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05/04/2024 | FRANCE | N°474921

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 05 avril 2024, 474921


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 juin et 30 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Centre Lorrain d'Education par le Sport (CLES) demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 avril 2023 par laquelle la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques a rejeté sa demande de retrait de l'article 6 de l'arrêté du 21 novembre 2022 en tant qu'il modifie l'article 7, a), de l'arrêté du 21 ju

in 2016 portant création de la mention " activités physiques pour tous " du brevet pr...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 juin et 30 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Centre Lorrain d'Education par le Sport (CLES) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 avril 2023 par laquelle la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques a rejeté sa demande de retrait de l'article 6 de l'arrêté du 21 novembre 2022 en tant qu'il modifie l'article 7, a), de l'arrêté du 21 juin 2016 portant création de la mention " activités physiques pour tous " du brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport (BPJEPS), spécialité éducateur sportif, ainsi que les dispositions de cet article 6 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le code du sport ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benoît Delaunay, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, et le mémoire soulevant une question prioritaire de constitutionnalité, enregistrés le 15 mars 2024, après la clôture de l'instruction, présentés par l'association Centre Lorrain d'Education par le Sport ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du I de l'article L. 212-1 du code du sport : " Seuls peuvent, contre rémunération, enseigner, animer ou encadrer une activité physique ou sportive ou entraîner ses pratiquants, à titre d'occupation principale ou secondaire, de façon habituelle, saisonnière ou occasionnelle, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa du présent article et de l'article L. 212-2 du présent code, les titulaires d'un diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification professionnelle (...) ". L'article R. 212-2 du même code dispose que : " La liste des diplômes, titres à finalité professionnelle ou certificats de qualification remplissant les conditions prévues à l'article L. 212-1 est arrêtée par le ministre chargé des sports. / La liste mentionne, pour chacune des options, mentions ou spécialités de chaque diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification, ses conditions d'exercice ". Aux termes de l'article D. 212 20 de ce code : " Le brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport est un diplôme d'Etat enregistré dans le répertoire national des certifications professionnelles et classé au niveau 4 de la nomenclature des niveaux de qualification établie en application de l'article L. 6113-1 du code du travail. Il atteste l'acquisition d'une qualification dans l'exercice d'une activité professionnelle en responsabilité à finalité éducative ou sociale, dans les domaines d'activités physiques, sportives, socio-éducatives ou culturelles ". Aux termes de l'article D. 212 21 du même code : " Le brevet professionnel est délivré au titre de la spécialité "animateur" ou de la spécialité "éducateur sportif" et d'une mention disciplinaire, pluridisciplinaire ou liée à un champ particulier (...). / Chaque mention est créée (...) : / - soit par un arrêté du ministre chargé des sports ; (...). / Ces arrêtés définissent le référentiel professionnel et le référentiel de certification dont la composition est fixée à l'article D. 212-23. Ils peuvent fixer des mesures d'équivalence ou de dispense ".

2. Par un arrêté du 21 juin 2016, le ministre chargé des sports a créé la mention " activités physiques pour tous " du brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport, spécialité " éducateur sportif ". Par un arrêté du 21 novembre 2022, la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques a modifié cet arrêté. Son article 6 a notamment remplacé les dispositions de l'article 7 par les dispositions suivantes : " (...) La coordination pédagogique des formations est assurée par une personne qui doit être titulaire : / - d'une certification professionnelle de niveau 5 et justifier d'au moins trois années d'expérience professionnelle et de 2 400 heures dans le champ de la formation professionnelle aux métiers du sport et de l'animation / - ou d'une certification professionnelle de niveau 4 et justifier d'au moins cinq années d'expérience professionnelle et de 4 000 heures dans le champ de la formation professionnelle des activités physiques et sportives pour tous. / Sont dispensés de ces exigences, les personnels techniques et pédagogiques relevant du ministère chargé des sports et les professeurs ou enseignants d'éducation physique et sportive du ministère de l'éducation nationale ". L'association Centre Lorrain d'Education par le Sport demande l'annulation pour excès de pouvoir de ces dispositions et du refus opposé à sa demande tendant à leur abrogation.

3. En premier lieu, d'une part, il résulte des dispositions citées au point 1, combinées avec celles du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement, que la directrice des sports avait, du fait de sa nomination, compétence pour signer, au nom du ministre chargé des sports, l'arrêté et la décision litigieux.

4. En deuxième lieu, les dispositions litigieuses imposent aux personnes assurant la coordination pédagogique des formations de la mention " activités physiques pour tous " du brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport, spécialité " éducateur sportif ", des exigences spécifiques de certification et d'expérience professionnelle et prévoient, pour répondre à ces exigences, que les personnes concernées justifient d'une certification professionnelle de niveau 5, de trois années d'expérience professionnelle et 2 400 heures dans le champ de la formation professionnelle aux métiers du sport et de l'animation ou, pour une personne justifiant seulement d'une certification professionnelle de niveau 4, de cinq années d'expérience professionnelle et de 4 000 heures dans le champ de la formation professionnelle des activités physiques et sportives pour tous. Si les personnels techniques et pédagogiques relevant du ministère chargé des sports et les professeurs ou enseignants d'éducation physique et sportive du ministère de l'éducation nationale sont dispensés des exigences de certification et d'expérience professionnelle, ils sont placés dans une situation différente de celle des personnels pour lesquels est requis le suivi d'une formation initiale ou d'adaptation à l'emploi dans le champ des métiers du sport et de l'animation dans des conditions de nature à attester du niveau d'expertise technique et pédagogique attendu d'un coordinateur pédagogique, en rapport avec les objectifs poursuivis par le règlement litigieux et qui justifie une différence de traitement. Par suite, le moyen tiré d'une méconnaissance du principe d'égalité doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 211-1 du code du sport : " Les établissements publics de formation relevant de l'État et les établissements publics locaux de formation dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire assurent la formation initiale des personnes qui gèrent, animent, encadrent et enseignent les activités physiques et sportives et contribuent à leur formation continue ". Aux termes de l'article L. 114-1 du code du sport : " Les centres de ressources, d'expertise et de performance sportive sont des établissements publics locaux de formation dans les domaines du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire. (...) " En vertu de l'article L. 114-2 du même code, ils exercent, au nom de l'Etat, les missions suivantes : " (...) 3° Mettre en œuvre des formations initiales et continues dans les domaines des activités physiques ou sportives, en application de l'article L. 211-1, et dans les domaines de la jeunesse et de l'éducation populaire, conformément aux objectifs nationaux et en lien avec le schéma régional des formations de la région concernée ; / (...) ". Ils peuvent en outre, en vertu de l'article L. 114-3 du même code, exercer, au nom de la région, les missions suivantes : " (...) / 4° Mettre en œuvre des offres de formation aux métiers du sport et de l'animation, conformément aux besoins identifiés par le schéma régional des formations. "

6. Il résulte des dispositions citées au point 5 que l'intervention de personnes publiques, en particulier des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive, sur le marché de la formation dans le domaine du sport procède de la loi. Par ailleurs, si, pour les formations de la mention " activités physiques pour tous " du brevet professionnel de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport, spécialité " éducateur sportif ", les dispositions contestées du a) de l'article 7 de l'arrêté du 21 juin 2016, telles que modifiées par l'arrêté du 21 novembre 2022, imposent, ainsi qu'il a été dit, des exigences spécifiques de certification et d'expérience professionnelle aux personnes en assurant la coordination pédagogique, de telles obligations ont pour objet de garantir l'expertise technique et pédagogique de ces personnes au regard des compétences attendues pour remplir leurs missions d'organisation de l'architecture des formations, de participation au recrutement des formateurs, de contribution à la gestion des intervenants et de garantie de la qualité des formations, dans un secteur couvrant plusieurs familles d'activités. Il ne ressort pas des éléments avancés par l'association requérante qu'elles seraient excessives, alors d'ailleurs que, comme l'indique la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, sans être contredite, elles s'imposent aux personnes concernées depuis un arrêté du 4 avril 2018 sans avoir empêché l'obtention par de nombreux organismes privés de l'habilitation prévue à l'article R. 212-10-8 du code du sport. Enfin, pour les motifs indiqués au point 4, la dispense accordée aux personnels techniques et pédagogiques relevant du ministère chargé des sports et les professeurs ou enseignants d'éducation physique et sportive du ministère de l'éducation nationale repose sur une différence de situation en rapport avec l'objectif d'intérêt général poursuivi par la règlementation litigieuse. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'atteinte disproportionnée à la liberté du commerce et de l'industrie et aux règles de la concurrence doivent être écartés.

7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, que la requête de l'association Centre Lorrain d'Education par le Sport doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de l'association Centre Lorrain d'Education par le Sport est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Centre Lorrain d'Education par le Sport et à la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques.

Délibéré à l'issue de la séance du 14 mars 2024 où siégeaient : M. Nicolas Boulouis, président de chambre, présidant ; Mme Anne Courrèges, conseillère d'Etat et M. Benoît Delaunay, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 5 avril 2024.

Le président :

Signé : M. Nicolas Boulouis

Le rapporteur :

Signé : M. Benoît Delaunay

La secrétaire :

Signé : Mme Sandrine Mendy


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 474921
Date de la décision : 05/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 avr. 2024, n° 474921
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Benoît Delaunay
Rapporteur public ?: M. Clément Malverti

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474921.20240405
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