Vu la procédure suivante :
Par un jugement n° 2107828 du 4 mars 2022, enregistré le 8 mars suivant au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le tribunal administratif de Grenoble, avant de statuer sur la demande de M. A... B... tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 14 novembre 2021 par lequel le préfet de la Savoie a prolongé pour une durée de deux ans l'interdiction de retour sur le territoire français prise à son encontre le 2 juin 2021, a, en application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, décidé de transmettre le dossier de cette demande au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen la question suivante : les recours formés contre les décisions portant prolongation d'une interdiction de retour sur le territoire français prises à l'encontre d'un étranger en application de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent-ils être présentés, instruits et jugés selon les modalités prévues aux articles L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et R. 776-13-1 et suivants du code de justice administrative '
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- Le rapport de Mme Stéphanie Vera, maître des requêtes en service extraordinaire,
- Les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public,
REND L'AVIS SUIVANT
1. Les articles L. 612-6 et L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient respectivement que l'autorité administrative édicte une interdiction de retour sur le territoire français, d'une part lorsqu'elle prend une décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, d'autre part lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, des circonstances humanitaires pouvant toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. L'article L. 612-8 du même code permet également à l'autorité administrative d'assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour lorsque l'étranger n'est pas dans l'une de ces situations. L'article L. 612-11 du code permet à l'autorité administrative de prolonger l'interdiction de retour lorsque : " 1° L'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français alors qu'il était obligé de le quitter sans délai ; / 2° L'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire qui lui avait été accordé ; / 3° L'étranger est revenu sur le territoire français après avoir déféré à l'obligation de quitter le territoire français, alors que l'interdiction de retour poursuivait ses effets ".
2. Aux termes de l'article L. 614-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français peut, dans les conditions et délais prévus au présent chapitre, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision relative au délai de départ volontaire et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) ". Les articles L. 614-4 et L. 614-5 distinguent deux procédures contentieuses lorsque la décision est assortie d'un délai de départ volontaire, en l'absence d'assignation à résidence ou de placement en rétention. Lorsque la décision est prise en application des 3°, 5° ou 6° de l'article L. 611-1 le délai de recours est de trente jours et le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois. Lorsqu'elle est prise en application des 1°, 2° ou 4° du même article, le délai de recours est réduit à 15 jours et le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne à cette fin statue dans un délai de six semaines. L'article L. 614-5 dispose que, dans ce second cas : " L'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin le concours d'un interprète et la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. / L'audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public, en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. L'étranger est assisté de son conseil s'il en a un. Il peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin qu'il lui en soit désigné un d'office (...) ". L'article L. 614-5 précise, en outre, que l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-7, notifiée postérieurement à la décision portant obligation de quitter le territoire français, peut être contestée dans les mêmes conditions. Enfin, lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'un délai de départ volontaire, le délai de recours est de 48 heures et il est statué sur ce recours selon la procédure et dans les délais prévus, selon le fondement de la décision portant obligation de quitter le territoire français, aux articles L. 614-4 ou L. 614-5.
3. L'article R. 776-3 du code de la justice administrative dispose que : " Conformément aux dispositions de l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les interdictions de retour sur le territoire français prises en application de l'article L. 612-7 de ce code à l'encontre d'étrangers s'étant maintenus sur le territoire français au-delà du délai de départ volontaire peuvent faire l'objet d'un recours contentieux dans les quinze jours de leur notification. / Le même délai s'applique pour la contestation des décisions prolongeant les interdictions de retour, prises en application de l'article L. 612-11 du même code ". Les articles R. 776-13-1 à R. 776-13-3 de ce code précisent les dispositions applicables aux recours formés en application de l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte des dispositions citées aux points 1 à 3 que la procédure contentieuse applicable à la contestation d'une décision d'interdiction de retour sur le territoire français relève du régime applicable à la contestation de la décision portant obligation de quitter le territoire français qu'elle accompagne ou, lorsque la décision d'interdiction de retour est prise postérieurement à celle-ci, et en l'absence d'assignation à résidence ou de placement en rétention, de la procédure prévue par l'article L. 614-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Il résulte en outre de l'économie générale de ces dispositions que la procédure prévue par l'article L. 614-5 est également applicable, en l'absence d'assignation à résidence ou de placement en rétention, à la contestation des décisions prolongeant les interdictions de retour, prises en application de l'article L. 612-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Grenoble, à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Il sera publié au Journal officiel de la République française.