La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2024 | FRANCE | N°475481

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 20 décembre 2024, 475481


Vu la procédure suivante :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 lui concédant une pension de retraite en tant qu'il a liquidé sa pension sur la base de l'indice majoré 710 et d'enjoindre à l'administration de procéder à la révision de sa pension sur la base de l'indice majoré 792.



Par un jugement n° 2106601 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a partiellement fait droit à sa demande en annulant l'arrêté contesté en tant qu'il liquide sa pensi

on de retraite sur la base de l'indice majoré 710 et en enjoignant au ministre de l'écon...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 2 novembre 2021 lui concédant une pension de retraite en tant qu'il a liquidé sa pension sur la base de l'indice majoré 710 et d'enjoindre à l'administration de procéder à la révision de sa pension sur la base de l'indice majoré 792.

Par un jugement n° 2106601 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Bordeaux a partiellement fait droit à sa demande en annulant l'arrêté contesté en tant qu'il liquide sa pension de retraite sur la base de l'indice majoré 710 et en enjoignant au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de réviser sa pension dans un délai de deux mois.

Par un pourvoi, enregistré le 28 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.

Il soutient que le tribunal administratif de Bordeaux a commis une erreur de droit en jugeant que M. B... pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite pour demander la révision de son titre de pension, alors qu'il n'avait pas été promu mais avait fait l'objet d'un reclassement consécutif à une réforme statutaire.

Le pourvoi a été communiqué à M. B..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2020-1644 du 21 décembre 2020 ;

- le décret n° 2020-1646 du 21 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Denieul, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., capitaine de port du 1er grade de la classe fonctionnelle spéciale, 2ème échelon, indice brut 966, indice majoré 783, a été reclassé en application du décret du 21 décembre 2020 modifiant le statut particulier du corps des officiers de port, dans le grade de capitaine de port de 1ère classe au 6ème échelon à compter du 1er janvier 2017, à l'indice brut 850, indice majoré 695, en bénéficiant, en application de l'article 15 de ce décret, du maintien, à titre personnel, de son indice brut antérieur, majoré de 12 points, ce qui correspond à un indice majoré 792. Par un arrêté de radiation des cadres du 10 mai 2021, il a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er août 2021. Une première pension liquidée sur la base de l'indice majoré 710 lui a été concédée, avant qu'elle ne soit révisée, une première fois, pour tenir compte de l'indice majoré 792 et, une seconde fois, par un arrêté du 2 novembre 2021, qui lui a de nouveau concédé un titre de pension liquidé sur la base de l'indice majoré 710. M. B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler ce titre de pension en tant qu'il liquide sa pension sur la base de l'indice majoré 710 et d'enjoindre à l'administration de procéder à la révision de sa pension sur la base de l'indice majoré 792. Par un jugement du 9 mai 2023, contre lequel le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Bordeaux annulé le titre de pension en litige en tant qu'il liquide la pension de retraite de M. B... sur la base de l'indice majoré 710 et enjoint au ministre de réviser sa pension dans un délai de deux mois.

Sur le pourvoi en cassation :

2. Aux termes de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " I. - Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé en multipliant le pourcentage de liquidation tel qu'il résulte de l'application de l'article L. 13 par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moins par le fonctionnaire ou militaire au moment de la cessation des services valables pour la retraite ou, à défaut, par le traitement ou la solde soumis à retenue afférents à l'emploi, grade, classe et échelon antérieurement occupés d'une manière effective (...) II. - Aux fins de liquidation de la pension, le montant de celle-ci est calculé à partir des derniers traitements ou soldes soumis à retenues, afférents soit à un grade détenu pendant quatre ans au moins au cours des quinze dernières années d'activité lorsqu'ils sont supérieurs à ceux visés au premier alinéa du I, soit à l'un des emplois ci-après détenus au cours des quinze dernières années d'activité pendant au moins deux ans, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat : / 1° Emplois supérieurs mentionnés au 1° de l'article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée ;/ 2° Emplois de chef de service, de directeur adjoint ou de sous-directeur d'administration centrale ;/ 3° Emplois supérieurs occupés par des officiers généraux et supérieurs (...) ". Selon l'article L. 20 du même code : " En aucun cas, la pension allouée au titre de la durée des services ne peut être inférieure à celle qu'aurait obtenue le titulaire s'il n'avait pas été promu à un emploi ou à un grade supérieur ou reclassé en vertu des dispositions de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ". L'article 63 de la loi du 11 janvier 1984 fixe les règles relatives au reclassement des fonctionnaires pour inaptitude physique à l'exercice de leurs fonctions.

3. Aux termes de l'article 15 du décret du 21 décembre 2020 modifiant le statut particulier du corps des officiers de port : " II. - Les fonctionnaires qui, au 1er janvier 2017, étaient promus aux classes fonctionnelles des premier et deuxième grades de capitaine de port prévues par le décret du 26 février 2001 susvisé sont rétablis dans la classe normale de leur grade, au rang qui aurait été le leur s'ils n'avaient pas cessé d'appartenir à cette classe, puis sont reclassés conformément au tableau de correspondance ci-dessus. Les fonctionnaires reclassés, en application de l'alinéa précédent, à un échelon doté d'un indice brut inférieur à celui qu'ils détenaient dans leur situation d'origine conservent à titre personnel le bénéfice de leur indice brut antérieur, majoré de douze points, jusqu'au jour où ils bénéficient dans leur nouvelle situation d'un indice brut au moins égal (...) ".

4. Le tribunal administratif de Bordeaux a jugé que dès lors qu'en l'absence du reclassement rétroactif dont il avait fait l'objet en application du décret du 21 décembre 2020 modifiant le statut particulier du corps des officiers de port, M. B... aurait obtenu une pension calculée sur la base de l'indice correspondant au 1er grade de la classe fonctionnelle spéciale, 2ème échelon, qu'il détenait effectivement depuis plus de six mois à la date de son admission à la retraite, celui-ci avait droit, en application des dispositions de l'article L. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à ce que cet indice plus avantageux soit retenu pour la liquidation de sa pension. Le ministre de l'économie est fondé à soutenir qu'en statuant ainsi, alors qu'un agent reclassé dans le cadre d'une réforme statutaire ne peut être regardé comme ayant bénéficié d'une promotion ou d'un reclassement pour inaptitude physique à l'exercice de ses fonctions, le tribunal administratif a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

Sur le règlement de l'affaire au fond :

7. En premier lieu, la pension de retraite de M. B... ne pouvait être liquidée, en application des dispositions du I l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite citées au point 2, que sur la base de l'indice correspondant à l'emploi, grade, classe et échelon qu'il détenait effectivement depuis six mois au moins avant son admission à la retraite. M. B... ne tenait de l'article 15 du décret du 21 décembre 2020 modifiant le statut particulier du corps des officiers de port cité au point 3 aucun droit à ce que sa pension soit liquidée sur la base de l'indice majoré 792 qui lui avait été accordé, à titre personnel, en application de ces dispositions. Ainsi qu'il a été dit au point 4, il ne peut davantage se prévaloir des dispositions de l'article L. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite citées au point 2 pour demander que sa pension soit liquidée sur la base de l'indice majoré 783 qu'il détenait avant son reclassement.

8. En deuxième lieu, M. B... ne peut utilement soutenir, pour demander l'annulation de son titre de pension, qu'il aurait pu être nommé au grade de capitaine de port hors classe s'il n'avait pas été admis à faire valoir ses droits à retraite.

9. En troisième lieu, M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 2° du II de l'article L. 15 du code des pensions civiles et militaires de retraite, qui ne sont applicables qu'aux personnes ayant occupé, en administration centrale, les emplois de chef de service, de directeur adjoint ou de sous-directeur.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. B... doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 9 mai 2023 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.

Article 2 : La demande de M. B... est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. C... B... et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 475481
Date de la décision : 20/12/2024

Publications
Proposition de citation : CE, 20 déc. 2024, n° 475481
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alexandre Denieul
Rapporteur public ?: M. Nicolas Labrune

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:475481.20241220
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award