Vu les procédures suivantes :
1° Sous le numéro 494779, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 juin et 21 octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des professionnels du CBD et les sociétés par actions simplifiées CMCMRS Distribution, Mybud, CBD'Eau, Hope Pet Food, Uprising Distri, Calade CBD, Comptoir Bien-être Distribution, C2VI et Therap'CBD demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 mai 2024 par laquelle la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a classé comme stupéfiants plusieurs cannabinoïdes synthétiques et hémisynthétiques ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler cette décision en tant qu'elle classe comme stupéfiants le H2-CBD, le H4-CBD et des cannabinoïdes hémisynthétiques dérivés du noyau benzo[c]chromène ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le numéro 494973, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 juin et 21 octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des professionnels du CBD et les sociétés par actions simplifiées CMCMRS Distribution, Mybud, CBD'Eau, Hope Pet Food, Uprising Distri, Calade CBD, Comptoir Bien-être Distribution, C2VI et Therap'CBD demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 3 juin 2024 par laquelle la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a modifié la décision du 22 mai 2024 classant comme stupéfiants plusieurs cannabinoïdes synthétiques et hémisynthétiques ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler cette décision en tant qu'elle classe comme stupéfiants le H2-CBD, le H4-CBD et des cannabinoïdes hémisynthétiques dérivés du noyau benzo[c]chromène ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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3° Sous le numéro 495486, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 26 juin et 5 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société par actions simplifiée CBD'Eau demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 mai 2024 par laquelle la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a classé comme stupéfiants plusieurs cannabinoïdes synthétiques et hémisynthétiques, ainsi que la décision du 3 juin 2024 de la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé modifiant cette décision ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler ces décisions en tant qu'elles classent comme stupéfiants le H2-CBD, le H4-CBD et des cannabinoïdes hémisynthétiques dérivés du noyau benzo[c]chromène ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 ;
- l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 19 novembre 2020, Procédure pénale contre B S et C A (C-663/18) ;
- le code de la santé publique ;
- l'arrêté du 30 décembre 2021 portant application de l'article R. 5132-86 du code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Ariane Piana-Rogez, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gouz-Fitoussi, avocat de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ;
Considérant ce qui suit :
1. Au sein du Livre premier, relatif aux " Produits pharmaceutiques ", de la cinquième partie du code de la santé publique, les articles L. 5132-1 à L. 5132-10, constituant le chapitre II relatif aux " Substances et préparations vénéneuses " du Titre III, soumettent les substances vénéneuses à un régime de police administrative spéciale visant notamment à réglementer leur production, leur commerce et leur emploi. L'article L. 5132-1 du code de la santé publique définit les substances vénéneuses comme les substances stupéfiantes, les substances psychotropes et les substances inscrites sur la liste I et la liste II définies à l'article L. 5132-6, listes qui comprennent notamment tout produit ou substance présentant des risques directs ou indirects pour la santé. Ce même article précise qu'on entend par " substances " " les éléments chimiques et leurs composés comme ils se présentent à l'état naturel ou tels qu'ils sont produits par l'industrie, contenant éventuellement tout additif nécessaire à leur mise sur le marché ". L'article L. 5132-7 du même code prévoit que les plantes, substances ou préparations vénéneuses sont classées comme stupéfiants ou comme psychotropes ou sont inscrites sur les listes I et II par décision du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
2. Par une décision du 22 mai 2024, la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a, en application de l'article L. 5132-7 du code de la santé publique, inscrit sur la liste des substances classées comme stupéfiants figurant à l'annexe IV de l'arrêté du 22 février 1990 fixant la liste des substances classées comme stupéfiants, d'une part, les cannabinoïdes suivants : " H2-CBD ou dihydrocannabidiol ou H2-cannabidiol et H4-CBD ou tétrahydrocannabidiol ou H4-cannabidiol " ainsi que, à l'exclusion du cannabinol ou CBN, " toute substance dérivée du noyau benzo[c]chromène, qu'il soit non ou partiellement ou totalement hydrogéné sur le cycle A (défini comme étant le cycle insaturé porteur du méthyl en position 9 dudit noyau dans le tétrahydrocannabinol), substitué ou non à un des endroits suivants du noyau : / - en position 1 par une fonction hydroxyle, estérifiée ou non, ou une fonction alkoxy ; / - en position 2 ou 4 par une fonction carboxyle ; / - en position 3 par un substitut adamantyle ou par une chaîne alkyle, alkényle, alkynyle cyanoalkyle, haloalkyle, cyanoalkynyle, haloalkynyle, alkoxy, que cette chaîne soit elle-même substituée ou non par un ou plusieurs substituts alkyles, cycliques ou non, hétérocycliques ou non, que ces cycles ou hétérocycles soient eux même saturés ou non ; / - en position 6 par un ou deux groupes alkyle ; / - en position 9 par une fonction cétone, alkyle, hydroxyalkyle ou alkoxy " et, d'autre part, les cannabinoïdes synthétiques suivants : 5F-CUMYL-PEGACLONE ou 5F-SGT-151, CUMYL-CH-MEGACLONE ou SGT-270, 7APAICA, 5F-7APAICA, CUMYL-P7AICA, 5F-CUMYL-P7AICA et BZO-HEXOXIZID ou MDA-19 et BZO-POXIZID ou 5C-MDA-19.
3. Par une nouvelle décision du 3 juin 2024, la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a modifié la décision du 22 mai 2024 pour exclure de la liste des substances classées comme stupéfiants, parmi les substances dérivées du noyau benzo[c]chromène, le CBNA (acide cannabinolique), le THCVA (acide tétrahydrocannabivarique) et le THCV (tétrahydrocannabivarine) sous réserve que leur teneur ne soit respectivement pas supérieure à 0,3 % et le THCA (acide tétrahydrocannabinolique) sous réserve du respect de la teneur prévue à l'article 1er de l'arrêté du 30 décembre 2021 portant application de l'article R. 5132-86 du code de la santé publique.
4. L'Union des professionnels du CBD et d'autres requérants, d'une part, et la société CBD'Eau, d'autre part, doivent être regardés comme demandant, à titre principal, l'annulation de la décision du 22 mai 2024 modifiée par la décision du 3 juin 2024 et, à titre subsidiaire, l'annulation de cette décision en tant qu'elle classe comme stupéfiants le H2-CBD, le H4-CBD et des cannabinoïdes hémisynthétiques dérivés du noyau benzo[c]chromène.
Sur la légalité des décisions attaquées :
5. En premier lieu, l'article 34 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne interdit les restrictions quantitatives à l'importation entre les États membres ainsi que toutes mesures d'effet équivalent. Aux termes de l'article 36 du même traité, ces dispositions ne font cependant pas obstacle aux interdictions ou restrictions d'importation, d'exportation ou de transit " justifiées par des raisons (...) de sécurité publique, (...). Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée dans le commerce entre les États membres ". Enfin, aux termes du paragraphe 1 de l'article 5 de la directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 prévoyant une procédure d'information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information : " (...) les États membres communiquent immédiatement à la Commission tout projet de règle technique (...) ; ils adressent également à la Commission une notification concernant les raisons pour lesquelles l'établissement d'une telle règle technique est nécessaire, à moins que ces raisons ne ressortent déjà du projet (...) ".
6. La Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit, notamment dans son arrêt du 19 novembre 2020 Procédure pénale contre B S et C A (C-663/18), que les produits stupéfiants qui ne se trouvent pas dans un circuit strictement surveillé par les autorités compétentes en vue d'être utilisés à des fins médicales et scientifiques relèvent, par leur nature même, d'une interdiction d'importation et de mise en vente sur le territoire de tous les États membres, ce dont il résulte que les article 34 et 36 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ne leur sont pas applicables. Il résulte du même arrêt qu'il revient au juge national, pour déterminer si une substance bénéficie de la liberté de circulation des marchandises, quand il est saisi d'une contestation sur ce point, de vérifier si, en l'état actuel des connaissances scientifiques, une substance présente ou non un caractère stupéfiant.
7. Il ressort des pièces des dossiers, notamment d'une enquête conduite à partir de mai 2022 sur le territoire national, à la demande de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, par le centre d'addictovigilance de Caen Bretagne-Normandie, ayant donné lieu à un rapport du 15 novembre 2023, que la consommation de cannabinoïdes hémisynthétiques, c'est-à-dire de cannabinoïdes modifiés chimiquement à partir de substances présentes naturellement dans la plante de cannabis, prend de l'ampleur en France depuis l'année 2022, qu'il s'agisse de substances dérivées du noyau benzo[c]chromène, substituées en différentes positions du noyau, telles que le HHC (hexahydrocannabinol), le HHCO (hexahydrocannabinol acétate), le HHCP (hexahydrocannabiphorol), le HHCPO (hexahydrocannabiphorol acétate) ou le THCP (tétrahydrocannabiphorol), dont la littérature met en évidence l'activité cannabinomimétique chez l'animal, qu'il s'agisse de substances dérivées du THC (tétrahydrocannabinol), principe actif stupéfiant du cannabis, telles que le THCV, ou qu'il s'agisse de substances dérivées du CBD (cannabidiol), telles que le H4-CBD et le H2-CBD, qui présentent un profil psychoactif cannabinergique. Les données recueillies, bien qu'encore peu nombreuses, font état d'effets psychiatriques, neurologiques et cardiovasculaires potentiellement graves liés à la consommation de ces substances, dont les effets " sont le plus souvent de l'ordre de ceux obtenus par consommation de THC, à doses équivalentes, mais [dont] les risques de dépendance et de complications sont finalement plus élevés compte tenu des très nombreuses formes de produits transformés, 'marketés' dont les teneurs élevées compensent leur très relative faible puissance ". S'agissant en particulier des dérivés du noyau benzo[c]chromène, leur classement sous forme générique, conformément aux recommandations du rapport du 15 novembre 2023, est justifié par la circonstance que de tels effets ont été constatés sur chacun des cannabinoïdes hémisynthétiques dérivés de ce noyau jusqu'à présent disponibles sur le marché.
8. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les substances classées par la décision litigieuse, qui ne se trouvent pas dans un circuit strictement surveillé par les autorités compétentes en vue d'être utilisées à des fins médicales et scientifiques, présentent, du fait de leurs effets psychotropes et sur la santé humaine potentiels, en l'état actuel des connaissances scientifiques, un caractère stupéfiant. Par suite, les requérantes ne peuvent utilement invoquer le bénéfice, pour ces produits, de la liberté de circulation des marchandises au sein de l'Union européenne garantie par l'article 34 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
9. Dès lors que les produits en litige ne bénéficient pas de la liberté de circulation des marchandises garantie par l'article 34 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, les requérantes ne peuvent utilement invoquer, à l'encontre de la décision modificative du 3 juin 2024, la méconnaissance de l'exigence de notification à la Commission européenne prévue au paragraphe 1 de l'article 5 de la directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015.
10. En deuxième lieu, en vertu de l'article 38 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, les produits énumérés à son annexe I, dont fait partie le chanvre, sont soumis aux dispositions des articles 39 à 44, qui définissent les objectifs et les principes de la politique agricole commune, en prévoyant notamment l'établissement d'une organisation commune des marchés agricoles. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, il ne ressort pas des pièces des dossiers que le H2-CBD, le H4-CBD ou d'autres substances classées par la décision litigieuse seraient présentes naturellement dans la plante de chanvre à des concentrations détectables. Par suite, elles ne sont, en tout état de cause, pas fondées à soutenir que le classement litigieux aurait pour effet d'interdire de facto toute activité agricole et commerciale des variétés de chanvre faisant l'objet d'une organisation commune de marché, en méconnaissance de l'article 38 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
11. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 7 que les requérantes ne sauraient soutenir que la décision litigieuse serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Cette décision ne porte pas non plus atteinte au principe de sécurité juridique, le classement de certaines de ces substances par référence à leur structure moléculaire permettant, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, d'identifier précisément les substances concernées, lesquelles doivent s'entendre, ainsi qu'en dispose l'article L. 5132-1 du code de la santé publique cité au point 1, comme les éléments chimiques et leurs composés tels qu'ils se présentent à l'état naturel ou tels qu'ils sont produits par l'industrie.
12. En quatrième lieu, il ressort des pièces des dossiers, ainsi qu'il a été dit au point 3, que la décision du 3 juin 2024 a modifié la décision du 22 mai 2024 pour exclure de la liste des substances classées comme stupéfiants, parmi les substances dérivées du noyau benzo[c]chromène, d'une part, le THCA, sous réserve du respect de la teneur prévue à l'article 1er de l'arrêté du 30 décembre 2021, et, d'autre part, le THCVA et le THCV, sous réserve que leur teneur ne soit pas supérieure à 0,3 %, au motif que ces substances sont susceptibles d'être contenues à de très faibles concentrations dans les produits issus du chanvre industriel, textile ou agricole.
13. D'une part, le I de l'article 1er de l'arrêté du 30 décembre 2021 fixe à 0,3 % la teneur maximale en THC des variétés de Cannabis sativa L. dont la culture, l'importation, l'exportation et l'utilisation industrielle et commerciale sont autorisées en application de l'article R. 5232-86, devenu R. 5232-86-1, du code de la santé publique. Le III de cet article fixe également à 0,3 % la teneur maximale en THC des extraits de chanvre et des produits qui les intègrent.
14. Il ressort des pièces des dossiers que le THCA est un précurseur du THC, c'est-à-dire qu'il se transforme en THC sous l'effet de la chaleur, qui entraîne une décarboxylation. La méthode utilisée pour déterminer la teneur en THC des variétés de plante de cannabis autorisées par l'arrêté du 30 décembre 2021, prévue en annexe à cet arrêté, qui consiste à chauffer les échantillons à des températures élevées, mesure la teneur totale en THC dans la plante, que cette substance soit initialement présente sous forme de THC ou de THCA. En outre, il n'est pas contesté que les méthodes analytiques conformes aux lignes directrices en vigueur tiennent compte, pour déterminer la teneur potentielle totale en THC d'un produit issu du chanvre, du risque de décarboxylation du THCA en cas de chauffage du produit. Par suite, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé aurait incompétemment ajouté une condition à l'arrêté du 30 décembre 2021, tenant à la teneur en THCA des plantes. Elles ne sont pas non plus fondées à soutenir qu'elle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en renvoyant à la teneur prévue à cet arrêté, sans préciser s'il s'agit de la teneur prévue au I ou au III de cet arrêté, dès lors que, d'une part, il s'agit de la même teneur de 0,3 % de THC et que, d'autre part, la détermination de la teneur en THC est susceptible d'être réalisée sur la plante mais également sur les produits issus de la plante et contenant du THCA.
15. D'autre part, il ressort des pièces des dossiers, notamment du rapport bibliographique du 2 septembre 2024 sur le THCV et le THCVA élaboré par le professeur A..., que la fixation d'une teneur maximale de 0,3 % de THCV est conforme aux données de la littérature scientifique, qui font état de la présence de THCV, dans des concentrations inférieures à 0,1 %, dans la plante de Cannabis sativa L. ou dans les chanvres à fibre. Par suite, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en subordonnant l'exclusion du THCV et du THCVA, qui en est le précurseur, au respect d'une teneur maximale de 0,3 %.
16. En cinquième lieu, les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la décision litigieuse, qui se borne à classer des cannabinoïdes synthétiques et hémisynthétiques comme stupéfiants sur le fondement de l'article L. 5132-7 du code de la santé publique, porterait, par elle-même, une atteinte disproportionnée au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre des sociétés commercialisant du chanvre et du CBD.
17. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, que les requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision qu'elles attaquent.
Sur les frais d'instance :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante. En application de l'article L. 5322-2 du code de la santé publique, les décisions prises par la directrice générale de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient du code de la santé publique le sont au nom de l'Etat. Par suite, il ne peut être fait droit aux conclusions présentées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé tendant à ce que lui soit versée une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Les requêtes de l'Union des professionnels du CBD et autres, d'une part, et de la société CBD'Eau, d'autre part, sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Union des professionnels du CBD, première dénommée, pour l'ensemble des requérants dans les instances nos 494779 et 494973, à la société par actions simplifiée CBD'Eau et à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Copie en sera adressée à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 mai 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Édouard Geffray, Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, M. Raphaël Chambon, Mme Isabelle Tison, conseillers d'Etat ; Mme Ariane Piana-Rogez, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 6 juin 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Ariane Piana-Rogez
Le secrétaire :
Signé : M. Hervé Herber