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30/05/2023 | FRANCE | N°473995

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 30 mai 2023, 473995


Vu la procédure suivante :

Mme X... B..., a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en deuxième lieu et à titre principal, d'enjoindre au président du conseil départemental du Loiret de la prendre en charge avec ses enfants au sein d'une structure d'accueil adaptée en application des dispositions de l'article L. 221-2 du code de l'action sociale et des familles, dans un délai de qua

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Vu la procédure suivante :

Mme X... B..., a demandé au juge des référés du tribunal administratif d'Orléans, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, en premier lieu, de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en deuxième lieu et à titre principal, d'enjoindre au président du conseil départemental du Loiret de la prendre en charge avec ses enfants au sein d'une structure d'accueil adaptée en application des dispositions de l'article L. 221-2 du code de l'action sociale et des familles, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir et, en dernier lieu et à titre subsidiaire, d'enjoindre à la préfète du Loiret de lui proposer un hébergement d'urgence et d'assurer son accompagnement social et celui de ses enfants en application des dispositions des articles L. 345-2 et suivants du code de l'action sociale et des familles, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir.

Par une ordonnance n° 2301500 du 24 avril 2023, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans a, d'une part, enjoint au département du Loiret d'attribuer à Mme B... un hébergement, au titre de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles, dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de cette ordonnance et, d'autre part, mis à la charge du département du Loiret la somme de 1 000 euros à verser à l'avocate de Mme B..., sous réserve de son renoncement à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département du Loiret demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :

1°) d'annuler l'ordonnance du 24 avril 2023 du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) de rejeter les conclusions de première instance de Mme B....

Il soutient que :

- la condition d'urgence n'est pas satisfaite dès lors que, d'une part, Mme B... a renoncé à plusieurs propositions d'hébergement d'urgence qui lui ont été faites pas le service d'aide mobile d'urgence social (Samu social) et, d'autre part, elle et ses filles sont hébergées par un tiers ;

- il n'est pas porté d'atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ;

- Mme B... ne remplit pas les conditions pour bénéficier de l'aide sociale à l'enfance prévues à l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles dès lors que, d'une part, elle ne justifie pas de ses ressources et elle est hébergée par un tiers et, d'autre part, elle ne fait pas état de difficultés psychologiques ;

- le département n'était pas tenu d'accorder à Mme B... un hébergement d'urgence sur le fondement de l'article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles dès lors qu'elle n'a pas saisi le juge des référés de première instance d'une telle demande et que, en tout état de cause, cette compétence relève exclusivement de l'Etat ;

- l'absence de prise en charge de l'intéressée ne saurait caractériser une carence du département dans la mise en œuvre du droit à l'hébergement d'urgence dès lors qu'il ne dispose d'aucune place en centre parental et que Mme B... a refusé d'autres solutions d'hébergement qui lui ont été proposées par le Samu social.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2023, Mme B... conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence est satisfaite, et qu'il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, le département du Loiret et, d'autre part, Mme B... ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 22 mai 2023, à 10 heures 30 :

- Me Pinet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du département du Loiret ;

- la représentante du département du Loiret ;

- Me Rebeyrol, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de Mme B... ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au 23 mai 2023 à 11 heures ;

Un nouveau mémoire, enregistré le 22 mai 2023, a été présenté par Mme A....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".

2. Aux termes de l'article L.222-5 du code de l'action sociale et de la famille : " Sont pris en charge par le service de l'aide sociale à l'enfance sur décision du président du conseil général : (...) 4° Les femmes enceintes et les mères isolées avec leurs enfants de moins de trois ans qui ont besoin d'un soutien matériel et psychologique, notamment parce qu'elles sont sans domicile. ".

3. Au soutien de ses conclusions d'appel dirigées contre l'ordonnance attaquée, le département du Loiret fait valoir que Mme A... ne remplit ni la condition d'urgence prévue par l'article L.521-2 du code de justice administrative, ni les conditions prévues au 4° de l'article L.222-5 du code de l'action sociale et de la famille, car elle ne justifie ni son besoin de soutien psychologique ni son absence de ressources, et a contribué à la situation qu'elle dénonce, d'une part, en regagnant illégalement le territoire français après avoir été reconduite en Italie en application de la procédure " Dublin ", d'autre part, en refusant, à une reprise au moins, une solution d'hébergement d'urgence, après avoir recouru dans un premier temps à des solutions d'hébergement alternatives chez des personnes privées. Il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, que Mme A... est enceinte et accompagnée de ses deux enfants dont l'un a moins de trois ans, qui se sont vu reconnaître le statut de réfugié par deux décisions du 8 février 2023, d'autre part, qu'elle ne dispose d'aucune autre ressource que les 180 euros mensuels qui lui sont versés par le département pour l'accès aux produits de première nécessité, enfin, qu'elle se trouvait, jusqu'à ce qu'un hébergement lui soit proposé en exécution de l'ordonnance attaquée du juge des référés du tribunal administratif d'Orléans, sans domicile ni solution d'hébergement pour elle-même et pour ses enfants. Elle remplit, par suite, les conditions prévues au 4° de l'article L. 222-5 du code de l'action sociale et des familles, et la condition d'urgence prévue par l'article L.521-2 du code de justice administrative.

4. Il résulte de ce qui précède que la requête du département du Loiret doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête du département du Loiret est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée au département du Loiret ainsi qu'à Mme X... A....

Fait à Paris, le 30 mai 2023

Signé : Cyril Roger-Lacan


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 473995
Date de la décision : 30/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 30 mai. 2023, n° 473995
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : CABINET FRANÇOIS PINET ; SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL

Origine de la décision
Date de l'import : 31/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:473995.20230530
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