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05/06/2024 | FRANCE | N°494581

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 05 juin 2024, 494581


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 mai et 3 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution du décret du 5 avril 2024 du Président de la République portant radiation des cadres par une mesure disciplinaire d'un officier d'active ;



2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4

000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.







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Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 mai et 3 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution du décret du 5 avril 2024 du Président de la République portant radiation des cadres par une mesure disciplinaire d'un officier d'active ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, d'une part, sa radiation des cadres le prive, avec sa famille, de tout revenu et l'oblige à restituer son logement de fonction et, d'autre part, sa radiation porte atteinte à sa réputation et à celle de sa famille, alors même qu'aucun impératif d'intérêt général ne justifie le maintien de cette décision ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- la décision contestée est entachée d'irrégularités eu égard, d'une part, à l'absence de notification de son droit de se taire avant d'être entendu par le conseil d'enquête et, d'autre part, à l'absence de motivation de l'avis du conseil d'enquête sur le fondement duquel la mesure de radiation a été prononcée ;

- elle est disproportionnée dès lors qu'aucune faute disciplinaire résultant d'une agression sexuelle ne lui a été reprochée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la défense ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. La condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.

3. Pour justifier de l'urgence qui s'attache à suspendre l'exécution du décret du 5 avril 2024 du Président de la République décidant sa radiation des cadres par mesure disciplinaire en raison de faits constitutifs de harcèlement sexuel, M. B... fait valoir que l'exécution de cette décision, d'une part, le prive de son revenu ainsi que du logement de fonction qu'il occupe, avec son épouse et ses trois enfants, à titre gratuit, alors que les seuls revenus de son épouse ne lui permettront pas de trouver sur le marché locatif un logement adapté aux besoins de sa famille, à proximité des établissements où ses enfants sont scolarisés, d'autre part, porte atteinte à sa réputation. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B... fait l'objet depuis le 14 avril 2023, dans le cadre de la mise en examen qui lui a été notifiée pour les mêmes faits, d'un placement sous contrôle judiciaire assorti d'une interdiction d'exercer ses fonctions au sein de la gendarmerie, interdiction qui est la cause de la suspension du versement de son traitement et qui fait obstacle à ce qu'il prétende continuer d'occuper le logement qui lui a été concédé à titre gratuit par nécessité absolue de service, une telle attribution étant réservée, aux termes de l'article D. 2124-75 du code général de la propriété des personnes publiques, aux " personnels de tous grades de la gendarmerie nationale en activité de service ". Dans ces conditions, les effets de l'exécution de la décision litigieuse, qui n'est pas davantage la seule cause de l'atteinte à sa réputation qu'il invoque, ne sauraient être regardés comme de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

4. Il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du code de justice administrative ne peut être regardée comme remplie en l'espèce. Par suite et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence de moyens propres à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée, la requête de M. B... doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du même code.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B... et au ministre des armées.

Fait à Paris, le 5 juin 2024

Signé : Gilles Pellissier


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 494581
Date de la décision : 05/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 jui. 2024, n° 494581
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:494581.20240605
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