Vu la procédure suivante :
M. D... A... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rennes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'autre part, de suspendre l'exécution de l'arrêté du préfet du Finistère du 12 novembre 2024 portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour durant cinq ans et, enfin, d'enjoindre au préfet du Finistère de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2501521 du 12 mars 2025, la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a, en premier lieu, admis M. A... C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, en deuxième lieu, suspendu l'exécution de l'arrêté du 12 novembre 2024 et, en dernier lieu, enjoint au préfet de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'ordonnance et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 28 mars et le 7 avril 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'annuler l'ordonnance de la juge des référés du tribunal administratif de Rennes du 12 mars 2025 ;
2°) de rejeter la demande de M. A... C....
Il soutient que :
- la signataire de la requête a reçu régulièrement délégation de signature pour ce faire ;
- c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a considéré que la requête de M. A... C... était recevable alors que, pour justifier d'une circonstance de fait nouvelle, l'intéressé n'apportait aucun élément probant tendant à établir la réalité de sa relation et de sa communauté de vie avec Mme B... ainsi que de sa paternité de l'enfant à naître de celle-ci ;
- il n'est pas porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit de M. A... C... de mener une vie privée et familiale normale dès lors, d'une part, qu'il ne démontre ni la réalité et l'ancienneté de sa relation et de sa communauté de vie avec Mme B..., ni sa paternité pour l'enfant à naître et, d'autre part, qu'il ne justifie d'aucune intégration particulière sur le territoire français et n'est pas dénué d'attaches familiales dans son pays d'origine ;
- à titre subsidiaire, la condition d'urgence n'est pas satisfaite dès lors d'une part, qu'aucun élément ne permet d'établir que la mesure d'éloignement du 12 novembre 2024 sera mise à exécution à brève échéance, d'autre part, qu'une telle mesure ne saurait résulter de la seule circonstance que le requérant soit placé en centre de rétention administrative et, enfin, que le requérant a introduit une première demande de réexamen de sa demande d'asile le 12 mars 2025, laquelle ouvre un droit au maintien sur le territoire français jusqu'à ce qu'il y soit statué ;
- il n'est pas porté une atteinte grave et manifestement illégale à l'intérêt supérieur de l'enfant à naître de Mme B... dès lors que M. A... C... n'apporte aucune preuve de la paternité de cet enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2025, M. A... C... conclut à son admission à l'aide juridictionnelle provisoire et au rejet de la requête. Il soutient que la requête est irrecevable, le signataire de la requête d'appel étant incompétent, que les moyens soulevés ne sont pas fondés et que la condition d'urgence est satisfaite.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et, d'autre part, M. A... C... ;
Ont été entendus lors de l'audience publique du 8 avril 2025, à 11 heures :
- les représentantes du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur ;
- Me Rousseau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. A... C... ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
Vu la note en délibéré produite par M. A... C..., enregistrée le 8 avril 2025 après la clôture de l'instruction ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".
Sur la fin de non-recevoir soulevée par M. A... C... :
2. Contrairement à ce qui est soutenu, la requête du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur a été signée par une personne ayant reçu régulièrement délégation pour ce faire.
Sur l'appel du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur :
3. M. D... A... C..., ressortissant comorien, a fait l'objet d'un arrêté du préfet du Finistère en date du 12 novembre 2024 portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour durant cinq ans. M. A... C... a demandé l'annulation de cet arrêté au tribunal administratif de Rennes, qui a rejeté sa demande par un jugement du 4 décembre 2024. Par un arrêt du 25 avril 2025, la cour administrative d'appel de Rennes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de ce jugement et à l'annulation de l'arrêté du 12 novembre 2024. Parallèlement, M. A... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rennes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de cet arrêté et d'enjoindre au préfet du Finistère de procéder au réexamen de sa situation. Le ministre de l'intérieur fait appel de l'ordonnance du 12 mars 2025 par laquelle la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a fait droit à la demande de M. A... C....
4. Il résulte de l'instruction que M. A... C... a fait l'objet, le 18 février 2020, d'un arrêté du préfet de la Haute-Garonne portant refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, puis, le 27 juillet 2023, d'un nouvel arrêté préfectoral portant obligation de quitter le territoire français. Interpellé et placé en garde à vue le 12 novembre 2024 pour s'être soustrait à son obligation de quitter le territoire national, il a fait l'objet, le même jour, de l'arrêté contesté. Si l'intéressé se prévaut d'une relation sentimentale avec une ressortissante française, Mme B..., avec laquelle il indique vivre depuis le mois de septembre 2024, et soutient qu'elle est tombée enceinte, postérieurement à l'édiction de l'arrêté litigieux, de leur enfant à naître, les éléments produits à l'appui de ses déclarations, fondés sur des attestations, ne sont pas suffisants pour caractériser l'ancienneté et la réalité d'une vie commune avérée entre Mme B... et lui, non plus que sa paternité de l'enfant à naître. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a considéré que la mise à exécution de la mesure contestée portait une atteinte grave et manifestement illégale au droit de M. A... C... de mener une vie privée et familiale normale.
5. Il appartient toutefois au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. A... C... devant la juge des référés du tribunal administratif de Rennes.
6. Si M. A... C... soutient que la mesure dont il fait l'objet porte une atteinte grave et manifestement illégale à l'intérêt supérieur de l'enfant à naître de Mme B..., garanti notamment par l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, il n'établit pas être le père de cet enfant. Par suite, la mesure contestée ne porte pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la juge des référés du tribunal administratif de Rennes a fait droit à la demande présentée par M. A... C... sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. A... C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées, sans qu'il y ait lieu de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire.
O R D O N N E :
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Article 1er : L'ordonnance n° 2501521 du 12 mars 2025 de la juge des référés du tribunal administratif de Rennes est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. A... C... devant la juge des référés du tribunal administratif de Rennes ainsi que ses conclusions présentées devant le juge des référés du Conseil d'Etat sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à M. D... A... C....
Fait à Paris, le 28 avril 2025
Signé ; Edouard Geffray