Vu la procédure suivante :
M. D... H... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 18 mars 2021 par lequel la ministre des armées a retiré l'arrêté du 12 janvier 2021 portant radiation des cadres à compter du 1er avril 2021 et de la décision du 16 mars 2021 portant non-agrément d'une demande d'admission à la retraite avec le bénéfice d'une pension à liquidation différée.
Par une ordonnance n° 2110559 du 21 mai 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Par un pourvoi, enregistré le 7 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. H... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la défense ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. H... ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Paris que, par deux décisions des 16 et 18 mars 2021, la ministre des armées a refusé d'agréer la demande de M. H... tendant à ce que soit prononcée son admission à la retraite avec le bénéfice d'une pension à liquidation différée et retiré son arrêté du 12 janvier 2021 prononçant la radiation des cadres de l'intéressé à compter du 1er avril 2021. Le 17 mai 2021, M. H... a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la suspension de l'exécution de ces décisions. Par l'ordonnance attaquée, le juge des référés a rejeté sa demande comme irrecevable, par application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative.
3. Aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense ". Aux termes de l'article R. 4125-9 du même code : " La commission recommande au ministre compétent ou, le cas échéant, aux ministres conjointement compétents au sens du II de l'article R. 4125-4, soit de rejeter le recours, soit de l'agréer totalement ou partiellement. Son avis ne lie pas le ministre compétent ou, le cas échéant, les ministres conjointement compétents ". Aux termes de l'article R. 4125-10 du code de la défense : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. (...). / L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission ".
4. L'objet même du référé organisé par les dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de justice administrative est de permettre, dans tous les cas où l'urgence le justifie, la suspension dans les meilleurs délais d'une décision administrative contestée par le demandeur. Une telle possibilité est ouverte y compris dans le cas où un texte législatif ou réglementaire impose l'exercice d'un recours administratif préalable avant de saisir le juge de l'excès de pouvoir, sans donner un caractère suspensif à ce recours obligatoire. Dans une telle hypothèse, la suspension peut être demandée au juge des référés sans attendre que l'administration ait statué sur le recours préalable, dès lors que l'intéressé a justifié, en produisant une copie de ce recours, qu'il a engagé les démarches nécessaires auprès de l'administration pour obtenir l'annulation ou la réformation de la décision contestée. Saisi d'une telle demande de suspension, le juge des référés peut y faire droit si l'urgence justifie la suspension avant même que l'administration ait statué sur le recours préalable et s'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Sauf s'il en décide autrement, la mesure qu'il ordonne en ce sens vaut, au plus tard, jusqu'à l'intervention de la décision administrative prise sur le recours présenté par l'intéressé. Enfin, si une décision implicite ou explicite de rejet de ce recours préalable obligatoire intervient avant qu'il n'ait statué, le juge des référés reste néanmoins saisi si le requérant présente une requête tendant à l'annulation de cette dernière décision et s'il lui en adresse une copie ou si le juge constate qu'elle a été adressée au greffe et la verse au dossier.
5. Si la décision implicite ou explicite statuant sur le recours administratif préalable obligatoire intervient après que le juge des référés a statué sur la demande de suspension de la décision initiale, à laquelle elle se substitue, les conclusions du pourvoi en cassation éventuellement formé contre l'ordonnance du juge des référés deviennent sans objet.
6. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que M. H... a saisi, le 20 avril 2021, la commission de recours des militaires d'un recours administratif préalable contre les décisions prises par la ministre des armées les 16 et 18 mars 2021. La décision ministérielle implicite rejetant ce recours, intervenue au plus tard le 23 août 2021 en application de l'article R. 4125-10 du code de la défense, s'est substituée aux décisions des 16 et 18 mars 2021. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que les conclusions présentées devant le Conseil d'Etat le 7 juin 2021 par M. H..., tendant à l'annulation de l'ordonnance du 21 mai 2021 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que l'exécution de ces décisions initiales soit suspendue, sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer.
7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de M. H... dirigées contre l'ordonnance du 21 mai 2021 du juge des référés du tribunal administratif de Paris.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. H... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. D... H... et à la ministre des armées.
Délibéré à l'issue de la séance du 24 novembre 2021 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. J... K..., M. Olivier Japiot, présidents de chambre ; M. E... N..., Mme A... L..., M. C... I..., M. F... M..., M. Jean-Yves Ollier, conseillers d'Etat et M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 17 décembre 2021.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Guillaume Leforestier
La secrétaire :
Signé : Mme G... B...