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14/04/2022 | FRANCE | N°452307

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 14 avril 2022, 452307


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 mai et 2 juillet 2021 et le 21 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société TCA Assurances demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 9 mars 2021 par laquelle le collège de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution lui a adressé une mise en garde, sur le fondement de l'article L. 612-30 du code monétaire et financier, à l'encontre de la poursuite de pratiques tenant à la commu

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Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 mai et 2 juillet 2021 et le 21 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société TCA Assurances demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 9 mars 2021 par laquelle le collège de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution lui a adressé une mise en garde, sur le fondement de l'article L. 612-30 du code monétaire et financier, à l'encontre de la poursuite de pratiques tenant à la communication d'informations inexactes ou imprécises concernant la solvabilité de la société d'assurance de droit danois Gefion Insurance et au renouvellement anticipé de contrats d'assurance souscrits auprès de cet assureur partenaire ;

2°) d'enjoindre à l'Autorité de retirer toute publication faisant référence à cette mise en garde et de publier sur son site internet une mention indiquant que sa décision a été annulée ;

3°) de mettre à la charge de cette autorité la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 ;

- le code monétaire et financier ;

- le code des assurances ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Duhamel - Rameix - Gury - Maître, avocat de la société TCA Assurances et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 24 mars 2022, présentée pour la société TCA Assurances ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 28 mars 2022, présentée pour l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ;

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, aux termes du IV de l'article L. 612-1 du code monétaire et financier : " Pour l'accomplissement de ses missions, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (...) peut (...) porter à la connaissance du public toute information qu'elle estime nécessaire à l'accomplissement de ses missions (...) ". Aux termes de l'article L. 612-30 du même code : " Lorsqu'elle constate qu'une personne soumise à son contrôle a des pratiques susceptibles de mettre en danger les intérêts de ses clients, assurés, adhérents ou bénéficiaires, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut, après avoir mis ses dirigeants en mesure de présenter leurs explications, la mettre en garde à l'encontre de la poursuite de ces pratiques en tant qu'elles portent atteinte aux règles de bonne pratique de la profession concernée. "

2. D'autre part, aux termes du I de l'article L. 521-1 du code des assurances : " Les distributeurs de produits d'assurance agissent de manière honnête, impartiale et professionnelle et ce, au mieux des intérêts du souscripteur ou de l'adhérent. "

3. Il ressort des pièces versées au dossier que la société TCA Assurances, qui exerce une activité de courtier en assurance et qui est spécialisée dans la couverture des risques atypiques et aggravés, était l'un des mandataires de la société Gefion Insurance, compagnie d'assurance de droit danois, laquelle relevait du contrôle de l'autorité de régulation danoise, Finanstilsynet. Il est constant que, le 11 juillet 2019, cette autorité a publié sur la version en langue anglaise de son site internet (Danish Financial Supervisory Authority) un communiqué dans la même langue dans lequel, d'une part, elle évoquait une décision publiée séparément en langue danoise imposant à la société Gefion Insurance une augmentation de capital et dans lequel elle énonçait, d'autre part, que la société Gefion Insurance ne disposait pas de fonds propres suffisants pour couvrir le capital de solvabilité requis et qu'il lui avait été ordonné de ne pas augmenter son volume d'affaires. Par un nouveau communiqué en langue anglaise du 12 décembre 2019, évoquant les sérieux problèmes de liquidités de la société Gefion Insurance, la même autorité soulignait que les intérêts des assurés et des bénéficiaires étaient menacés, et qu'elle avait en conséquence ordonné à la société Gefion Insurance de prendre les mesures nécessaires afin de disposer d'un niveau de liquidités au moins égal à 5 millions d'euros avant la fin du mois de décembre 2019. L'autorité danoise a, à nouveau, porté ces éléments à la connaissance du public le 14 janvier 2020. Il ressort en outre des courriels échangés entre le directeur général de la société TCA Assurances et le représentant de la société Gefion Insurance, que le mandataire français de la société d'assurance danoise ne pouvait ignorer les risques que faisaient peser sur ses clients le manque de liquidités de la société Gefion Insurance ainsi que la non-conformité du capital de solvabilité requis.

4. Au vu de l'ensemble de ces éléments, en estimant, d'une part, que la société TCA Assurances disposait dès le mois de janvier 2020 d'informations explicites sur les problèmes de solvabilité et de liquidités de son partenaire danois, ainsi que sur les risques potentiels pour leurs clients, et, d'autre part, que la société TCA Assurances n'avait pas agi, contrairement à ce que prévoit le I de l'article L. 521-1 du code des assurances cité au point 2 ci-dessus, de manière honnête et professionnelle dans l'intérêt de ces derniers en renouvelant de manière anticipée, au cours des mois de janvier à mars 2020, les contrats souscrits par ses clients auprès de la société Gefion Insurance, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution n'a pas fondé sa mise en garde sur des faits matériellement inexacts, ni entaché sa décision d'erreur d'appréciation.

5. Par ailleurs, il ressort des termes des courriers en date du 2 juillet 2020, adressés par la société TCA Assurances à ses partenaires ainsi qu'à ses clients directs après le retrait de l'agrément de la société Gefion Insurance, que la société requérante n'a pas averti les destinataires de ces courriers des risques que faisait peser sur les assurés l'insuffisante solvabilité et la liquidation de la société Gefion Insurance, mais qu'elle leur a au contraire affirmé que la compagnie danoise continuerait à régler les sinistres dans la mesure où ni sa solvabilité ni l'existence des polices d'assurance n'étaient remises en cause.

6. En estimant que, ce faisant, la société TCA Assurances avait communiqué des informations inexactes ou imprécises sur la solvabilité de la société Gefion Insurance et sur la capacité de cette société à faire face aux sinistres déclarés par ses assurés, et que la société TCA Assurances n'avait pas agi, dans ces conditions, de manière honnête et professionnelle dans l'intérêt de ses clients, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution n'a pas commis d'erreur de fait ni d'erreur d'appréciation.

7. Il résulte de ce qui précède que la société TCA Assurances n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 9 mars 2021 par laquelle l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution lui a adressé la mise en garde contestée, laquelle a été portée à la connaissance du public en application du IV de l'article L. 612-1 du code monétaire et financier cité au point 1. Les conclusions de la requête à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par conséquent, également être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la société TCA Assurances est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société TCA Assurances et à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.

Délibéré à l'issue de la séance du 24 mars 2022 où siégeaient : M. Frédéric Aladjidi, président de chambre, présidant ; M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat et M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat-rapporteur.

Rendu le 14 avril 2022.

Le président :

Signé : M. Frédéric Aladjidi

Le rapporteur :

Signé : M. Nicolas Polge

La secrétaire :

Signé : Mme B... A...


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 452307
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 avr. 2022, n° 452307
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Nicolas Polge
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO et GOULET ; SCP DUHAMEL - RAMEIX - GURY- MAITRE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:452307.20220414
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