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27/04/2023 | FRANCE | N°463640

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 27 avril 2023, 463640


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la caisse d'allocations familiales (CAF) des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 1 051,32 euros en réparation du préjudice économique et la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral, assorties des intérêts au taux légal, résultant de l'illégalité des réductions et retenues opérées sur l'aide personnalisée au logement (APL) dont elle a bénéficié entre les mois d'octobre 2015 et de décembre 2016. Par un jugement n°1700759 du 28 octobre 2021, le tribuna

l administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, ...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la caisse d'allocations familiales (CAF) des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 1 051,32 euros en réparation du préjudice économique et la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral, assorties des intérêts au taux légal, résultant de l'illégalité des réductions et retenues opérées sur l'aide personnalisée au logement (APL) dont elle a bénéficié entre les mois d'octobre 2015 et de décembre 2016. Par un jugement n°1700759 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 2 mai et 25 juillet 2022 et le 31 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SARL Le Prado-Gilbert, son avocat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code du travail ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme A... a reçu notification d'indus d'aide personnalisée au logement (APL) et d'allocation aux adultes handicapés (AAH) le 23 mars 2016 pour un montant de 558,52 euros, le 21 mai 2016 pour un montant de 1 250,60 euros, le 16 septembre 2016 pour un montant de 511,89 euros et le 25 octobre 2016 pour un montant de 870,78 euros, portant la créance totale à la somme de 1 039,35 euros, en raison d'un changement de sa situation et notamment de la reprise d'une activité professionnelle à compter du mois de février 2016. Après avoir contesté ces indus et fait valoir que les activités qu'elle a exercées occasionnellement ne constituaient pas un réel changement de situation, Mme A... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la caisse d'allocations familiales (CAF) des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 1 051,32 euros en réparation de son préjudice économique et la somme de 3 000 euros au titre de son préjudice moral, assorties des intérêts au taux légal, résultant de l'illégalité des réductions et retenues opérées sur son aide personnalisée au logement (APL) entre les mois d'octobre 2015 et décembre 2016. Mme A... se pourvoit en cassation contre le jugement du 28 octobre 2021, par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

2. Aux termes de l'article R. 351-5 du code de la construction et de l'habitation : " I- Les ressources prises en considération pour le calcul de l'aide personnalisée sont celles perçues par le bénéficiaire, son conjoint et les personnes vivant habituellement au foyer. (...) / Sont retenues les ressources perçues pendant l'année civile de référence. L'année civile de référence est l'avant-dernière année précédant la période de paiement prévue à l'article R. 351-4. Ces ressources sont appréciées selon les dispositions qui figurent ci-dessous et après application le cas échéant des dispositions des articles R. 351-6, R. 351-7-1, R. 351-7-2 et R. 351-10 à R. 351-14-1, sauf dans les cas prévus à l'article R. 351-7 où sont retenues les ressources évaluées forfaitairement conformément aux dispositions dudit article. / II.-Les ressources prises en considération s'entendent du total des revenus nets catégoriels retenus pour l'établissement de l'impôt sur le revenu (...). / (...) Ne sont pas déduits du décompte des ressources les déficits constatés au cours d'une année antérieure à celle qui est prise en considération et qui font l'objet d'un report, en vertu du I de l'article 156 du code général des impôts (...) " ; qu'aux termes du I de l'article R. 351-7 de ce code : " Il est procédé à une évaluation forfaitaire des ressources de la personne et de son conjoint ou concubin lorsque les conditions ci-après sont réunies : 1° D'une part, (...) soit, à l'occasion du renouvellement du droit autre que le premier, lorsqu'au cours de l'année civile de référence ni le bénéficiaire, ni son conjoint, ni son concubin n'a disposé de ressources appréciées selon les dispositions de l'article R. 351-5 ; 2° D'autre part, le bénéficiaire, son conjoint ou son concubin perçoit une rémunération. (...). La condition relative à l'existence d'une activité professionnelle rémunérée (...) est appréciée au cours du mois civil précédant l'ouverture du droit ou du mois de novembre précédant le renouvellement du droit. ".

3. Il résulte de ces dispositions que lorsqu'un ménage n'a pas perçu de ressources prises en considération pour le calcul de l'aide personnalisée au logement au cours de l'année civile de référence mais qu'il apparaît, au mois de novembre de l'année suivante, qu'un de ses membres exerce désormais une activité professionnelle rémunérée, la caisse procède à une évaluation forfaitaire des ressources pour déterminer si les conditions d'un renouvellement pour une année civile sont remplies et fixer, le cas échéant, le montant de l'aide qui sera versée à compter du 1er janvier suivant. Une activité professionnelle rémunérée au sens de ces dispositions est une activité qui permet à la personne qui l'exerce de disposer de revenus professionnels réguliers. Ne peuvent être regardés comme des revenus professionnels réguliers des revenus faibles et épisodiques.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme A... a obtenu le bénéfice, d'une part, de l'APL au titre d'un logement situé à Plan-de-Cuques et, d'autre part, de l'allocation de solidarité spécifique (ASS), ce qui lui a permis de bénéficier, pour le calcul de cette aide à compter du 1er mars 2008, d'une mesure de neutralisation de ses revenus pris en compte au cours de l'année de référence, en application de l'article R. 351-14 du code de la construction et de l'habitation. Le directeur de la CAF des Bouches-du-Rhône lui a notifié plusieurs indus d'APL au motif qu'elle avait occupé un emploi salarié de garde d'enfant à domicile de juin 2015 jusqu'à la fin juin 2016 et repris, à compter du 1er février 2016, une activité professionnelle au lycée Saint-Exupéry à Marseille. Mme A... a cependant exercé l'emploi de garde à domicile seulement quelques mois et pour un salaire mensuel moyen de 200 euros par mois et, d'autre part, n'a travaillé au lycée Saint-Exupéry que moins d'un mois, de sorte que ces activités professionnelles rémunérées ne lui permettaient pas de disposer de revenus professionnels réguliers. Par suite, en jugeant que Mme A... exerçait une activité à temps partiel et que ses revenus professionnels ne pouvaient plus être neutralisés à partir du premier jour du mois civil au cours duquel intervient la reprise d'activité et que le directeur de la CAF pouvait, pour le calcul de ses droits à l'APL prendre en compte les revenus ainsi perçus et procéder à des retenues sur prestations d'un montant mensuel de 103,45 euros pour apurer la dette, le tribunal administratif a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que Mme A... est fondée à demander l'annulation du jugement du 28 octobre 2021 du tribunal administratif de Marseille.

6. Mme A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la requérante, peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SARL Le Prado-Gilbert renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la somme de 3 000 euros à verser à cette société.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 octobre 2021 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Marseille.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la requérante, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au directeur de la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône.

Délibéré à l'issue de la séance du 6 avril 2023 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; M. Olivier Yeznikian, conseiller d'Etat et M. Olivier Rousselle, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 27 avril 2023.

Le président :

Signé : M. Jean-Philippe Mochon

Le rapporteur :

Signé : M. Olivier Rousselle

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 463640
Date de la décision : 27/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 avr. 2023, n° 463640
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:463640.20230427
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