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01/07/2021 | FRANCE | N°446511

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 01 juillet 2021, 446511


Vu les procédures suivantes :

I. Mme H... E... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'élection de M. J... E... I... en qualité de maire de la commune de Koungou (Mayotte) qui s'est déroulée le 5 juillet 2020, d'annuler l'élection de M. G... D... B..., candidat inscrit en cinquième position sur la liste " Mawa ", en qualité de conseiller municipal de la commune de Koungou, d'annuler les délibérations du conseil municipal adoptées lors de sa séance du 5 juillet 2020 et d'ordonner la suspension du conseil municipal nouvellement élu. Par un jugement n° 200

0668 du 26 octobre 2020, le tribunal administratif de Mayotte a reje...

Vu les procédures suivantes :

I. Mme H... E... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler l'élection de M. J... E... I... en qualité de maire de la commune de Koungou (Mayotte) qui s'est déroulée le 5 juillet 2020, d'annuler l'élection de M. G... D... B..., candidat inscrit en cinquième position sur la liste " Mawa ", en qualité de conseiller municipal de la commune de Koungou, d'annuler les délibérations du conseil municipal adoptées lors de sa séance du 5 juillet 2020 et d'ordonner la suspension du conseil municipal nouvellement élu. Par un jugement n° 2000668 du 26 octobre 2020, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa protestation.

Sous le n°446511, par une requête enregistrée le 17 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme E... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa protestation ;

3°) de mettre à la charge de M. D... B... et M. E... I... la somme de 2 000 € au titre de l'article L761-1 du code de justice administrative.

II. M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Mayotte d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 28 juin 2020 dans la commune de Koungou (Mayotte). Par un jugement n°s 2000653 et 2000655 du 15 février 2021, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa protestation.

Sous le n° 450699, par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 15 mars et 14 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa protestation .

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code électoral ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'ordonnance n° 2020-390 du 1er avril 2020 ;

- le décret n° 2020-642 du 27 mai 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Prévoteau, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinie, avocat de M. A... C... et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. J... E... I... ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes de Mme E... et de M. C... sont dirigées contre les mêmes opérations électorales. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. A l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées les 21 et 28 juin 2020 pour l'élection des conseillers municipaux de la commune de Koungou (Mayotte), la liste " EPAK " menée par le maire sortant M. E... I... a obtenu 1505 voix soit 38,75% des sondages exprimés et la liste " Mawa " conduite par M. C... 1416 voix soit 36,46% des suffrages exprimés.

Sur la protestation de M. C... :

3. M. C... relève appel du jugement du 15 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales mentionnées au point 2.

4. En premier lieu, le tribunal administratif, qui a écarté les griefs relatifs à l'irrégularité des votes d'électeurs ayant donné procuration et aux irrégularités ayant entaché les opérations électorales dans les bureaux de vote n° 4, 47, 93 et 96 au motif que ces griefs étaient dépourvus de précision suffisante permettant d'en apprécier le bien-fondé, n'était pas tenu, contrairement à ce que soutient le requérant, de faire usage de ses pouvoirs d'instruction, pour apprécier la régularité des votes et des opérations contestées.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R.76-1 du code électoral : " Au fur et à mesure de la réception des procurations, le maire inscrit sur un registre ouvert à cet effet les noms et prénoms du mandant et du mandataire, le nom et la qualité de l'autorité qui a dressé l'acte de procuration et la date de son établissement ainsi que la durée de validité de la procuration. Le registre est tenu à la disposition de tout électeur, y compris le jour du scrutin. Dans chaque bureau de vote, un extrait du registre comportant les mentions relatives aux électeurs du bureau est tenu à la disposition des électeurs le jour du scrutin. (...) ".

6. S'il résulte de l'instruction que le maire a omis, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 76-1 du code électoral, de mentionner le nom et la qualité des autorités ayant établi certaines des procurations établies en vue du second tour, il ne saurait être déduit de l'absence de ces mentions obligatoires, que les 168 procurations mentionnées par M. C... étaient irrégulières et auraient donné lieu à des votes irréguliers.

7. En troisième lieu, M. C... se borne, au soutien du grief dénonçant les irrégularités qui auraient entaché les opérations électorales dans certains bureaux de vote, à faire valoir que l'absence du registre des signatures du 1er tour et le caractère incomplet du registre des procurations entachaient d'irrégularité l'ensemble des votes " dont la vérification était impossible ". Ce grief qui n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa protestation.

Sur la protestation de Mme E... :

9. Mme E..., qui figurait en huitième position sur la liste Mawa, a saisi le tribunal administratif de Mayotte en soutenant qu'elle devait être proclamée élue en qualité de conseiller municipal en remplacement de M. B... placé en cinquième position sur la même liste, au motif que celui-ci aurait " démissionné " de la liste entre les deux tours. Elle demandait ainsi l'annulation de l'élection de M. B... comme conseiller municipal, la proclamation de son élection, l'annulation de l'élection du maire, l'annulation des décisions prises par le conseil municipal lors de sa première séance le 5 juillet 2020 et du procès-verbal de l'élection du maire ainsi que la suspension du conseil municipal nouvellement élu. Mme E... relève appel du jugement du 26 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa protestation.

10. En premier lieu, aux termes de l'article L. 267 du code électoral : " Les déclarations de candidatures doivent être déposées au plus tard : / - pour le premier tour, le troisième jeudi qui précède le jour du scrutin, à dix-huit heures ;/ - pour le second tour, le mardi qui suit le premier tour, à dix-huit heures./ Aucun retrait volontaire ou remplacement de candidat n'est accepté après le dépôt de la liste.(...) " L'article 2 de l'ordonnance du 1er avril 2020 relative au report du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers de la métropole de Lyon de 2020 et à l'établissement de l'aide publique pour 2021 a prévu une période complémentaire de dépôt des déclarations de candidature pour le second tour, dont les dates seraient déterminée par décret. Cet article dispose en outre que " les déclarations de candidature enregistrées avant le mardi 17 mars 2020 à 18 heures en vue du second tour initialement prévu le 22 mars 2020 et pour lesquelles un récépissé définitif a été délivré demeurent valables " et que " dans les communes de 1 000 habitants et plus, les candidatures peuvent être retirées pendant la période complémentaire de dépôt des déclarations de candidature prévue (...). Les retraits de listes complètes comportent la signature de la majorité des candidats de la liste ". La période complémentaire de dépôt des déclarations de candidature a été fixée entre le vendredi 29 mai 2020, à 9 heures, et le mardi 2 juin, à 18 heures par l'article 2 du décret du 27 mai 2020 fixant la date du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon, et portant convocation des électeurs.

11. Il résulte de l'instruction que la liste Mawa pour le second tour, sur laquelle M. B... figurait en cinquième position, a été déposée à la préfecture de Mayotte le lundi 16 mars 2020. Par arrêté du 4 juin 2020, le préfet de Mayotte a publié les listes des candidatures pour le second tour des élections municipales et communautaires au nombre desquelles, pour la commune de Koungou, la liste Mawa sur laquelle M. B... figurait toujours en cinquième position. Dans ces conditions, la seule production d'une lettre non datée, supposément adressée par M. B... à M. C..., tête de la liste, aux termes de laquelle son auteur indiquait " démissionner " de la liste Mawa ne saurait être regardée comme manifestant la volonté de M. B... de retirer sa candidature avant le terme de la période complémentaire fixé au 2 juin 2020.

12. En second lieu, aux termes de l'article L. 270 du code électoral : " (...) / Le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller municipal élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit. / (...) ". Aux termes de l'article L. 2121-4 du code général des collectivités territoriales : " Les démissions des membres du conseil municipal sont adressées au maire. La démission est définitive dès sa réception par le maire, qui en informe immédiatement le représentant de l'Etat dans le département ".

13. Il résulte de l'instruction qu'à l'issue des opérations électorales, M. B..., figurant en cinquième position de la liste Mawa, a été élu conseiller municipal. La seule production d'un bordereau de remise de courrier au timbre de la commune de Koungo, avec la mention " démission " à la place de la signature attendue, faisant état du dépôt d'un courrier de M. B..., le 30 juin 2020, ne saurait établir la remise par M. B... au maire de la commune de sa démission de son mandat de conseiller municipal alors que le maire nouvellement élu a fait valoir en défense devant le tribunal administratif que M. B... ne lui avait adressé aucune lettre de démission. Par suite, en l'absence de siège vacant, Mme E... n'est pas fondée à demander, sur le fondement de l'article L. 270 du code électoral, à être proclamée élue conseillère municipale.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa protestation.

Sur les conclusions présentées par Mme E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge M. D... B... et M. E... I... qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de M. C... et de Mme E... sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... C..., à Mme H... E..., à M. J... E... I..., à M. G... D... B..., à M. F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Mayotte.


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 446511
Date de la décision : 01/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 01 jui. 2021, n° 446511
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Prévoteau
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:446511.20210701
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