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11/05/2022 | FRANCE | N°442707

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 11 mai 2022, 442707


Vu la procédure suivante :

Par une requête et neuf autres mémoires enregistrés les 11 août 2020, 12 et 15 mars, 1er, 4 et 25 mai, 12 juillet, 13 septembre, 18 octobre et 17 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société MEI Partners, Me Jean-Marc Noël, en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, la société européenne Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux et M. B... A... demandent au Conseil d'Etat, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2020 du ministre de l'éco

nomie, des finances et de la relance autorisant la fusion par voie d'absorption de ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et neuf autres mémoires enregistrés les 11 août 2020, 12 et 15 mars, 1er, 4 et 25 mai, 12 juillet, 13 septembre, 18 octobre et 17 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société MEI Partners, Me Jean-Marc Noël, en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, la société européenne Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux et M. B... A... demandent au Conseil d'Etat, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2020 du ministre de l'économie, des finances et de la relance autorisant la fusion par voie d'absorption de la société anonyme Bpifrance par sa filiale la société anonyme Bpifrance Financement ;

2°) d'annuler la décision implicite du ministre refusant d'abroger cet arrêté ;

3°) d'annuler la décision du ministre refusant de notifier à la Commission européenne l'apport d'actifs autorisé par cet arrêté et un nouvel apport d'actifs conforme au droit de l'Union ;

4°) d'enjoindre au ministre d'abroger cet arrêté dans un délai de deux mois, sous astreinte de cinquante millions d'euros par jour de retard ;

5°) d'enjoindre à l'Etat de procéder dans un délai de quinze jours à la récupération des aides octroyées par l'arrêté du 10 décembre 2020, majorée d'intérêts calculés depuis cette date au taux de 5,8221% par an, sous astreinte de cinquante millions d'euros par jour de retard ;

6°) d'enjoindre à l'Etat de notifier dans un délai de deux mois à la Commission européenne un plan de restructuration de l'établissement bancaire Bpifrance, sous astreinte de cinquante millions d'euros par jour de retard ;

7°) d'enjoindre à l'Etat de leur verser, dans un délai de deux jours, l'indemnité légale de gestion d'affaires, sous astreinte de deux millions d'euros par jour de retard ;

8°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 38 ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- l'ordonnance n° 2020-731 du 17 juin 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Emilie Bokdam-Tognetti, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 17 juin 2020 portant réorganisation de la Banque publique d'investissement et modifiant l'ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement (Bpi) : " Au plus tard à l'issue d'un délai de douze mois à compter de la publication de la présente ordonnance, il est procédé à la fusion par voie d'absorption de la société anonyme Bpifrance (...) par sa filiale agréée en tant qu'établissement de crédit (...). / La société résultant de l'opération de fusion mentionnée au premier alinéa vient aux droits et obligations de l'entité absorbée dont elle poursuit l'activité en continuité d'entreprise. Elle est, à compter de la réalisation de la fusion, la société anonyme Bpifrance (...). " Par arrêté du 10 décembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a autorisé cette fusion. Le 13 octobre 2021, la société MEI Partners lui a demandé d'abroger cet arrêté.

2. Eu égard à la teneur de leurs mémoires en demande successifs, la société MEI Partners, Me Noël, en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, la société européenne Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux et M. A... doivent être regardés comme ayant expressément renoncé à leur demande tendant à l'annulation de l'ordonnance du 17 juin 2020 - d'ailleurs ratifiée - ainsi qu'à l'ensemble des mesures de sursis à statuer en vue de saisir la Cour de justice de l'Union européenne, de suspension d'exécution, d'injonction sous astreinte ou de liquidation d'astreinte qu'ils ont sollicitées à titre provisoire au cours de la présente instance.

3. Aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une de ces juridictions administratives, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance, pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions ou pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance. "

4. A l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2020 autorisant la fusion par voie d'absorption de la société anonyme Bpifrance par sa filiale la société anonyme Bpifrance Financement, la société MEI Partners fait valoir qu'elle exerce dans son domaine une activité concurrente de celle de la société résultant de cette fusion. Elle fait également valoir qu'elle détient une créance sur l'Etat, au titre d'une " gestion d'affaires " consistant à réclamer par la voie contentieuse le reversement à l'Etat d'aides d'Etat qui auraient été indûment versées à BPi.

5. Toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier que la société MEI Partners est dépourvue de toute activité réelle au moins depuis le jour de sa mise en liquidation. D'autre part, il ressort des dispositions citées au point 1 qu'à supposer même que des aides d'Etat aient été indûment versées à la BPi, l'opération de fusion autorisée par l'arrêté du 10 décembre 2020 serait dépourvue de toute incidence sur la créance que l'Etat détiendrait à ce titre sur l'établissement fusionné comme, à supposer qu'elle existe, la créance que détiendrait la société MEI Partners sur l'Etat. Il résulte de tout ce qui précède que ni cette société ni son liquidateur judiciaire ne justifient d'un intérêt leur donnant qualité à agir contre l'autorisation attaquée ou les décisions refusant d'abroger cette autorisation et de notifier à la Commission européenne les " apports d'actif " correspondants ou un plan de restructuration de la société Bpifrance. Il en va de même, par voie de conséquence, de M. A..., qui se borne à faire valoir sa qualité d'actionnaire de la société MEI Partners, et de la société Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux, qui se borne à faire valoir sa vocation à succéder aux droits et obligations de la société MEI Partners.

6. Sont par suite entachées d'une irrecevabilité manifeste les conclusions des parties tendant à l'annulation des décisions mentionnées au point 5 ci-dessus, de même que leurs conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre d'abroger l'arrêté attaqué et à l'Etat de procéder à la récupération d'aides octroyées à la société Bpifrance et de notifier à la Commission européenne un plan de restructuration de l'établissement bancaire Bpifrance, ainsi qu'à la condamnation de l'Etat à leur verser l'indemnité légale de gestion d'affaires, qui ne présentent qu'un caractère accessoire à leurs conclusions principales. Il appartient dès lors au Conseil d'Etat, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, de les rejeter en application des dispositions de l'article R. 351-4 du code de justice administrative.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

8. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros ". En l'espèce, la requête de la société MEI Partners, de Me Noël, liquidateur judiciaire de cette société, de la société Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux et de M. A... présente un caractère abusif. Il y a lieu de condamner solidairement les requérants à payer une amende de 6 000 euros.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la société MEI Partners et autres est rejetée.

Article 2 : La société MEI Partners, Me Jean-Marc Noël, en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, la société Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux et M. A... sont condamnés solidairement à payer une amende de 6 000 euros.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SAS MEI Partners, à Me Jean-Marc Noël en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société, à la société européenne Banque-Assurance européenne des droits fondamentaux, à M. B... A..., au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France.

Délibéré à l'issue de la séance du 21 avril 2022 où siégeaient : M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Anne Egerszegi, conseillère d'Etat et Mme Cécile Nissen, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 11 mai 2022.

Le président :

Signé : M. Thomas Andrieu

La rapporteure :

Signé : Mme Cécile Nissen

La secrétaire :

Signé : Mme Fehmida Ghulam


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 442707
Date de la décision : 11/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 mai. 2022, n° 442707
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Nissen
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:442707.20220511
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