Vu la procédure suivante :
Par un mémoire distinct et un nouveau mémoire, enregistrés les 9 avril et 11 juin 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. D... et autres demandent au Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de leur requête tendant à l'annulation du jugement n°2002446 du 18 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé l'élection de MM. D... et Bourge en qualité de conseillers municipaux et proclamé élus Mme C... et M. B..., et, par voie de conséquence, a annulé l'élection de M. D... en qualité de conseiller communautaire de la communauté de communes de Coeur de l'Avesnois et proclamé élu M. A..., de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article L. 228 du code électoral.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance organique n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code électoral, notamment son article L. 228 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Luc Prévoteau, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. Aux termes de l'article L. 228 du code électoral : " Nul ne peut être élu conseiller municipal s'il n'est âgé de dix-huit ans révolus./ Sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l'année de l'élection./ Toutefois, dans les communes de plus de 500 habitants, le nombre des conseillers qui ne résident pas dans la commune au moment de l'élection ne peut excéder le quart des membres du conseil./ Dans les communes de 500 habitants au plus, ce nombre ne peut excéder quatre pour les conseils municipaux comportant sept membres et cinq pour les conseils municipaux comportant onze membres./ Si les chiffres visés ci-dessus sont dépassés, la préférence est déterminée suivant les règles posées à l'article R 121-11 du code des communes ".
3. Eu égard à l'argumentation à l'appui de la question prioritaire de constitutionnalité qu'ils soulèvent, les requérants doivent être regardés comme contestant les seules dispositions du troisième alinéa de l'article L. 228 du code électoral.
4. En premier lieu, les dispositions contestées n'instituent aucune inéligibilité à l'encontre des électeurs qui souhaitent se présenter à l'élection au mandat de conseiller municipal mais qui ne résident pas dans la commune. Elles fixent seulement un plafond de conseillers municipaux qui ne résident pas dans la commune, aux fins de garantir aux habitants de celle-ci, une représentation prépondérante au sein du conseil municipal. La circonstance que les conseillers municipaux qui ne résident pas dans la commune doivent renoncer au bénéfice de leur élection en application de cette règle de plafonnement n'a ni pour objet ni pour effet de porter atteinte à leur droit de se présenter à l'élection.
5. En deuxième lieu, les dispositions contestées ont pu, sans méconnaître le principe d'égalité, ne pas prévoir d'exception à la règle de plafonnement instituée par les dispositions contestées au bénéfice des conseillers municipaux qui résident dans une commune membre de la même intercommunalité que celle dans laquelle ils sont élus, dès lors d'une part, que ces élus sont dans une situation différente de celle des conseillers qui résident dans la commune ou qui, résidant dans des communes éloignées, y effectuent des séjours fréquents et réguliers et que, d'autre part, le conseil municipal est compétent dans les matières qui ne sont pas dévolues à l'intercommunalité.
6. En troisième lieu, la méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la question soulevée par M. D... et autres, qui n'est pas nouvelle, est dépourvue de caractère sérieux. Il n'y a ainsi pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. D... et autres.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. E... D..., premier dénommé, et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.