Vu les procédures suivantes :
1°. Sous le numéro n° 463123, B... une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 12 avril et 2 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Union nationale pour l'Instruction et l'Epanouissement (UNIE) demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que les responsables des enfants doivent présenter une demande d'instruction dans la famille pour la rentrée 2022-2023 avant le 31 mai 2022 ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret contesté ;
- l'article R. 131-11-1 du code de l'éducation ne peut légalement imposer que la demande d'autorisation d'instruction dans la famille comporte un document justifiant du domicile des personnes responsables de l'enfant alors que les personnes nomades sont dans l'impossibilité de produire un tel document ;
- l'article R. 131-11-3 du code de l'éducation ne peut légalement imposer, pour bénéficier d'une autorisation motivée B... la pratique d'activités sportives ou artistiques intensives, de produire avant le 31 mai de l'année scolaire en cours une présentation du temps de l'enfant, de ses engagements et des contraintes établissant qu'il ne peut fréquenter assidûment un établissement d'enseignement public ou privé pour bénéficier d'une autorisation d'instruction dans la famille motivée B... la pratique d'activités sportives ou artistiques intensives alors que les familles ne disposent pas de toutes les informations nécessaires à cette date ;
- l'article R. 131-11-5 du code de l'éducation est entaché d'une erreur d'appréciation en imposant, pour bénéficier d'une autorisation motivée B... l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, de produire une copie du diplôme du baccalauréat ou de son équivalent de la personne chargée d'instruire alors que cette condition de diplôme n'est pas exigée B... la loi, que le baccalauréat n'est pas exigé pour passer le concours de recrutement de professeur des écoles et que des personnes qui ne disposent pas du baccalauréat ont démontré leur capacité à instruire des enfants sous l'ancien régime déclaratif ;
- cet article méconnaît le principe d'égalité entre les personnes qui ont le baccalauréat et celles qui ont un titre ou un diplôme étranger qui pourront être autorisées B... le directeur académique des services de l'éducation nationale à assurer l'instruction dans la famille.
B... un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2022, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
2°. Sous le n° 463224, B... une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 avril et 3 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Les Enfants d'Abord demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille et du décret n° 2022-183 du 15 février 2022 relatif à la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires exercés contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que les décrets litigieux portent une atteinte grave et immédiate aux intérêts qu'elle entend défendre, que le décret n° 2022-182 fixe un délai extrêmement limité qui court uniquement jusqu'au 31 mai pour déposer une demande d'autorisation, que ce délai s'articule difficilement avec les dispositions du IV de l'article 49 de la loi du 24 août 2021 qui prévoit d'accorder une autorisation jusqu'en 2024 pour les enfants régulièrement instruits en famille pour l'année scolaire en cours et pour lesquels les résultats du contrôle organisé en application du code de l'éducation ont été jugés suffisants et que le décret n° 2022-183 ne permet pas les conditions d'un recours effectif en cas de refus d'autorisation ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décrets contestées ;
- le délai de dépôt de la demande d'autorisation prévu B... l'article R. 131-11 du code de l'éduction méconnaît l'intérêt supérieur de l'enfant protégé B... la convention internationale des droits de l'enfant, la liberté d'enseignement, le droit au respect de la vie privée et familiale, le droit à la santé et le droit d'aller et venir protégés B... la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel n° 1, le pacte des Nations-Unies relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la déclaration universelle des droits de l'homme et le préambule de la Constitution de l'organisation mondiale de la Santé, l'exception prévue ne permettant pas une adaptation rapide à tous les changements affectant la situation de l'enfant et étant inadapté aux élèves arrivant en France en cours d'année, aux élèves souhaitant bénéficier d'une instruction dans la famille justifiée B... la pratique d'une activité sportive ou artistique ou aux enfants bénéficiant déjà de l'instruction dans la famille ;
- l'article R. 131-11-5 du code de l'éducation méconnaît les dispositions de la loi du 24 août 2021 et la décision du Conseil constitutionnel du 13 août 2021 en imposant, pour bénéficier d'une autorisation motivée B... l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, de produire une copie du diplôme du baccalauréat ;
- l'article R. 131-11-17 méconnaît les dispositions de la loi du 24 août 2021, le droit à la liberté d'enseignement et le droit à la santé en ce qu'il prévoit un avis circonstancié du chef d'établissement sur le projet d'éducation dans la famille lorsque l'intégrité physique ou mentale d'un enfant est menacée ;
- les articles R. 131-11-2, R. 131-11-4 et R. 131-11-5 du code de l'éducation sont imprécis et n'encadrent pas suffisamment le pouvoir d'appréciation de l'administration pour accepter ou refuser une demande d'autorisation et abandonnent à celle-ci des prérogatives excessives et arbitraires ;
- l'obligation de détenir le baccalauréat pour la personne assurant l'instruction prévue à l'article R. 131-11-5 crée une discrimination entre les enfants de parents ayant le baccalauréat et ceux dont les parents ne l'ont pas, entre des familles souhaitant bénéficier de l'instruction dans la famille en raison de la situation propre à l'enfant et les familles souhaitant bénéficier de l'instruction dans la famille pour d'autres motifs et entre enfants d'une même fratrie lorsque des enfants bénéficient déjà de l'instruction en famille ;
- l'obligation de définir le rythme et la durée des activités envisagées et l'obligation d'assurer la majorité de l'enseignement en langue française ne sont pas compatibles avec les méthodes de pédagogie alternative et créent une discrimination entre les enfants bénéficiant de l'instruction dans la famille et ceux scolarisés en établissements traditionnels ;
- l'obligation d'attester de l'inscription auprès d'un organisme sportif ou artistique prévue à l'article R. 131-11-4 introduit une discrimination entre les sportifs ou les artistes inscrits dans un organisme les encadrant et les sportifs ou artistes autodidactes ;
- le décret n° 2022-183 porte atteinte au droit au recours effectif dès lors que, en premier lieu, le délai huit jours pour contester une décision de refus d'autorisation est trop court pour que les familles puissent agir utilement et dans les temps, en deuxième lieu, les recours juridictionnels seront exercés de manière tardive du fait de la procédure instaurée B... le décret ne permettant pas la garantie d'un recours effectif aux enfants souhaitant bénéficier de l'instruction dans la famille et, en dernier lieu, la composition de la commission compétente pour recevoir les recours préalables présente un risque de partialité.
B... un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2022, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
3°. Sous le n° 463324, B... une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 avril et 2 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, A... C... F..., A... J... D..., A... E... G..., A... K..., A... L... et A... H... I... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille ;
2°) de suspendre l'exécution du décret n° 2022-183 du 15 février 2022 relatif à la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires exercés contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors qu'elles ne disposent pas du baccalauréat et ne pourront, pour l'année scolaire à venir, inscrire leurs enfants en instruction dans la famille alors qu'elles en ont déjà l'expérience pour d'autres enfants et que les contrôles concernant la dispense de l'instruction ont tous été positifs ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décrets contestées ;
- l'article R. 131-11-5 du code de l'éducation ajoute une condition discriminatoire à la loi, est entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît le principe d'égalité en imposant une condition de détention du baccalauréat et en ne prévoyant aucune modalité pour les parents disposant d'un diplôme étranger ;
- cet article porte atteinte à la liberté pédagogique des parents d'enfants instruits en famille en leur imposant de préciser l'organisation du temps de l'enfant ;
- il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en restreignant la possibilité de présenter des demandes de dérogation à une seule période annuelle de durée restreinte alors que la loi ne prévoit pas ce principe, que les exceptions ne couvrent pas les situations de projet pédagogique propre à l'enfant ou de pratique d'activités sportives ou artistiques et que la rigidité de ce dispositif va à l'encontre de l'objectif de la loi en incitant les parents dont les enfants sont instruits en famille à ne pas rescolariser leurs enfants de crainte de ne pouvoir revenir en arrière au cours de l'année scolaire ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en fixant un délai de quinze jours pour communiquer les éléments manquants d'un dossier ;
- il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en ajoutant un avis du chef d'établissement à la procédure applicable à un enfant ayant subi un harcèlement scolaire et voulant être instruit en famille ;
- B... voie de conséquence, il méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en fixant un délai de huit jours pour informer le rectorat d'un changement de résidence ;
- il méconnaît l'article L. 146-3 du code de l'action sociale et des familles en prévoyant un avis du médecin de l'éducation nationale sur les demandes d'autorisation fondées sur un motif de santé ou de handicap ;
- il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en intégrant les enfants scolarisés au Centre national d'enseignement à distance (CNED) réglementé au sein de la catégorie des enfants instruits en famille ;
- le délai de huit jours pour saisir la commission en cas refus d'autorisation d'instruction dans la famille est manifestement inadapté et porte une atteinte disproportionnée à l'intérêt supérieur de l'enfant et au droit au recours effectif ;
- la composition de la commission de recours administratif préalable obligatoire n'est pas composée de manière pertinente en ne comprenant pas de représentants de parents.
B... un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2022, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
B... un mémoire en intervention, enregistré le 29 avril 2022, l'association Liberté éducation - Instruction en famille demande au juge des référés de faire droit aux conclusions de la requête de A... F... et autres. Elle soutient que leur intervention est recevable et reprend les mêmes moyens que les requérantes.
Les requêtes ont été communiquées au Premier ministre qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la Constitution ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- la déclaration universelle des droits de l'homme des Nations-Unies ;
- le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;
- la convention relative aux droits de l'enfant ;
- la constitution de l'Organisation Mondiale de la Santé ;
- le code de l'éducation ;
- la décision n°2021-823 DC du 13 août 2021 ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 et notamment son article 49 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, l'association Union nationale pour l'Instruction et l'Epanouissement, l'association Les Enfants d'Abord, A... F... et autres et l'association Liberté éducation - Instruction en famille et, d'autre part, le Premier ministre et le ministre de l'Education nationale, de la jeunesse et des sports ;
Ont été entendus lors de l'audience publique du 3 mai 2022, à 14 heures 30 :
- Me Stoclet, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'association UNIE ;
- le représentant de l'association UNIE ;
- Me Spinosi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'association Les Enfants d'Abord ;
- les représentants de l'association Les Enfants d'Abord ;
- Me Gaschignard, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de A... F... et autres ;
- le représentant de A... F... et autres ;
- les représentants du ministre de l'Education nationale, de la jeunesse et des sports ;
- Me Valdelièvre, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'association Liberté éducation - Instruction en famille ;
- le représentant de l'association Liberté éducation - Instruction en famille ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a clôturé l'instruction ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
2. Les requêtes visées ci-dessus, présentées sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, tendent à la suspension de l'exécution des dispositions des mêmes décrets. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer B... une seule ordonnance.
3. L'association Liberté éducation - instruction en famille justifie d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien de la requête de A... F... et autres.
4. Les articles L. 131-2 et L. 131-5 du code de l'éducation, dans leur version applicable à l'année scolaire en cours, prévoient que l'instruction obligatoire peut être donnée soit dans les établissements ou écoles publics ou privés, soit dans les familles B... les parents, ou l'un d'entre eux, ou toute personne de leur choix et soumet l'instruction dans la famille à un simple régime de déclaration. Le troisième alinéa de l'article L. 131-10 du même code prévoit un contrôle au moins une fois B... an pour vérifier que l'instruction dispensée au même domicile l'est pour les enfants d'une seule famille et que l'enseignement assuré est conforme au droit de l'enfant à l'instruction tel que défini B... le code de l'éducation.
5. L'article 49 de la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a modifié le régime de l'instruction dans la famille à compter de la rentrée scolaire 2022. Il a modifié l'article L. 131-2 du code de l'éducation pour prévoir que l'instruction obligatoire serait donnée dans les écoles et établissements d'enseignement et qu'elle ne pourrait, B... dérogation, être dispensée en famille B... les parents ou B... toute personne de leur choix, que sur autorisation délivrée dans les conditions fixées à l'article L. 131-5 du même code. Le VI de cet article 49 a toutefois prévu que, B... dérogation, cette autorisation serait accordée de plein droit, pour les années 2022-2023 et 2023-2024, aux enfants régulièrement instruits dans la famille au cours de l'année 2021-2022 et pour lesquels les résultats du contrôle organisé en application du troisième alinéa de l'article L. 131-10 du même code de l'éducation ont été jugés satisfaisants.
6. En vertu de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, dans sa version applicable à compter de la rentrée scolaire 2022, l'autorisation d'instruction dans la famille est accordée, sans que puissent être invoquées d'autres raisons que l'intérêt supérieur de l'enfant, pour quatre motifs : l'état de santé de l'enfant ou son handicap, la pratique d'activités sportives ou artistiques intensives, l'itinérance de la famille en France ou l'éloignement géographique de tout établissement scolaire public et l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif. Le législateur a prévu qu'un décret en Conseil d'Etat préciserait les modalités de délivrance de cette autorisation. Il a également prévu que la décision de refus d'autorisation ferait l'objet d'un recours administratif préalable auprès d'une commission présidée B... le recteur d'académie, dans des conditions fixées B... décret.
7. Eu égard aux moyens qu'elles invoquent, les requérantes doivent être regardées comme demandant la suspension de certaines dispositions des décrets n° 2022-182 et n° 2022-183 du 15 février 2022, pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, qui précisent les modalités de délivrance de l'autorisation de l'instruction dans la famille et les conditions dans lesquelles une décision de refus d'autorisation peut faire l'objet d'un recours administratif préalable obligatoire.
Sur la condition d'urgence :
8. Les décrets litigieux sont applicables aux demandes d'autorisation d'instruction dans la famille présentées en vue de la rentrée scolaire 2022-2023. Ces demandes doivent être déposées avant le 31 mai et les décrets contestés prévoient un certain nombre de conditions qui sont susceptibles de limiter la possibilité pour certaines familles de bénéficier d'une telle autorisation. Si le ministre de l'éducation nationale soutient que la suspension de l'exécution des décrets attaqués rendrait impossible la mise en œuvre à la rentrée scolaire 2022 du régime d'autorisation instauré B... la loi du 24 août 2021, les requêtes présentées B... les requérantes ne demandent la suspension de l'exécution que de certaines dispositions des décrets contestés. Cette suspension partielle ne remettrait pas en cause l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation. La condition d'urgence prévue B... l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit, dans ces conditions, être regardée comme remplie.
Sur le décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille :
En ce qui concerne la période pour présenter les demandes d'autorisation :
9. Aux termes de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, dans sa version applicable à compter de la rentrée scolaire 2022 : " Les personnes responsables d'un enfant soumis à l'obligation scolaire définie à l'article L. 131-1 doivent le faire inscrire dans un établissement d'enseignement public ou privé ou bien, à condition d'y avoir été autorisées B... l'autorité compétente en matière d'éducation, lui donner l'instruction en famille (...) ". En vertu du même article, l'autorisation d'instruction dans la famille " est accordée pour une durée qui ne peut excéder l'année scolaire ", une durée supérieure pouvant être prévue lorsque l'autorisation est justifiée B... l'état de santé de l'enfant ou son handicap.
10. L'article R. 131-11 du code de l'éducation issu du décret contesté prévoit que les demandes d'autorisation de l'instruction dans la famille doivent être adressées entre le 1er mars et le 31 mai inclus précédant l'année scolaire au titre de laquelle cette demande est formulée. La fixation de cette période pour solliciter une dérogation à la scolarisation dans un établissement d'enseignement est cohérente avec le calendrier d'inscription des enfants dans ces établissements qui constitue une obligation en application des dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation. Le décret contesté a également prévu la possibilité de solliciter la délivrance d'une autorisation en dehors de cette période pour des motifs tenant à l'état de santé de l'enfant, à son handicap ou à son éloignement géographique. Les requérantes soutiennent que cette possibilité devrait être étendue aux motifs liés à la pratique d'activités sportives ou artistiques intensives ou à la mise en place d'un projet éducatif. Toutefois, comme le fait valoir le ministre en défense, ces situations apparaissent prévisibles et l'obligation d'instruction dans un établissement d'enseignement ne peut être regardée comme portant atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant. B... suite, le moyen tiré de ce que la fixation de cette période pour solliciter l'autorisation d'instruction dans la famille méconnaîtrait l'intérêt supérieur de l'enfant, la liberté d'enseignement, le droit au respect de la vie privée et familiale, le droit à la santé et le droit d'aller et venir et serait entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation n'apparaît pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
En ce qui concerne la justification du domicile :
11. L'article R. 131-11-1 du code de l'éducation issu du décret contesté, impose que toute demande d'autorisation comporte un document justifiant du domicile des personnes responsables de l'enfant. Comme le fait valoir le ministre en défense, les articles L. 264-1 et D. 264-1 du code de l'action sociale et des familles permettent aux personnes sans domicile stable d'élire domicile auprès d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale ou auprès d'un organisme agréé à cet effet et de se voir remettre une attestation d'élection de domicile. B... suite, le moyen tiré de ce que les personnes nomades seraient dans l'impossibilité de produire un document justifiant de leur domicile n'est pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
En ce qui concerne les demandes d'autorisation motivées B... l'état de santé de l'enfant :
12. L'article R. 131-11-2 du code de l'éducation issu du décret contesté, prévoit que le certificat médical accompagnant ces demandes est transmis sous pli fermé à un médecin de l'éducation nationale qui rend un avis sur la demande. A... F... et autres soutiennent que seule la maison départementale des personnes handicapées serait compétente pour apprécier le handicap d'une personne en application de l'article L. 146-3 du code de l'action sociale et des familles. Toutefois, il ressort de ces dernières dispositions que cette compétence porte sur l'évaluation des demandes et l'attribution de droits et prestations mentionnés au code de l'action sociale et des familles et au code de la sécurité sociale. Les moyens tirés de ce que ces dispositions du code de l'éducation seraient imprécises et méconnaîtraient les dispositions de l'article L. 146-3 du code de l'action sociale et des familles ne sont pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
En ce qui concerne les demandes d'autorisation motivées B... la pratique d'activité sportives ou artistiques :
13. Comme indiqué au point 6, l'article L. 131-5 du code de l'éducation, dans sa version applicable à compter de la rentrée scolaire 2022, prévoit que l'autorisation d'instruction dans la famille, qui constitue une dérogation au principe de scolarisation dans un établissement d'enseignement, est accordée en cas de pratique d'activités sportives ou artistiques intensives. L'article R. 131-11-3 du code de l'éducation issu du décret contesté, prévoit que ces demandes comprennent une attestation d'inscription auprès d'un organisme sportif ou artistique et une présentation de l'organisation du temps de l'enfant, de ses engagements et de ses contraintes établissant qu'il ne peut fréquenter assidûment un établissement d'enseignement public ou privé. Ces deux critères permettent de s'assurer du caractère intensif de la pratique sportive ou artistique et du fait qu'elle ne peut s'exercer parallèlement à une scolarisation dans un établissement d'enseignement. Les moyens tirés de ce que ces dispositions méconnaîtraient le principe d'égalité et de ce que les parents ne disposeraient pas de tous les éléments pour présenter l'organisation du temps, les engagements et les contraintes d'un enfant ayant une telle pratique ne sont pas de nature, à l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
En ce qui concerne les demandes d'autorisation motivées B... la situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif :
14. L'article L. 131-5 du code de l'éducation, dans sa version applicable à compter de la rentrée scolaire 2022, prévoit qu'une autorisation d'instruction dans la famille " est accordée pour les motifs suivants, sans que puissent être invoquées d'autres raisons que l'intérêt supérieur de l'enfant : / (...) 4° L'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif, sous réserve que les personnes qui en sont responsables justifient de la capacité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant à assurer l'instruction en famille dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant. Dans ce cas, la demande d'autorisation comporte une présentation écrite du projet éducatif, l'engagement d'assurer cette instruction majoritairement en langue française ainsi que les pièces justifiant de la capacité à assurer l'instruction en famille ".
15. B... sa décision n° 2021-823 DC du 13 août 2021, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les mots " à condition d'y avoir été autorisées B... l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation " figurant à l'article L. 131-5 du code de l'éducation sous une réserve énoncée au paragraphe 76 de cette décision. Le Conseil constitutionnel a estimé qu'en subordonnant l'autorisation à la vérification de la " capacité ... d'instruire " de la personne en charge de l'enfant, les dispositions contestées avaient entendu imposer à l'autorité administrative de s'assurer que cette personne est en mesure de permettre à l'enfant d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire. D'autre part, en prévoyant que cette autorisation est accordée en raison de " l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif ", le législateur avait entendu que l'autorité administrative s'assure que le projet d'instruction en famille comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant. Il a jugé qu'il appartiendrait, sous le contrôle du juge, au pouvoir réglementaire de déterminer les modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille conformément à ces critères et aux autorités administratives compétentes de fonder leur décision sur ces seuls critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit.
16. L'article R. 131-11-5 du code de l'éducation, issu du décret contesté, prévoit que ces demandes comprennent " 1° Une présentation écrite du projet éducatif comportant les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant, à savoir notamment : / a) Une description de la démarche et des méthodes pédagogiques mises en œuvre pour permettre à l'enfant d'acquérir les connaissances et les compétences dans chaque domaine de formation du socle commun de connaissances, de compétences et de culture ; / b) Les ressources et supports éducatifs utilisés ; / c) L'organisation du temps de l'enfant (rythme et durée des activités) ; / d) Le cas échéant, l'identité de tout organisme d'enseignement à distance participant aux apprentissages de l'enfant et une description de la teneur de sa contribution ; / 2° Toutes pièces utiles justifiant de la disponibilité de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant ; / 3° Une copie du diplôme du baccalauréat ou de son équivalent de la personne chargée d'instruire l'enfant. Le directeur académique des services de l'éducation nationale peut autoriser une personne pourvue d'un titre ou diplôme étranger à assurer l'instruction dans la famille, si ce titre ou diplôme étranger est comparable à un diplôme de niveau 4 du cadre national des certifications professionnelles ; / 4° Une déclaration sur l'honneur de la ou des personnes chargées d'instruire l'enfant d'assurer cette instruction majoritairement en langue française ".
17. En premier lieu, ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision citée au point 15, en prévoyant que l'autorisation d'instruction dans la famille est accordée en raison de " l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif ", le législateur a entendu que l'autorité administrative s'assure que le projet d'instruction en famille comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant. Le pouvoir réglementaire a ainsi pu légalement prévoir que la présentation écrite du projet éducatif comporterait notamment des éléments sur l'organisation du temps de l'enfant. B... suite, les moyens tirés de ce que ces dispositions méconnaîtraient la liberté pédagogique et créeraient une discrimination illégale ne sont pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité des dispositions contestées.
18. En deuxième lieu, la nécessité de produire un engagement d'assurer l'instruction en famille majoritairement en langue française est prévue B... les dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation. B... suite, le moyen tiré de ce que la production d'une déclaration sur l'honneur d'assurer l'instruction majoritairement en langue française méconnaîtrait le principe d'égalité n'est pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité des dispositions.
19. En troisième lieu, ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel, il appartenait au pouvoir réglementaire de déterminer les modalités de délivrance de l'autorisation d'instruction dans la famille afin que l'autorité administrative s'assure que la personne en charge de l'instruction de l'enfant est en mesure de permettre à l'enfant d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture défini à l'article L. 122-1-1 du code de l'éducation au regard des objectifs de connaissances et de compétences attendues à la fin de chaque cycle d'enseignement de la scolarité obligatoire et que ses décisions soient fondées sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit. La nécessité de produire une copie du diplôme du baccalauréat ou de son équivalent à l'appui d'une demande d'autorisation de l'instruction dans la famille est de nature à permettre de s'assurer que la personne en charge de l'enfant est effectivement en mesure de lui permettre d'acquérir ce socle commun et à éviter tout risque de discrimination dans l'examen des demandes d'autorisation. Si les requérantes font valoir qu'il est possible d'être recruté comme professeur des écoles sans posséder le baccalauréat, comme l'indique le ministre en défense, cette dispense concerne la seule présentation au concours qu'il faut ensuite réussir pour être intégré dans le corps des professeurs des écoles. B... suite, le moyen tiré de ce que les dispositions imposant de produire une copie du diplôme du baccalauréat ou de son équivalent de la personne chargée d'instruire l'enfant relèveraient du domaine de la loi, seraient entachées d'erreur d'appréciation et créeraient une discrimination illégale entre les enfants et les familles ne sont pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
20. L'association UNIE soutient que ces dispositions méconnaîtraient le principe d'égalité entre les personnes qui ont le baccalauréat et les personnes disposant d'un titre ou diplôme étranger que le directeur des services de l'Education nationale peut autoriser à assurer l'instruction en famille si ce titre ou diplôme étranger est comparable à un diplôme de niveau 4 du cadre national des certifications. Toutefois la différence de traitement invoquée résulte de situations différentes. Ce moyen n'est, dès lors, pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
21. Les requérantes soutiennent également que le décret contesté méconnaît le principe d'égalité des enfants au sein d'une même fratrie en raison des dispositions transitoires prévues au VI de l'article 49 de la loi du 4 août 2021 citées au point 5. Elles font ainsi valoir qu'elles pourront bénéficier d'une autorisation de plein droit pour les années 2022-2023 et 2023-2024 pour assurer l'instruction des enfants déjà instruits dans la famille au cours de l'année 2021-2022 et pour lesquels les résultats du contrôle ont été jugés suffisants mais qu'elles ne pourront, faute d'être titulaire du baccalauréat, bénéficier d'une telle autorisation pour un nouvel enfant qui a atteint ou atteindra l'âge de trois ans au cours de l'année 2022. Cette différence de traitement résulte toutefois du choix du législateur d'instaurer une autorisation de plein droit pour les seuls enfants déjà instruits en famille au cours de l'année 2021-2022 et ceci pour une période transitoire de deux ans. B... suite, le moyen tiré de ce que les dispositions litigieuses méconnaîtraient le principe d'égalité entre enfants d'une même fratrie en ne permettent pas à un parent dont la capacité est attestée B... les résultats positifs des contrôles d'enfants déjà instruits en famille au cours de l'année 2021-2022 de solliciter une autorisation d'instruction dans la famille pour un nouvel enfant qui aurait atteint ou attendrait l'âge de trois ans au cours de l'année 2022 n'est pas de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité du décret attaqué.
En ce qui concerne l'instruction en famille en cas de harcèlement :
22. Aux termes du quatorzième alinéa de l'article L. 131-5 du code de l'éducation, dans sa version applicable à compter de la rentrée scolaire 2022 : " Lorsque, après concertation avec le directeur de l'établissement d'enseignement public ou privé dans lequel est inscrit un enfant, il est établi que l'intégrité physique ou morale de cet enfant est menacée, les personnes responsables de l'enfant peuvent lui donner l'instruction dans la famille après avoir sollicité l'autorisation mentionnée au premier alinéa du présent article, dans le délai restant à courir avant que cette autorisation ne leur soit accordée ou refusée ".
23. L'article R. 131-11-7 du code de l'éducation issu du décret contesté prévoit qu'à l'issue de la concertation avec la famille, le directeur de l'établissement remet aux personnes responsables de l'enfant, lorsqu'elles s'orientent vers une demande d'instruction dans la famille de l'enfant, un avis circonstancié sur ce projet et que la demande d'autorisation comporte, outre les documents normalement requis, cet avis ainsi que tout document utile de nature à établir que l'intégrité physique ou morale de l'enfant est menacée. Les requérantes soutiennent que ces dispositions méconnaissent les dispositions de l'article L. 131-5 du code de l'éducation qui ne prévoient qu'une concertation et donne au chef d'établissement un pouvoir d'influer sur la décision. Toutefois, comme le fait valoir le ministre en défense, cet avis permet de matérialiser la concertation et l'existence de menaces sur l'intégrité physique ou morale de l'enfant et les parents peuvent produire d'autres documents utiles susceptible d'établir l'existence de ces menaces. Dans ces conditions, les moyens tirés de ce que ces dispositions méconnaîtraient le droit à la liberté d'enseignement, le droit à la santé et seraient entachées d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ne sont pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
En ce qui concerne les autres moyens :
24. Les moyens tirés de ce que certaines dispositions du décret seraient trop imprécises, de ce que la fixation d'un délai de quinze jours pour recevoir des pièces et informations manquantes et d'un délai de huit jours pour informer le rectorat en cas de changement de résidence serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, de ce que les dispositions prévoyant que la délivrance d'une autorisation d'instruire l'enfant dans la famille pour les motifs 1° à 3° de l'article L. 131-5 vaut avis favorable du directeur académique des services de l'éducation nationale pour l'inscription au Centre national d'enseignement à distance seraient entachées d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ne sont pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité des dispositions contestées.
Sur le décret n° 2022-183 du 15 février 2022 relatif à la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires contre les décisions de refus d'autorisation d'instruction dans la famille :
25. La circonstance que des inspecteurs de l'éducation nationale siègent au sein de la commission et que cette dernière puisse se réunir sans la présence d'un médecin ne saurait caractériser une méconnaissance du principe d'impartialité. B... suite, le moyen tiré de ce que la composition de la commission présenterait un risque de partialité n'est pas de nature, en l'état de l'instruction, à créer un doute sérieux quant à la légalité des dispositions contestées.
26. L'article D. 131-11-10 issu du décret contesté prévoit que toute décision de refus d'instruction dans la famille peut être contestée dans un délai de huit jour à compter de sa notification écrite. L'article D. 131-11-12 prévoit que la commission dispose d'un délai d'un mois maximum pour se réunir à compter de la réception du recours administratif obligatoire et que sa décision est notifiée dans un délai de cinq jours ouvrés à compter de la réunion de la commission. L'association Les Enfants d'Abord fait valoir que les délais laissés à la commission pour statuer conduiront à saisir le juge administratif au mieux trois mois avant le début de l'année scolaire rendant fortement probable que l'issue de la plupart des recours intervienne après le début de l'année scolaire pour laquelle la demande d'autorisation a été formulée. Cette circonstance ne peut toutefois pas être regardée comme portant atteinte au droit à un recours effectif des intéressés alors, qu'au surplus, il leur est loisible d'introduire une demande en référé. En revanche, eu égard à l'impossibilité de saisir la juridiction administrative en cas d'absence de saisine de la commission, le moyen tiré de ce que le délai de huit jours serait trop court et porterait atteinte au droit à un recours effectif est de nature, en l'état de l'instruction, et même si ce délai ne saurait être d'une durée trop importante, pour éviter que la famille ne soit pas informée avant la rentrée scolaire du cadre dans lequel l'instruction de son enfant sera réalisée, à créer un doute sérieux quant à la légalité de ces dispositions.
27. Il résulte de ce qui précède que les requérantes sont fondées à demander la suspension de l'exécution de l'article D. 131-11-10 du code de l'éducation, issu du décret n° 2022-183 du 15 février 2022, en tant qu'il fixe à huit jours à compter de la notification écrite de la décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille pour saisir la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires contre ces décisions.
28. Au titre des requêtes n° 463224 et n° 463324, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement, pour chacune des deux requêtes, de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante au titre de la requête n° 463123, verse à ce titre une somme.
O R D O N N E :
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Article 1er : L'intervention de l'association Liberté éducation - Instruction en famille est admise.
Article 2 : L'exécution de l'article D. 131-11-10 du code de l'éducation, issu du décret n° 2022-183 du 15 février 2022, en tant qu'il fixe à huit jours le délai à compter de la notification écrite de la décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille pour saisir la commission devant laquelle sont formés les recours administratifs préalables obligatoires contre ces décisions est suspendue.
Article 3 : L'Etat versera, pour chacune des requêtes n° 463224 et n° 463324, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de l'association Les Enfants d'Abord et M... A... F... et autres est rejeté.
Article 5: La requête de l'association Union nationale pour l'Instruction et l'Epanouissement est rejetée.
Article 6 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association Union nationale pour l'Instruction et l'Epanouissement, à l'association Les Enfants d'Abord, à A... C... F..., première requérante dénommée dans la requête n° 463324, et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Copie en sera adressée à l'association Liberté éducation - Instruction en famille et au Premier ministre.
Fait à Paris, le 16 mai 2022
Signé : Mathieu Hérondart