Vu les procédures suivantes :
M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution des décisions implicites des 28 mars et 16 juillet 2024 par lesquelles le ministre de l'intérieur a refusé de lui communiquer la décision " 48 SI " prononçant la perte de validité de son permis de conduire et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui communiquer cette décision.
Par une ordonnance n° 2424647 du 14 octobre 2024, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a suspendu l'exécution de ces décisions et enjoint au ministre de l'intérieur de communiquer la lettre " 48 SI " concernant M. B... ou, à défaut, tout document lui permettant de se représenter aux épreuves du permis de conduire.
1° Sous le n° 498654, par un pourvoi enregistré le 29 octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance;
2°) statuant en référé, de rejeter la demande.
2° Sous le n°498655, par une requête enregistrée le 29 octobre 2024, le ministre de l'intérieur demande au Conseil d'Etat qu'il prononce, sur le fondement de l'article R. 821-5 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution de l'ordonnance qu'il attaque.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bruno Delsol, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Frédéric Puigserver, rapporteur public ;
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par une décision référencée " 48 SI " dont l'intéressé a accusé réception le 21 août 2021, le ministre de l'intérieur a porté à la connaissance de M. B... un retrait de points de son permis de conduire et constaté la perte de validité de celui-ci pour solde de points nul. Par un courrier du 21 février 2024, M. B..., au motif qu'il l'avait égaré, a demandé au ministre de l'intérieur de lui communiquer de nouveau ce document. La Commission d'accès aux documents administratifs a, le 4 juillet 2024, émis un avis favorable à cette demande de communication, sous réserve que le document existe et soit susceptible d'être obtenu par un traitement automatisé. Par une ordonnance du 14 octobre 2024, contre laquelle le ministre de l'intérieur se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Paris, saisi sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a suspendu l'exécution des décisions implicites par lesquelles le ministre de l'intérieur a refusé de communiquer la décision référencée " 48 SI " concernant M. B... et lui a enjoint de communiquer ce document ou tout autre document lui permettant de se représenter aux épreuves du permis du conduire.
2. Le pourvoi en cassation du ministre de l'intérieur et sa requête à fin de sursis à exécution sont dirigés contre la même ordonnance. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision.
3. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".
4. Aux termes de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l'article L. 300-2 sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre ".
5. En jugeant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration était de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée, au motif que l'autorité administrative se bornait à faire valoir en défense de simples " considérations d'organisation interne ", alors qu'elle justifiait, par des raisons juridiques et techniques précises tenant au traitement automatisé d'informations à caractère nominatif dénommé " Système national des permis de conduire " et aux opérations réalisées par l'Imprimerie nationale, de l'impossibilité de communiquer la décision dite " 48 SI ", qu'elle notifie par lettre recommandée avec accusé de réception conformément aux dispositions du cinquième alinéa de l'article R. 223-3 du code de la route mais dont elle ne conserve pas de copie, le tribunal a commis une erreur de droit.
6. Il s'ensuit, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque.
7. Ses conclusions à fins de sursis à exécution de cette ordonnance sont, par suite, devenues sans objet.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
9. L'unique moyen soulevé à l'appui de la demande de suspension, tiré de la méconnaissance de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration, n'est pas, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du refus de communiquer la décision " 48 SI " prononçant la perte de validité du permis de conduire, dont, au demeurant, les mentions figurent de manière exacte sur le relevé d'information intégral édité par le ministre de l'intérieur, auquel le conducteur a accès et dont il peut se prévaloir pour s'inscrire à l'examen du permis de conduire.
10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, que les conclusions de la demande de M. B... tendant à la suspension des décisions implicites de rejet de sa demande de communication de la décision " 48 SI " le concernant, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction dont elles sont assorties, doivent être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 14 octobre 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 498655 du ministre de l'intérieur tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance du 14 octobre 2024 du juge des référés du tribunal administratif de Paris.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. A... B....
Délibéré à l'issue de la séance du 3 avril 2025 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et M. Bruno Delsol, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 20 mai 2025.
Le président :
Signé : M. Bertrand Dacosta
Le rapporteur :
Signé : M. Bruno Delsol
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Léandre Monnerville