La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/05/2021 | FRANCE | N°445776

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 27 mai 2021, 445776


Vu la procédure suivante :

Mme AD... J..., Mme AF... M..., Mme P... I..., Mme N... S..., Mme AE... B..., Mme X... C..., Mme AC... A..., Mme E... D..., Mme AH... K..., M. O... V..., M. Y... F..., M. G... W..., M. Q... AG..., M. T... R..., M. AA... U... et M. H... L... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Sauve (Gard), ainsi que l'élection du maire et ses adjoints consécutive au renouvellement du conseil mun

icipal.

Par un jugement n° 2001461 du 29 septembre 2020, le t...

Vu la procédure suivante :

Mme AD... J..., Mme AF... M..., Mme P... I..., Mme N... S..., Mme AE... B..., Mme X... C..., Mme AC... A..., Mme E... D..., Mme AH... K..., M. O... V..., M. Y... F..., M. G... W..., M. Q... AG..., M. T... R..., M. AA... U... et M. H... L... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Sauve (Gard), ainsi que l'élection du maire et ses adjoints consécutive au renouvellement du conseil municipal.

Par un jugement n° 2001461 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif a annulé les opérations électorales du 15 mars 2020 et rejeté le surplus de la protestation.

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 octobre 2020 et 15 février 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. T... Z... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule les opérations électorales du 15 mars 2020 ;

2°) de rejeter dans cette mesure la protestation de Mme J... et autres.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Delsol, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. T... Z... ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Sauve (Gard), la liste " Sauve plurielle " conduite par M. Z... a obtenu 422 voix, soit 52,03% des suffrages exprimés, quinze sièges au conseil municipal et trois sièges au conseil communautaire, tandis que la liste " Sauve, l'avenir ensemble " conduite par Mme J..., maire sortante, a obtenu 389 voix, soit 47,96 % des suffrages exprimés, quatre sièges au conseil municipal et un siège au conseil communautaire. M. Z... relève appel du jugement du 29 septembre 2020 du tribunal administratif de Nîmes en tant que ce jugement, sur la protestation de Mme J..., a annulé ces opérations électorales.

2. Aux termes de l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale ".

3. Il résulte de l'instruction qu'un tract intitulé " Pourquoi avons-nous décidé de ne pas nous représenter avec Mme AB... ' ", signé par des colistiers de M. Z..., a été distribué dans des boîtes aux lettres de la commune lors de la dernière semaine de la campagne électorale, à compter du mardi 10 mars en fin de journée. Si ce tract évoquait en termes alarmistes la gestion et la situation financière de la commune et apportait, par des allégations précises, des éléments nouveaux dans le débat électoral, Mme J... disposait de trois jours pour y répliquer avant la clôture de la campagne. Il n'est d'ailleurs pas contesté qu'elle a eu l'occasion de répondre à cette mise en cause lors d'une réunion publique qui s'est tenue le mercredi 11 mars au soir et par un tract qui a été distribué le vendredi 13 mars. Dans ces conditions, la diffusion, à partir du 10 mars, du tract litigieux n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 48-2 du code électoral et ne peut être regardée comme une manoeuvre susceptible d'avoir altéré les résultats du scrutin.

4. Il résulte de ce qui précède que M. Z... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes s'est fondé sur cette circonstance pour annuler les opérations électorales litigieuses. Il appartient toutefois au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre grief soulevé par les protestataires devant le tribunal.

5. Aux termes de l'article L. 262 du code électoral, applicable aux communes de mille habitants et plus : " Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal à la moitié du nombre des sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l'entier supérieur lorsqu'il y a plus de quatre sièges à pourvoir et à l'entier inférieur lorsqu'il y a moins de quatre sièges à pourvoir. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application des dispositions du troisième alinéa ci-après. / Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un deuxième tour (...) ".

6. Ni par ces dispositions, ni par celles de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, le législateur n'a subordonné à un taux de participation minimal la répartition des sièges au conseil municipal à l'issue du premier tour de scrutin dans les communes de mille habitants et plus, lorsqu'une liste a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés. Le niveau de l'abstention n'est ainsi, par lui-même, pas de nature à remettre en cause les résultats du scrutin, s'il n'a pas altéré, dans les circonstances de l'espèce, sa sincérité.

7. En l'espèce, Mme J... et les autres protestataires font seulement valoir que le taux d'abstention dans la commune, qui s'est élevé à 39,14 %, résulterait des craintes suscitées par l'épidémie de covid-19 et les déclarations des autorités à son sujet. Toutefois, en l'absence de l'invocation d'aucune autre circonstance qui montrerait, en particulier, qu'il aurait été porté atteinte au libre exercice du droit de vote ou à l'égalité entre les candidats, le niveau de l'abstention constatée ne peut être regardé comme ayant altéré la sincérité du scrutin.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. Z... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune de Sauve.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes en date du 29 septembre 2020 est annulé en tant qu'il a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune de Sauve.

Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 dans la commune de Sauve sont validées.

Article 3 : La protestation de Mme AD... J... et autres est rejetée.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. T... Z..., à Mme AD... J..., pour l'ensemble des protestataires, et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 445776
Date de la décision : 27/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 mai. 2021, n° 445776
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno Delsol
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP DELAMARRE, JEHANNIN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:445776.20210527
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award