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26/05/2023 | FRANCE | N°467020

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 26 mai 2023, 467020


Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés le 26 août 2022 et les 13 janvier et 13 févier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 juillet 2022 par laquelle la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins l'a suspendu du droit d'exercer la médecine pour une durée de six mois et a subordonné la reprise de son activité professionnelle aux résultats d'une nouvelle expertise ;


2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés le 26 août 2022 et les 13 janvier et 13 févier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 juillet 2022 par laquelle la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins l'a suspendu du droit d'exercer la médecine pour une durée de six mois et a subordonné la reprise de son activité professionnelle aux résultats d'une nouvelle expertise ;

2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de M. A... et à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du Conseil national de l'ordre des médecins ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique : " I. Dans le cas d'infirmité ou d'état pathologique rendant dangereux l'exercice de la profession, la suspension temporaire du droit d'exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée, qui peut, s'il y a lieu, être renouvelée. / Le conseil est saisi à cet effet soit par le directeur général de l'agence régionale de santé soit par une délibération du conseil départemental ou du conseil national. Ces saisines ne sont pas susceptibles de recours. / II. - La suspension ne peut être ordonnée que sur un rapport motivé établi à la demande du conseil régional ou interrégional par trois médecins désignés comme experts, le premier par l'intéressé, le deuxième par le conseil régional ou interrégional et le troisième par les deux premiers experts. / (....) IV. - Les experts procèdent ensemble, sauf impossibilité manifeste, à l'expertise. Le rapport d'expertise est déposé au plus tard dans le délai de six semaines à compter de la saisine du conseil. (...). / VI. - Si le conseil régional ou interrégional n'a pas statué dans le délai de deux mois à compter de la réception de la demande dont il est saisi, l'affaire est portée devant le Conseil national de l'ordre ".

2. Il ressort des pièces du dossier que, sur le fondement des dispositions citées ci-dessus, le conseil départemental du Var de l'ordre des médecins, par une décision du 13 septembre 2021, a saisi le conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur de l'ordre des médecins d'une demande tendant à la suspension de M. A..., médecin spécialiste, qualifié en anesthésie-réanimation, en raison d'une suspicion d'état pathologique rendant dangereux l'exercice de sa profession. Par une décision du 7 juillet 2022, la formation restreinte du Conseil national de l'ordre des médecins, à laquelle le conseil régional, qui n'avait pas statué dans le délai de deux mois, avait transmis le dossier, a suspendu M. A... du droit d'exercer la médecine pour une durée de six mois et a subordonné la reprise de son activité professionnelle aux résultats d'une nouvelle expertise. M. A... demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision.

3. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article R. 4124-3-3 du code de la santé publique que sont applicables devant le Conseil national les dispositions de l'article R. 4124-3-1 aux termes desquelles " Le praticien intéressé, le conseil départemental et, le cas échéant, le conseil national sont convoqués par lettre recommandée avec demande d'avis de réception huit jours au moins avant la séance du conseil régional ou interrégional. Ils sont informés des dates auxquelles ils peuvent consulter le dossier au siège du conseil régional ou interrégional ". Il en résulte que lorsque le Conseil national de l'ordre des médecins est saisi, la consultation du dossier a lieu à son siège. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision qu'il attaque a été prise irrégulièrement au motif que sa convocation devant la formation restreinte du Conseil national de l'ordre mentionnait que son dossier était mis à sa disposition au siège du Conseil national et non à celui du conseil régional.

4. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que si l'expertise réalisée en application des dispositions citées au point 1 a conclu que l'état de M. A... n'était pas incompatible avec l'exercice de sa profession, le Conseil national a retenu, alors même que M. A... justifiait d'un suivi psychologique et psychiatrique, de la prise d'un antidépresseur et d'analyses établissant l'absence de prise d'alcool à la date de leur réalisation, qu'il faisait l'objet d'une addiction à l'alcool qui a débuté en 2017 avec une première hospitalisation suivie d'un sevrage jusqu'en 2019 puis d'une rechute en 2021 l'ayant conduit à une nouvelle hospitalisation, cette addiction étant elle-même en lien avec un trouble anxieux généralisé, et que, dès lors, il pouvait être retenu que l'exercice de sa profession de médecin spécialiste, qualifié en anesthésie-réanimation, au sein d'une clinique était, faute d'un suivi resserré et d'une prise en charge appropriée de son addiction, dangereux. En estimant, dans ces conditions, que son droit d'exercer sa profession devait être suspendu pendant six mois, le Conseil national de l'ordre des médecins n'a pas fait une inexacte application des dispositions citées au point 1 de l'article R. 4124-3 du code de la santé publique.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, par suite, obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le Conseil national de l'ordre des médecins au titre de l'article L. 761-1 du code de la justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au Conseil national de l'ordre des médecins.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 26 mai. 2023, n° 467020
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Françoise Tomé
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE ; SCP DUHAMEL - RAMEIX - GURY- MAITRE

Origine de la décision
Formation : 4ème chambre
Date de la décision : 26/05/2023
Date de l'import : 25/08/2023

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 467020
Numéro NOR : CETATEXT000047618198 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2023-05-26;467020 ?
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