La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/10/2023 | FRANCE | N°489003

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 30 octobre 2023, 489003


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 6 octobre 2023 par lequel la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche l'a suspendu de ses fonctions pour une durée d'un an.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est remplie, dès lors que la suspension prononcée, d'une part

, le prive du bénéfice de ses primes dans des conditions ne lui permettant plus...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 23 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de l'arrêté du 6 octobre 2023 par lequel la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche l'a suspendu de ses fonctions pour une durée d'un an.

Il soutient que :

- la condition d'urgence est remplie, dès lors que la suspension prononcée, d'une part, le prive du bénéfice de ses primes dans des conditions ne lui permettant plus de faire face à l'ensemble de ses charges, d'autre part, préjudicie à l'intérêt public tenant à la continuité du service public universitaire et à la mise en œuvre du programme de la majorité réunie autour de lui et, enfin, porte une atteinte grave et immédiate à sa réputation professionnelle ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;

- l'arrêté attaqué n'est pas motivé, en méconnaissance des dispositions du 1° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la suspension prononcée a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 951-4 du code de l'éducation en ce que les faits qui lui sont reprochés ne présentent pas un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité et en ce que la poursuite de ses activités au sein de l'établissement ne présente pas des inconvénients suffisamment sérieux pour le service et pour le déroulement des procédures en cours.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications apportées par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

3. M. B..., professeur des universités, affecté à l'université de La Réunion qu'il préside, a été suspendu à titre conservatoire, pour une durée d'un an, de ses fonctions par un arrêté de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en date du 6 octobre 2023. Il demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de cet arrêté.

4. A la suite d'un courrier d'alerte signé, en mars 2023, par sept personnes, occupant ou ayant occupé des fonctions, y compris d'encadrement, au sein de l'université de La Réunion, la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a saisi l'inspection générale de l'éducation, du sport et de la recherche pour conduire une enquête administrative. Au vu du rapport rendu en juillet, qui concluait à l'existence de faits susceptibles de relever d'un harcèlement moral et à la responsabilité directe du président de l'université dans cette situation, la ministre a décidé de suspendre ce dernier de ses fonctions à titre conservatoire et a fait connaître son intention d'engager une procédure disciplinaire, parallèlement à la transmission réalisée par l'inspection générale auprès de la procureure de la République de Saint-Denis de La Réunion sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale.

5. L'arrêté litigieux maintient l'intégralité du traitement de l'intéressé. Cet arrêté n'a ni caractère disciplinaire, ni pour finalité de préjudicier à la carrière du requérant mais a comme seule portée de l'écarter temporairement du service aux fins de préserver le bon fonctionnement de l'université. Pour justifier de la condition d'urgence, M. B... se prévaut de la situation financière difficile dans laquelle la mesure de suspension le place. Toutefois, il ne résulte pas des éléments avancés qu'il ne serait pas en mesure de couvrir ses charges incompressibles durant la période de suspension. Au surplus, l'administration serait tenue d'abroger la décision en cause si des éléments nouveaux faisaient apparaître que les conditions à l'origine de la mesure n'étaient plus satisfaites. Par ailleurs, si l'intéressé fait valoir l'intérêt du service public universitaire, il résulte des documents qu'il a produits que la continuité de la gouvernance de l'université est assurée au travers de la suppléance par le premier vice-président du conseil d'administration. Enfin, les incidences de la mesure de suspension sur la réputation professionnelle de l'intéressé sont déjà avérées et ne sont pas de nature, à elles seules, à caractériser une atteinte suffisamment grave et immédiate à sa situation.

6. Par suite et alors que, d'ailleurs, la 4ème chambre de la section du contentieux sera en mesure d'inscrire la requête au fond de M. B... au rôle d'une formation de jugement de manière à ce qu'elle fasse l'objet d'une décision avant la fin du mois d'avril 2024, la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées, il y a lieu de rejeter la requête de l'intéressé, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B....

Copie en sera adressée à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Fait à Paris, le 30 octobre 2023

Signé : Anne Courrèges


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 489003
Date de la décision : 30/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 oct. 2023, n° 489003
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:489003.20231030
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award