 dispose que " La durée des mesures de suspension prévues aux articles L. 232-23-3-3 à L. 232-23-3-9 peut être réduite dans les conditions suivantes, qui s'excluent mutuellement : 1° Lorsque la violation implique une substance ou une méthode spécifiée autre qu'une substance d'abus, ou lorsque la substance interdite détectée, autre qu'une substance d'abus, provient d'un produit contaminé, et que l'intéressé peut établir son absence de faute ou de négligence significative, la sanction est au minimum un avertissement et au maximum une suspension d'une durée de deux ans, en fonction du degré de sa faute ; (...) / 3° (...) lorsque la violation implique l'absence de soumission au prélèvement d'un échantillon ou la présence dans un échantillon, l'usage, ou la possession non-intentionnels d'une substance ou d'une méthode interdite, si le sportif peut établir son absence de faute ou de négligence significative, la durée de suspension applicable peut être réduite en fonction du degré de faute, sans toutefois être inférieure à la moitié de la période de suspension normalement applicable. (...) / La durée des mesures de suspension prévues aux articles L. 232-23-3-3 à L. 232-23-3-9 peut être réduite par une décision spécialement motivée lorsque les circonstances particulières de l'affaire le justifient au regard du principe de proportionnalité ". Pour l'application de ces dispositions, l'article L. 230-7 de ce code renvoie aux définitions de l'absence de faute ou de négligence et de l'absence de faute ou de négligence significative qui figurent à l'annexe 1 du code mondial antidopage, dans sa version en vigueur au 1er janvier 2021.

6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'un manquement aux dispositions du I de l'article L. 232-9 du code du sport a été constaté, le sportif mis en cause doit, pour pouvoir bénéficier de l'application de l'exonération ou de la réduction de la période de suspension prévues respectivement au I et au II de l'article L. 232-23-3-10 du code du sport, établir, d'une part, sauf dans le cas d'une personne dite protégée ou d'un sportif de niveau dit récréatif, de quelle manière la substance interdite a pénétré dans son organisme, d'autre part, qu'il ignorait, ne soupçonnait pas, ou n'aurait pas pu raisonnablement savoir ou soupçonner, même en faisant preuve de la plus grande vigilance, qu'il avait utilisé ou s'était fait administrer une substance interdite ou, le cas échéant, que sa faute ou sa négligence n'était pas significative par rapport au manquement commis.

7. Si, à l'appui de sa requête, M. A... fait valoir que la sanction prise à son encontre est entachée d'erreur de droit en ce qu'elle fait peser sur lui la charge de la preuve de l'origine de la présence des substances incriminées dans son organisme, il résulte de ce qui est dit au point 6 qu'il lui incombait d'établir, d'une part, de quelle manière la substance interdite a pénétré dans son organisme et, d'autre part, qu'il ignorait, ne soupçonnait pas, ou n'aurait pas pu raisonnablement savoir ou soupçonner, même en faisant preuve de la plus grande vigilance, qu'il s'était fait administrer une substance interdite. Par suite, il apparaît manifeste que ce moyen n'est pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée, pas plus qu'aucun des autres moyens qu'il invoque à l'appui de sa requête.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, que la requête de M. A... doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du même code.

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B... A....

Copie en sera adressée à l'Agence française de lutte contre le dopage.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 504976
Date de la décision : 19/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2025, n° 504976
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP BAUER-VIOLAS - FESCHOTTE-DESBOIS - SEBAGH

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:504976.20250619
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award