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18/12/2024 | FRANCE | N°491855

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 18 décembre 2024, 491855


Vu la procédure suivante :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 11 avril 2022 par laquelle la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) a refusé de réviser sa pension ainsi que la décision du 24 mars 2022 portant attribution de sa pension et d'enjoindre à la CNRACL de tirer les conséquences des décisions des 12 et 13 décembre 2021 du Centre Hospitalier Sud Essonne Dourdan Etampes en lui versant une pension calculée sur le 10ème échelon du corps des infirmiers de clas

se supérieure de la fonction publique hospitalière ou, à titre subsidiair...

Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision du 11 avril 2022 par laquelle la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) a refusé de réviser sa pension ainsi que la décision du 24 mars 2022 portant attribution de sa pension et d'enjoindre à la CNRACL de tirer les conséquences des décisions des 12 et 13 décembre 2021 du Centre Hospitalier Sud Essonne Dourdan Etampes en lui versant une pension calculée sur le 10ème échelon du corps des infirmiers de classe supérieure de la fonction publique hospitalière ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation. Par un jugement n° 2204565 du 4 décembre 2023, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 24VE00251 du 15 février 2024 enregistrée le 16 février 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la cour administrative d'appel de Versailles a, sur le fondement de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, transmis au Conseil d'Etat le pourvoi enregistré le 30 janvier 2024 au greffe de cette cour.

Par ce pourvoi et un nouveau mémoire, enregistré le 2 juin 2024, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- le décret n° 2021-1407 du 29 octobre 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Camille Goyet, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, Rameix, avocat Mme B... et à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la Caisse des dépôts et consignations ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B..., infirmière de classe supérieure employée au sein du centre hospitalier Sud Essonne Dourdan Etampes, a été radiée des cadres et admise à faire valoir ses droits à une pension de retraite à compter du 1er avril 2022. Le directeur de l'établissement gestionnaire de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) lui a notifié par un courrier du 24 mars 2022 un brevet de pension concédée à compter de la même date et calculée sur la base du 8ème échelon du grade d'infirmier de classe supérieure, indice brut 707, qu'elle détenait depuis plus de six mois à la date de sa radiation des cadres. Le 31 mars 2022, Mme B... a saisi la CNRACL d'une demande de révision de sa pension tendant à la prise en compte du 10ème échelon du grade d'infirmier de classe supérieure, indice brut 751 dans lequel elle a été reclassée à compter du 1er octobre 2021, par deux décisions de son employeur des 12 et 13 décembre 2021. Sa demande a été rejetée par une décision du 11 avril 2022. Mme B... se pourvoit en cassation contre le jugement du 4 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du directeur de l'établissement gestionnaire de la CNARCL du 11 avril 2022 portant refus de révision de sa pension et du 24 mars 2022 portant attribution de sa pension, en ce qu'elles ne tirent pas les conséquences des décisions des 12 et 13 décembre 2021 du centre hospitalier Sud Essonne Dourdan Etampes.

2. Aux termes de l'article L. 221-2 du code des relations entre le public et l'administration : " L'entrée en vigueur d'un acte réglementaire est subordonnée à l'accomplissement de formalités adéquates de publicité, notamment par la voie, selon les cas, d'une publication ou d'un affichage, sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires ou instituant d'autres formalités préalables. Un acte réglementaire entre en vigueur le lendemain du jour de l'accomplissement des formalités prévues au premier alinéa, sauf à ce qu'il en soit disposé autrement par la loi, par l'acte réglementaire lui-même ou par un autre règlement. ". Aux termes de l'article L. 221-3 du même code : " Lorsque les actes mentionnés à l'article L. 221-2 sont publiés au Journal officiel de la République française, ils entrent en vigueur, dans les conditions prévues à l'article 1er du code civil, à la date qu'ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. ".

3. Il résulte de ces dispositions que les modifications, notamment la création d'un 9ème et d'un 10ème échelon dans le corps des infirmiers de classe supérieure, introduites par le décret du 29 octobre 2021, qui ne comporte pas de disposition transitoire, sont entrées en vigueur le 31 octobre 2021, au lendemain de la publication de ce décret au journal officiel. Ainsi, Mme B... ne pouvait légalement être nommée à ce grade et à cet échelon à compter du 1er octobre 2021 par les deux décisions des 12 et 13 décembre 2021. Toutefois, si cette nomination est intervenue en méconnaissance des dispositions statutaires applicables, elle ne saurait être regardée comme une décision inexistante. Dès lors, en jugeant que les décisions des 12 et 13 décembre 2021 étaient nulles et de nul effet, le tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que Mme B... est fondée à demander l'annulation du jugement du 4 décembre 2023 du tribunal administratif de Versailles.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. Pour le calcul d'une pension, il incombe à l'autorité chargée de sa liquidation de prendre en compte les décisions individuelles même illégales relatives à la carrière de l'intéressé, dès lors que ces décisions ne sont pas inexistantes ou qu'elles n'ont pas été rapportées par leur auteur ou annulées par le juge de l'excès de pouvoir.

7. Il résulte de ce qui est dit au point 3 que la CNRACL ne pouvait se fonder sur la circonstance que les deux décisions du 12 et 13 décembre 2021 portant nomination de Mme B..., à compter du 1er octobre 2021, seraient entachées d'une illégalité telle qu'elles seraient dépourvues d'existence légale pour rejeter sa demande. Mme B... est, dès lors, fondée à demander l'annulation des décisions par lesquelles le directeur de l'établissement gestionnaire de la CNRACL lui a attribué sa pension le 24 mars 2022 et a rejeté sa demande de révision le 11 avril 2022.

8. L'exécution de la présente décision implique que la demande de Mme B... soit réexaminée en prenant en compte les décisions des 12 et 13 décembre 2021 portant reclassement de l'intéressée au 10ème échelon de son grade au 1er octobre 2021. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au directeur de l'établissement gestionnaire de la CNRACL de procéder à ce réexamen dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 4 000 euros, pour l'ensemble de la procédure, à verser à Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 4 décembre 2023 du tribunal administratif de Versailles est annulé.

Article 2 : Les décisions du directeur de l'établissement gestionnaire de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales du 24 mars 2022 portant attribution de la pension de Mme B... et du 11 avril 2022 rejetant sa demande de révision de son titre de pension sont annulées.

Article 3 : Il est enjoint au directeur de l'établissement gestionnaire de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales de procéder au réexamen de la demande de Mme B... en prenant en compte les décisions des 12 et 13 décembre 2021 portant reclassement de l'intéressée au 10ème échelon de son grade au 1er octobre 2021, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : La Caisse des dépôts et consignations versera à Mme B... la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à la Caisse des dépôts et des consignations.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 491855
Date de la décision : 18/12/2024
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 18 déc. 2024, n° 491855
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Camille Goyet
Rapporteur public ?: M. Marc Pichon de Vendeuil
Avocat(s) : SCP L. POULET-ODENT ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 20/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:491855.20241218
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