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11/07/2023 | FRANCE | N°468050

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 11 juillet 2023, 468050


Vu la procédure suivante :

Par un mémoire et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 mai et 26 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la société Coyote System demande au Conseil d'Etat, à l'appui de sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2022-1119 du 3 août 2022 relatif aux services numériques d'assistance aux déplacements et de l'arrêté du 3 août 2022 du ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de

la cohésion des territoires, chargés des transports, relatif aux services numér...

Vu la procédure suivante :

Par un mémoire et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 mai et 26 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la société Coyote System demande au Conseil d'Etat, à l'appui de sa requête tendant à l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2022-1119 du 3 août 2022 relatif aux services numériques d'assistance aux déplacements et de l'arrêté du 3 août 2022 du ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargés des transports, relatif aux services numériques d'assistance aux déplacements, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 1115-8-1 du code des transports.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Doutriaux, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. Aux termes de l'article L. 1115-8-1 du code des transports : " Selon des modalités définies par décret, les services numériques d'assistance au déplacement sont tenus d'informer de façon complète les utilisateurs des impacts environnementaux de leurs déplacements. En particulier, ces services : / 1° Indiquent, le cas échéant, la présence et les caractéristiques des mesures de restriction de circulation en vigueur dans les zones à faibles émissions mobilité prévues à l'article L. 2213-4-1 du code général des collectivités territoriales ; / 2° Ne favorisent exclusivement ni l'utilisation du véhicule individuel, ni l'usage massif de voies secondaires non prévues pour un transit intensif ; / 3° Proposent aux utilisateurs un classement des itinéraires suggérés en fonction de leur impact environnemental, notamment en termes d'émissions de gaz à effet de serre ; / 4° Informent les utilisateurs des mesures de restriction de circulation visant les poids lourds prises par les autorités de police de la circulation en application de l'article L. 2213-1 du même code ou de l'article L. 411-8 du code de la route et concernant les itinéraires proposés, dans le cas des services numériques d'assistance au déplacement spécifiques aux véhicules lourds. / Les services numériques mentionnés au premier alinéa du présent article sont ceux qui visent à faciliter les déplacements monomodaux ou multimodaux au moyen de services de transport, de véhicules, de cycles, d'engins personnels de déplacement ou à pied ".

3. A l'appui de son recours pour excès de pouvoir, la société Coyote System demande que soit renvoyée au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions précitées de l'article L. 1115-8-1 du code des transports. Elle soutient que, ne définissant pas le champ d'application territorial des obligations qu'elles mettent à la charge des opérateurs de services numériques d'assistance aux déplacements, ces dispositions sont entachées d'une incompétence négative qui affecte la liberté d'entreprendre.

4. La méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit.

5. Les dispositions de l'article L. 1115-8-1 du code des transports, qui ont pour objet d'encadrer le déploiement des services numériques d'assistance aux déplacements sur le territoire français, s'appliquent à tous les exploitants de systèmes utilisés sur ce territoire, que leur lieu d'établissement se situe en France ou à l'étranger. Si elles renvoient à un décret la définition des modalités de délivrance de ces informations, ces dispositions ne délèguent pas au pouvoir réglementaire la définition de leur champ d'application. Par suite, le grief d'incompétence négative soulevé par la société Coyote System à l'encontre de ces dispositions qui, au demeurant, n'affectent pas par elles-mêmes la liberté d'entreprendre des opérateurs proposant de tels services ne peut qu'être écarté.

6. Il résulte de ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Il n'y a donc pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Coyote System.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Coyote System, à la Première ministre, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la ministre de la transition énergétique.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel.

Délibéré à l'issue de la séance du 29 juin 2023 où siégeaient : M. Nicolas Boulouis, président de chambre, présidant ; M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat et M. Yves Doutriaux, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 11 juillet 2023.

Le président :

Signé : M. Nicolas Boulouis

Le rapporteur :

Signé : M. Yves Doutriaux

La secrétaire :

Signé : Mme Catherine Xavier


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 468050
Date de la décision : 11/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2023, n° 468050
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Yves Doutriaux
Rapporteur public ?: M. Philippe Ranquet

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:468050.20230711
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