Vu la procédure suivante :
Par une décision du 24 mai 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi du ministre de l'intérieur dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 14 octobre 2021 en tant qu'il lui enjoint de procéder à l'échange du permis de conduire de M. B... A....
Le pourvoi a été communiqué à M. A..., qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la route ;
- l'arrêté du 12 janvier 2012 fixant les conditions de reconnaissance et d'échange des permis de conduire délivrés par les États n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Nicolas Labrune, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B... A... a demandé l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 8 mars 2019 par laquelle le préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, a refusé d'échanger son permis de conduire pakistanais contre un titre de conduite français. Par un jugement du 14 octobre 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a fait droit à sa demande et enjoint au préfet de procéder à l'échange de son permis de conduire dans un délai d'un mois. Par une décision du 24 mai 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi du ministre de l'intérieur contre ce jugement en tant qu'il enjoint de procéder à l'échange du permis de conduire de M. A....
2. D'une part, aux termes de l'article R. 222-3 du code de la route : " Tout permis de conduire national, en cours de validité, délivré par un Etat ni membre de la Communauté européenne, ni partie à l'accord sur l'Espace économique européen, peut être reconnu en France jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an après l'acquisition de la résidence normale de son titulaire. Pendant ce délai, il peut être échangé contre le permis français, sans que son titulaire soit tenu de subir les examens prévus au premier alinéa de l'article R. 221-3. Les conditions de cette reconnaissance et de cet échange sont définies par arrêté du ministre chargé des transports, après avis du ministre de la justice, du ministre de l'intérieur et du ministre chargé des affaires étrangères (...) ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 12 janvier 2012 susvisé, dans sa version applicable au litige : " I. ' Pour être échangé contre un titre français, tout permis de conduire délivré par un Etat n'appartenant ni à l'Union européenne, ni à l'Espace économique européen doit répondre aux conditions suivantes : / A. ' Avoir été délivré au nom de l'Etat dans le ressort duquel le conducteur avait alors sa résidence normale, sous réserve qu'il existe un accord de réciprocité entre la France et cet Etat conformément à l'article R. 222-1 du code de la route. Seul le dernier titre délivré peut être présenté à l'échange. B. ' Etre en cours de validité au moment du dépôt de la demande, à l'exception des titres dont la validité est subordonnée par l'Etat qui l'a délivré aux droits au séjour sur leur territoire du titulaire du titre. C. ' Pour un étranger non-ressortissant de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, de la Confédération suisse ou de la Principauté de Monaco, avoir été obtenu antérieurement à la date de début de validité du premier titre de séjour (...). D. ' Etre rédigé en langue française ou, si tel n'est pas le cas, accompagné d'une traduction officielle en français, légalisée ou apostillée si la traduction est effectuée à l'étranger ou, si elle est réalisée en France, effectuée par un traducteur habilité à intervenir auprès des autorités judiciaires ou administratives françaises. Le demandeur peut produire une traduction établie par la représentation diplomatique en France de l'Etat de délivrance du titre de conduite ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".
4. Il ressort des termes du jugement attaqué que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif, après avoir annulé la décision du préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, refusant de procéder à l'échange du permis de conduire pakistanais produit par M. A..., en estimant que le motif sur lequel cette décision reposait, tiré de l'absence d'authenticité du titre présenté à l'échange, était entaché d'erreur d'appréciation, a enjoint à ce préfet de procéder à cet échange dans un délai d'un mois. Il résulte des dispositions citées au point 3 qu'en enjoignant au préfet de procéder à l'échange du permis de conduire, alors que l'annulation de la décision attaquée n'impliquait pas que le préfet procède à l'échange du permis mais seulement qu'il réexamine la demande de l'intéressé au regard de l'ensemble des conditions réglementaires applicables, rappelées au point 2, la magistrate désignée a commis une erreur de droit.
5. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à demander l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, dans la limite de la cassation prononcée.
7. Ainsi qu'il a été dit au point 4, l'annulation par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise de la décision du préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, rejetant la demande présentée par M. A... implique seulement que le préfet procède au réexamen de cette demande. Par suite, il y a lieu de lui enjoindre de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 14 octobre 2021 est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la région Pays de la Loire, préfet de la Loire-Atlantique, de procéder au réexamen de la demande de M. A... d'échange de son permis de conduire pakistanais contre un permis français dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. B... A....
Délibéré à l'issue de la séance du 10 novembre 2022 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et M. Nicolas Labrune, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 13 décembre 2022.
Le président :
Signé : M. Jean-Philippe Mochon
Le rapporteur :
Signé : M. Nicolas Labrune
La secrétaire :
Signé : Mme Anne-Lise Calvaire