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09/04/2024 | FRANCE | N°492851

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 09 avril 2024, 492851


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération française des motards en colère demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2023-974 du 23 octobre 2023, modifiant des dispositions du code de la route et du décret n° 2021-1062 du 9 août 2021, relatives à la mise en place du contrôle technique des véhicules motori

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Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 22 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération française des motards en colère demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2023-974 du 23 octobre 2023, modifiant des dispositions du code de la route et du décret n° 2021-1062 du 9 août 2021, relatives à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur, et dérogeant temporairement aux articles R. 323-14 et R. 323-18 du code de la route ;

2°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 23 octobre 2023 relatif au contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt à agir ;

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que l'entrée en vigueur le 15 avril 2024 de l'article 43 de l'arrêté du 23 octobre 2023 relatif au contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur présente un caractère difficilement réversible en ce que des contrôles techniques seront opérés avant l'intervention de l'annulation potentielle des dispositions au fond ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées ;

- le décret n° 2023-974 du 23 octobre 2023 et l'arrêté du 23 octobre 2023 sont entachés d'irrégularité dès lors qu'ils ne sont pas contresignés, d'une part, par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, alors qu'ils poursuivent un objectif de sécurité routière, et, d'autre part, par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle ou, à tout le moins, par le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat et du tourisme ;

- ils sont entachés d'irrégularité dès lors que la consultation organisée en application de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement s'est déroulée sans que la " note de présentation précisant notamment le contexte et les objectifs " du projet poursuivi par le gouvernement n'ait été mise à disposition du public ;

- ils sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à leurs effets, qui sont contraires à l'objectif poursuivi d'amélioration de la sécurité routière et de baisse des nuisances sonores et des émissions de particules, en ce que, en premier lieu, ils sont dépourvus d'utilité, en deuxième lieu, des mesures alternatives peuvent être adoptées, en troisième lieu, ils risquent d'accroître les dangers liés à la pratique de la moto et, en dernier lieu, ils créent une charge financière supplémentaire pour les ménages.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son préambule ;

- la directive 2014/45/UE du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 ;

- le code de l'environnement ;

- le code de la route ;

- le code des transports ;

- le décret n° 2022-1080 du 29 juillet 2022 ;

- le décret n° 2023-664 du 26 juillet 2023 ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. La condition d'urgence à laquelle est subordonné le prononcé d'une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision administrative contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.

3. Pour justifier de l'urgence qui s'attache, selon elle, à la suspension de l'exécution, d'une part, du décret n° 2023-974 du 23 octobre 2023 modifiant des dispositions du code de la route et du décret n° 2021-1062 du 9 août 2021, relatives à la mise en place du contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur et, d'autre part, de l'arrêté du 23 octobre 2023 pris pour son application, la Fédération française des motards en colère soutient que la date d'entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions relatives au contrôle technique des véhicules motorisés à deux ou trois roues et quadricycles à moteur, fixée au 15 avril 2024, conduira les propriétaires de tels véhicules, se croyant à tort tenus par cette obligation, à engager des dépenses qu'ils ne pourront récupérer une fois l'annulation de ces textes intervenue. Par cette affirmation générale, dépourvue de toute précision, la Fédération française des motards en colère n'établit pas que sa requête caractériserait une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de sa requête au fond, une mesure de suspension soit prononcée, ni que l'exécution du décret et de l'arrêté en litige serait, par elle-même, de nature à préjudicier gravement et immédiatement aux intérêts qu'elle défend. Par suite, elle ne peut être regardée comme justifiant, en l'espèce, de l'existence d'une situation d'urgence au sens des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.

4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le respect de l'autre condition prévue par l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la requête de la Fédération française des motards en colère doit être rejetée, y compris ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la Fédération française des motards en colère est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la Fédération française des motards en colère.

Copie en sera adressée au Premier ministre et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Fait à Paris, le 9 avril 2024

Signé : Benoit Bohnert


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 492851
Date de la décision : 09/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 09 avr. 2024, n° 492851
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:492851.20240409
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