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13/12/2023 | FRANCE | N°468456

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 13 décembre 2023, 468456


Vu la procédure suivante :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône à lui verser une indemnité de 606 euros au titre de son préjudice financier et de 5 000 euros au titre de son préjudice moral en réparation des fautes commises dans le traitement de son dossier d'aide personnalisée au logement entre les mois de janvier et mars 2018. Par un jugement n° 1908017 du 14 mars 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a rejeté sa demande.





Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire en...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône à lui verser une indemnité de 606 euros au titre de son préjudice financier et de 5 000 euros au titre de son préjudice moral en réparation des fautes commises dans le traitement de son dossier d'aide personnalisée au logement entre les mois de janvier et mars 2018. Par un jugement n° 1908017 du 14 mars 2022, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les 26 octobre 2022 et 26 janvier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros à verser à son avocat, la SARL Le Prado-Gilbert, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que par courrier reçu le 1er mars 2019, Mme A... a contesté le bien-fondé des réductions et retenues opérées sur les allocations d'aide personnalisée au logement qu'elle a perçues au titre des mois de janvier à octobre 2018 et demandé l'indemnisation des préjudices subis. Sans réponse à cette demande, elle a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la caisse d'allocations familiales (CAF) des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 606 euros en réparation du préjudice économique résultant de l'illégalité des réductions opérées sur son aide personnalisée au logement (APL) au cours des mois de janvier 2018 à mars 2018 et la somme de 5 000 euros au titre du préjudice moral, assorties des intérêts au taux légal. Mme A... se pourvoit en cassation contre le jugement du 14 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article R. 351-5 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I- Les ressources prises en considération pour le calcul de l'aide personnalisée sont celles perçues par le bénéficiaire, son conjoint et les personnes vivant habituellement au foyer. Sont retenues les ressources perçues pendant l'année civile de référence. L'année civile de référence est l'avant-dernière année précédant la période de paiement prévue à l'article R. 351-4 (...) ". Aux termes du I de l'article R. 351-7 de ce code : " Il est procédé à une évaluation forfaitaire des ressources de la personne et de son conjoint ou concubin lorsque les conditions ci-après sont réunies : 1° D'une part, (...) soit, à l'occasion du renouvellement du droit autre que le premier, lorsqu'au cours de l'année civile de référence ni le bénéficiaire, ni son conjoint, ni son concubin n'a disposé de ressources appréciées selon les dispositions de l'article R. 351-5 ; 2° D'autre part, le bénéficiaire, son conjoint ou son concubin perçoit une rémunération. (...). La condition relative à l'existence d'une activité professionnelle rémunérée (...) est appréciée au cours du mois civil précédant l'ouverture du droit ou du mois de novembre précédant le renouvellement du droit ". Enfin l'article R. 351-14 du même code dispose : " Lorsque le bénéficiaire ou son conjoint est en chômage total depuis au moins deux mois consécutifs à la date d'effet de la demande ou pendant au moins deux mois consécutifs au cours de la période de paiement et : / (...) / - s'il perçoit l'allocation de solidarité spécifique prévue par les articles L. 5423-1 à L. 5423-3 du code du travail, / il n'est pas tenu compte des revenus d'activité professionnelle ni des indemnités de chômage perçus par l'intéressé durant l'année civile de référence. / Les droits sont examinés sur cette nouvelle base à compter du premier jour du mois civil suivant celui au cours duquel sont intervenus le changement de situation, la cessation du versement ou la diminution du montant de l'allocation d'assurance, ou l'admission à l'allocation de solidarité spécifique. / Lorsque l'intéressé reprend une activité professionnelle rémunérée, il est tenu compte de ses ressources à partir du premier jour du mois civil au cours duquel intervient la reprise d'activité. / Il appartient au bénéficiaire de justifier que les conditions prévues par le présent article sont remplies ".

3. Il résulte des dispositions précitées des articles R. 351-5 et R. 351-7 du code de la construction et de l'habitation que lorsqu'un ménage n'a pas perçu de ressources prises en considération pour le calcul de l'aide personnalisée au logement au cours de l'année civile de référence mais qu'il apparaît, au mois de novembre de l'année suivante, qu'un de ses membres exerce désormais une activité professionnelle rémunérée, la caisse procède à une évaluation forfaitaire des ressources pour déterminer si les conditions d'un renouvellement pour une année civile sont remplies et fixer, le cas échéant, le montant de l'aide qui sera versée à compter du 1er janvier suivant. Une activité professionnelle rémunérée au sens de ces dispositions est une activité qui permet à la personne qui l'exerce de disposer de revenus professionnels réguliers. Ne peuvent être regardés comme des revenus professionnels réguliers des revenus faibles et épisodiques.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme A... a obtenu le bénéfice, d'une part, de l'aide personnalisée au logement au titre d'un logement situé à Plan-de-Cuques et, d'autre part, de l'allocation de solidarité spécifique, ce qui lui a permis de bénéficier, pour le calcul de l'aide personnalisée au logement, d'une mesure de neutralisation de certains des revenus de l'année de référence, en application des dispositions de l'article R. 351-14 du code de la construction et de l'habitation citées au point 2. La CAF des Bouches-du-Rhône a procédé, au titre des trois premiers mois de l'année 2018, à une réduction du montant de l'aide versée au motif non contesté en défense que Mme A... avait, durant cette période, occupé un emploi salarié de garde d'enfant à domicile. Il ressort cependant des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A... a exercé l'emploi de garde d'enfant à domicile seulement quelques mois et pour un salaire mensuel moyen de 200 euros par mois, de sorte que cette activité professionnelle rémunérée ne lui permettait pas de disposer de revenus professionnels réguliers. Par suite, en jugeant que Mme A... exerçait une activité à temps partiel et que ses revenus professionnels ne pouvaient plus être neutralisés à partir du premier jour du mois civil au cours duquel était intervenue la reprise d'activité, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, à demander l'annulation du jugement du 14 mars 2022 du tribunal administratif de Marseille.

6. Mme A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la requérante, peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SARL Le Prado-Gilbert renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat, contre lequel les conclusions du pourvoi doivent être regardées comme dirigées et qui est la partie perdante, la somme de 3 000 euros à verser à cette société.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 14 mars 2022 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Marseille.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la requérante, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au directeur de la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône.

Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré à l'issue de la séance du 16 novembre 2023 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 13 décembre 2023.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Olivier Rousselle

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 468456
Date de la décision : 13/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 13 déc. 2023, n° 468456
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:468456.20231213
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