Vu la procédure suivante :
La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a, le 12 décembre 2024, saisi le Conseil d'Etat en application de l'article L. 52-15 du code électoral sur le fondement de sa décision du 21 novembre 2024 rejetant le compte de campagne de M. A... B..., candidat tête de liste " Parti des citoyens européens " à l'élection des représentants français au Parlement européen, qui s'est tenue les 8 et 9 juin 2024.
Cette saisine a été transmise à M. B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, qui n'ont pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code électoral ;
- la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Denieul, auditeur,
- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 10 avril 2025, présentée par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 52-4 du code électoral, rendu applicable comme les autres dispositions du titre Ier du livre Ier de ce code, à l'élection des représentants au Parlement européen par l'article 2 de la loi du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen : " Tout candidat à une élection déclare un mandataire conformément aux articles L. 52-5 et L. 52-6 au plus tard à la date à laquelle sa candidature est enregistrée. Ce mandataire peut être une association de financement électoral, ou une personne physique dénommée " le mandataire financier ". Un même mandataire ne peut être commun à plusieurs candidats. / Le mandataire recueille, pendant les six mois précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'à la date du dépôt du compte de campagne du candidat, les fonds destinés au financement de la campagne. / Il règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures au tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique (...) ". Selon l'article L. 52-6 du même code : " (...) Le mandataire financier est tenu d'ouvrir un compte de dépôt unique retraçant la totalité de ses opérations financières (...) ".
2. En raison de la finalité poursuivie par les dispositions des articles L. 52-4 et L. 52-6 du code électoral, l'obligation de financer toute dépense effectuée en vue de la campagne exclusivement à partir du compte unique ouvert à cette seule fin par le mandataire financier désigné par le candidat constitue une formalité substantielle à laquelle il ne peut pas, en principe, être dérogé. Le règlement direct de menues dépenses par le candidat ou par toute autre personne participant à sa campagne, y compris son mandataire financier sur ses fonds propres, ne peut être admis qu'à la double condition que leur montant soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du code électoral.
3. Aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : " I. - Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne lorsqu'il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s'il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8 et selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts. / Pour la période mentionnée à l'article L. 52-4 du présent code, le compte de campagne retrace, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection par le candidat ou le candidat tête de liste ou pour son compte, à l'exclusion des dépenses de la campagne officielle. (...) / II. - Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes, notamment d'une copie des contrats de prêts conclus en application de l'article L. 52-7-1 du présent code, ainsi que des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte (...) "
4. Aux termes de l'article L. 52-15 du code électoral : " La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne. Elle arrête le montant du remboursement forfaitaire prévu à l'article L. 52-11-1. / Hors le cas prévu à l'article L. 118-2, elle se prononce dans un délai de six mois à compter de l'expiration du délai fixé au II de l'article L. 52-12. Passé ce délai, les comptes sont réputés approuvés. / Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection (...) ".
5. Enfin, selon l'article L. 118-3 du même code : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : (...) / 3° Le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit. / L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. Toutefois, elle n'a pas d'effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision (...) ". En application de ces dispositions, en dehors des cas de fraude, le juge de l'élection ne prononce l'inéligibilité d'un candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit que s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Il lui incombe à cet effet d'apprécier s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et s'il présente un caractère délibéré.
6. Il ressort des termes de la décision du 21 novembre 2024 de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques que cette dernière a rejeté le compte de campagne de M. B..., candidat tête de liste " Parti des citoyens européens ", en relevant, d'une part, que son mandataire financier avait apporté, en recette, une somme de 12 451 euros et payé plusieurs dépenses pour un montant total de 9 751 euros, sans que ces opérations financières aient été effectuées depuis le compte bancaire unique de la campagne électorale et, d'autre part, que M. B... n'apportait pas la preuve du règlement effectif, à la date de dépôt du compte de campagne, de deux factures d'un montant de 6 155 euros et de 2 726 euros. Toutefois, il résulte de l'instruction que toutes ces opérations financières se rapportent à des dépenses de la campagne officielle qui, ainsi que le relève la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, n'avaient pas à figurer au compte de campagne et qui, dès lors, ne sont pas de nature à entacher ce compte d'irrégularité. Par suite, il n'y a pas lieu de déclarer M. B... inéligible en application de l'article L. 118-3 du code électoral.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de déclarer M. B... inéligible en application de l'article L. 118-3 du code électoral.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et à M. A... B....
Copie en sera adressée au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.