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27/05/2021 | FRANCE | N°436391

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 27 mai 2021, 436391


Vu la procédure suivante :

M. et Mme L... H..., M. et Mme N... I..., M. et Mme K... J..., Mme E... F..., Mme C...-O... B..., M. et Mme A... M... et M. et Mme G... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le maire de Chanas (Isère) a délivré à la société Vallière un permis de construire vingt logements sur des parcelles situées rue des Guyots, ainsi que sa décision rejetant leur recours gracieux. Par un jugement n°1605456 du 27 septembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ce

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Par un arrêt n°18LY04174 du 1er octobre 2019, la cour adm...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme L... H..., M. et Mme N... I..., M. et Mme K... J..., Mme E... F..., Mme C...-O... B..., M. et Mme A... M... et M. et Mme G... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le maire de Chanas (Isère) a délivré à la société Vallière un permis de construire vingt logements sur des parcelles situées rue des Guyots, ainsi que sa décision rejetant leur recours gracieux. Par un jugement n°1605456 du 27 septembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté.

Par un arrêt n°18LY04174 du 1er octobre 2019, la cour administrative d'appel de Lyon a, sur appel de la société Evally Promotion (anciennement société Vallière), annulé ce jugement et rejeté la demande de M. et Mme H... et autres.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 décembre 2019 et 2 mars 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme H..., M. et Mme I..., M. et Mme J..., Mme F..., Mme B..., M. et Mme M... et M. et Mme D... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la société Evally Promotion ;

3°) de mettre à la charge de la société Evally Promotion la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- l'arrêté du 4 août 2006 portant règlement de la sécurité des canalisations de transport de gaz combustibles, d'hydrocarbures liquides ou liquéfiés et de produits chimiques ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Roulaud, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M et Mme L... H..., de M. et Mme K... J..., de Mme C...-laure B..., de M. et Mme G... D..., de Mme E... F..., de M. et Mme A... M... et de M. et Mme N... I..., à Me Occhipinti, avocat de la société Evally promotion et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la commune de Chanas ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 27 septembre 2018, le tribunal administratif de Grenoble, faisant droit à la demande de M. et Mme H... et autres, a annulé l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le maire de Chanas (Isère) avait délivré à la société Vallière, devenue la société Evally Promotion, un permis de construire des maisons comprenant vingt logements sur des parcelles situées rue des Guyots sur le territoire de la commune, au motif que le projet portait atteinte à la sécurité publique et méconnaissait les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme relatives à la desserte des constructions. Statuant sur l'appel formé par la société Evally Promotion, la cour administrative d'appel de Lyon a, par un arrêt du 1er octobre 2019, annulé ce jugement et rejeté la demande d'annulation du permis présentée par M. et Mme H... et autres. Ceux-ci se pourvoient en cassation contre cet arrêt.

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. " Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteintes à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le projet de construction litigieux se trouve à proximité d'une canalisation de transport de propylène enfouie. Le plan local d'urbanisme de la commune de Chanas prévoit trois zones de dangers autour de cet ouvrage, correspondant respectivement, en cas de rupture de la canalisation, à une zone de dangers significatifs pour la vie humaine, avec des effets irréversibles, dans une bande de 350 mètres de part et d'autre de la canalisation, une zone de dangers graves pour la vie humaine, avec de premiers effets létaux, dans une bande de 150 mètres de part et d'autre de la canalisation et, enfin, une zone de dangers très graves pour la vie humaine, avec des effets létaux significatifs, dans une bande de 120 mètres de part et d'autre de la canalisation. L'article 10 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme dispose qu'il convient de proscrire, dans la zone de dangers graves, la construction ou l'extension d'immeubles de grande hauteur et d'établissements recevant plus de trois cents personnes et, dans la zone de dangers très graves, ceux recevant plus de cent personnes. La totalité du terrain d'assiette du projet est située dans la zone de dangers significatifs, plusieurs maisons se trouvent dans la zone de dangers graves et une de ces maisons est partiellement implantée dans la zone de dangers très graves.

4. D'une part, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour statuer sur la légalité du permis de construire litigieux au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, la cour administrative d'appel a relevé que les occupants des constructions projetées seraient exposés, en cas de rupture de la canalisation de transport de propylène située à proximité du terrain d'assiette du projet, à des effets dommageables irréversibles. Le moyen tiré de ce qu'elle aurait entaché son arrêt d'erreur de droit faute d'avoir pris en compte la gravité des conséquences d'une éventuelle explosion ne peut donc qu'être écarté.

5. D'autre part, en jugeant qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier qui lui était soumis que la situation du terrain d'assiette du projet en zone de sismicité modérée et en zone de risque lié à des ruissellements modéré pourrait entraîner un risque pour la sécurité des futurs occupants des constructions, en elle-même ou par un effet cumulé avec les risques liés à la proximité de la canalisation de transport de propylène, en prenant notamment en compte l'avis favorable donné par le gestionnaire de cet ouvrage, la cour n'a pas fait application de l'arrêté du 4 août 2006 portant règlement de la sécurité des canalisations de transport de gaz combustibles, d'hydrocarbures liquides ou liquéfiés et de produits chimiques, mais s'est prononcée sur la légalité du permis de construire au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. En jugeant que le permis délivré n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, la cour a porté sur l'ensemble des circonstances de l'espèce une appréciation souveraine qui n'est pas entachée de dénaturation.

6. En deuxième lieu, s'il était soutenu devant la cour que le plan de masse joint au dossier de permis comportait des incohérences quant à la délimitation des parties du projet situées dans chacune des différentes zones de danger, c'est au terme d'une appréciation souveraine, qui n'est pas entachée de dénaturation, que la cour a estimé que cette circonstance n'avait pu induire en erreur le service instructeur, qui disposait notamment de l'avis rendu par le gestionnaire de l'ouvrage.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme : " Accès : (...) Toute construction doit être accessible par les véhicules de secours et de lutte contre l'incendie qui nécessitent une largeur minimale de 3 m (...) ".

8. En relevant qu'en l'espèce, au vu de la largeur de plus de trois mètres de la rue des Guyots desservant le terrain d'assiette du projet et de la configuration des lieux, cette voie ainsi que l'accès du projet à cette voie étaient adaptés aux besoins de l'opération, la cour a porté sur les pièces du dossier qui lui était soumis une appréciation souveraine, exempte de dénaturation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de M. et Mme H... et autres doit être rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Chanas et la somme de 2 000 euros à verser à la société Evally Promotion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme H... et autres est rejeté.

Article 2 : M. et Mme H... et autres verseront la somme de 2 000 euros à la commune de Chanas et la somme de 2 000 euros à la société Evally Promotion au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme L... H..., premiers requérants dénommés, à la société Evally Promotion et à la commune de Chanas.

Copie en sera adressée à la ministre de la transition écologique.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 436391
Date de la décision : 27/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 mai. 2021, n° 436391
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Roulaud
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY ; OCCHIPINTI ; SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:436391.20210527
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