La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/03/2024 | FRANCE | N°471266

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 22 mars 2024, 471266


M. A... B... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 30 juin 2022 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à la protection subsidiaire dont il bénéficiait. Par une décision n° 22038767 du 12 décembre 2022, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à sa demande et lui a reconnu la qualité de réfugié.



Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février 2023 et 10 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Con

seil d'Etat, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides demande au ...

M. A... B... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 30 juin 2022 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à la protection subsidiaire dont il bénéficiait. Par une décision n° 22038767 du 12 décembre 2022, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à sa demande et lui a reconnu la qualité de réfugié.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 février 2023 et 10 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Delsol, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à la SAS Hannotin Avocats, avocat de M. A... B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A... B..., ressortissant afghan, s'est vu refuser la qualité de réfugié et accorder le bénéfice de la protection subsidiaire sur le fondement de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 20 décembre 2017. Par une décision du 30 juin 2022, le directeur général de l'OFPRA a mis fin à la protection subsidiaire dont bénéficiait M. B... en se fondant sur les dispositions combinées des articles L. 512-2 et L. 512-3 du même code, au motif qu'il existait des raisons sérieuses de penser que l'intéressé, accusé de viol sur mineur et placé en détention provisoire, avait commis un crime grave et que sa présence sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public et la sécurité publique. L'OFPRA se pourvoit en cassation contre la décision du 12 décembre 2022 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile, après avoir jugé que M. B... ne pouvait plus se prévaloir de la protection subsidiaire, lui a reconnu la qualité de réfugié.

2. Aux termes de l'article 1er, A, 2 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et du protocole signé à New York le 31 janvier 1967, doit être considérée comme réfugiée tout personne qui " craignant avec raison d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ".

3. En premier lieu, pour juger que M. B... remplissait ces conditions et lui reconnaître la qualité de réfugié, la Cour nationale du droit d'asile s'est contentée de relever qu'il ressortait des déclarations " précises et crédibles " de l'intéressé qu'il risquait d'être persécuté par ses oncles, membres des talibans, en raison de son refus de rejoindre ce mouvement. En se bornant à ces énonciations, alors que figuraient au dossier, et notamment dans la décision initiale de l'OFPRA, des éléments nombreux et circonstanciés remettant en cause la crédibilité des affirmations du demandeur, la Cour a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation.

4. En second lieu, en estimant que la circonstance que les faits pour lesquels M. B... était poursuivi pouvaient être perçus par les talibans comme une conséquence de son " occidentalisation ", l'exposant ainsi à un risque de persécutions pour des motifs politiques et religieux en cas de retour dans son pays, la Cour nationale du droit d'asile a entaché son appréciation de dénaturation.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que l'OFPRA est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'OFPRA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B....

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 21 novembre 2022 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 15 février 2024 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Rozen Noguellou, conseillère d'Etat et M. Bruno Delsol, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 22 mars 2024.

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

Le rapporteur :

Signé : M. Bruno Delsol

La secrétaire :

Signé : Mme Chloé-Claudia Sediang


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 471266
Date de la décision : 22/03/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 mar. 2024, n° 471266
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Delsol
Rapporteur public ?: Mme Esther de Moustier
Avocat(s) : SAS HANNOTIN AVOCATS ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:471266.20240322
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award