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17/03/2025 | FRANCE | N°502189

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 17 mars 2025, 502189


Vu la procédure suivante :



Par une requête, enregistrée le 7 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution de la décision du 7 novembre 2024 par laquelle la formation restreinte du conseil national de l'ordre des médecins l'a suspendu pour une durée de six mois du droit d'exercer la médecine, à l'exception d'une activité de consultation da

ns sa spécialité, et a subordonné la reprise de l'ensemble de son activité à ce qu'il ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 7 mars 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision du 7 novembre 2024 par laquelle la formation restreinte du conseil national de l'ordre des médecins l'a suspendu pour une durée de six mois du droit d'exercer la médecine, à l'exception d'une activité de consultation dans sa spécialité, et a subordonné la reprise de l'ensemble de son activité à ce qu'il justifie s'être conformé aux obligations de formation et d'évaluation définies dans la décision ;

2°) de mettre à la charge du conseil national de l'ordre des médecins la somme de 4 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient :

- qu'il y a urgence, dès lors que la décision attaquée a pour effet de le priver de source de revenus en faisant obstacle à l'exercice de sa profession, qu'elle porte atteinte à son honneur et à sa dignité professionnelle et que la reprise de son activité professionnelle ne présente aucun risque pour la santé de ses patients ;

- que le conseil national de l'ordre des médecins a fait une inexacte application de l'article R. 4124-3-5 du code de la santé publique en prononçant à son encontre une suspension du droit d'exercer la médecine pour une durée de six mois, à l'exception d'une activité de consultation dans sa spécialité, alors qu'il ressortait des conclusions de l'expertise ordonnée par cette autorité qu'il ne présentait aucune insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice des activités chirurgicales de sa spécialité.

Par une décision du 28 novembre 2024 du bureau d'aide juridictionnelle établi près le Conseil d'Etat, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". Il résulte de ces dispositions que la condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Aux termes du cinquième alinéa du I de l'article L. 4124-11 du code de la santé publique, le conseil régional de l'ordre des médecins " peut décider la suspension temporaire du droit d'exercer en cas d'infirmité du professionnel ou d'état pathologique rendant dangereux l'exercice de sa profession, ainsi que la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d'exercer en cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de sa profession ". Aux termes du II du même article : " Les décisions des conseils régionaux (...) en matière (...) de suspension temporaire totale ou partielle du droit d'exercer en cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession peuvent faire l'objet d'un recours hiérarchique devant le Conseil national. Le Conseil national peut déléguer ses pouvoirs à une formation restreinte qui se prononce en son nom ". Aux termes de l'article R. 4124-3-5 du même code : " I.- En cas d'insuffisance professionnelle rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional (...) pour une période déterminée, qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée. / Le conseil régional (...) est saisi à cet effet soit par le directeur général de l'agence régionale de santé, soit par une délibération du conseil départemental ou du conseil national. (...) / II.- La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional (...) dans les conditions suivantes : / 1° Pour les médecins, le rapport est établi par trois médecins qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. (...) / (...) / V.- Avant de se prononcer, le conseil régional (...) peut, par une décision non susceptible de recours, décider de faire procéder à une expertise complémentaire dans les conditions prévues aux II, III et IV du présent article. / VI.- Si le conseil régional (...) n'a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l'affaire est portée devant le Conseil national de l'ordre. / VII.- La décision de suspension temporaire du droit d'exercer pour insuffisance professionnelle définit les obligations de formation du praticien. / La notification de la décision mentionne que la reprise de l'exercice professionnel par le praticien ne pourra avoir lieu sans qu'il ait au préalable justifié auprès du conseil régional (...) avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision. (...) ". Aux termes de l'article R. 4124-3-6 de ce code : " Le praticien qui a fait l'objet d'une mesure de suspension totale ou partielle du droit d'exercer ne peut reprendre son activité sans avoir justifié auprès du conseil régional (...) avoir rempli les obligations de formation fixées par la décision. Dans ce cas, ce conseil décide que le praticien est apte à exercer sa profession et en informe les autorités qui ont reçu notification de la suspension. / S'il apparaît que les obligations posées par la décision du conseil régional (...), ou, dans le cas du VI de l'article R. 4124-3-5, du conseil national, n'ont pas été satisfaites, la suspension de l'intéressé est prolongée par le conseil régional (...) jusqu'à ce que ce conseil se soit prononcé dans les conditions prévues par l'article R. 4124-3-5 ". En application des articles R. 4124-3-3 et R. 4124-3-7 de ce code, la décision du Conseil national de l'ordre relative à la suspension temporaire d'un praticien pour insuffisance professionnelle est susceptible d'un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d'Etat dans le délai de deux mois.

3. Il ressort des pièces du dossier que, saisi par le conseil départemental de l'Isère de l'ordre des médecins d'une demande de mise en œuvre, à l'encontre de M. B..., médecin spécialiste en chirurgie orthopédique et traumatologie, des dispositions relatives à la suspension temporaire d'un praticien pour insuffisance professionnelle, citées au point 2, le conseil régional d'Auvergne Rhône-Alpes de l'ordre des médecins, n'ayant pas statué dans le délai de deux mois imparti par ces dispositions, a renvoyé l'affaire au conseil national de l'ordre. Le 7 novembre 2024, le conseil national de l'ordre des médecins, siégeant en formation restreinte, au vu de l'expertise décidée par la formation restreinte le 16 mai 2024 et réalisée le 10 septembre 2024, a décidé de suspendre M. B... du droit d'exercer la médecine pour une durée de six mois, à l'exception d'une activité de consultation dans sa spécialité, et subordonné la reprise de son entier exercice à ce qu'il justifie s'être conformé aux obligations de formation définies par la même décision. M. B... a saisi le Conseil d'Etat d'un recours tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de cette décision. M. B... demande en outre au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, citées au point 1, de suspendre l'exécution de la même décision.

4. Pour justifier de l'urgence à suspendre l'exécution de la décision attaquée, M. B... soutient que cette décision retarde la reprise de ses activités professionnelles, alors qu'une décision de la juge d'instruction, prise à la suite de sa mise en examen, le 10 juin 2020, pour des faits d'atteinte involontaire à la vie et d'atteinte involontaire à l'intégrité de la personne, l'autoriserait à les reprendre depuis le 27 juin 2023. Il résulte toutefois de ceux des motifs qu'il ne conteste pas de la décision qu'il attaque qu'il ne peut toujours pas, du fait de l'existence d'une mesure de contrôle judiciaire prise à son encontre, réaliser d'interventions chirurgicales. Il s'ensuit que la décision de la formation restreinte du conseil national de l'ordre des médecins, qui ne fait pas obstacle à ses activités de consultation dans sa spécialité mais seulement à ce qu'il réalise des interventions chirurgicales, est dépourvue d'incidence immédiate sur sa situation.

5. Il résulte de ce qui précède que, la condition d'urgence n'étant pas remplie, la requête de M. B... doit être rejetée, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B....

Copie en sera adressée au conseil national de l'ordre des médecins.

Fait à Paris, le 17 mars 2025

Signé : Nicolas Polge


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 502189
Date de la décision : 17/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 mar. 2025, n° 502189
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, FELIERS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:502189.20250317
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