Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg :
- d'annuler la décision implicite par laquelle la communauté d'agglomération de Metz Métropole (CA2M) n'a pas transmis à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) sa demande de validation de ses services accomplis en tant qu'agent non titulaire ;
- d'annuler les décisions implicites par lesquelles la CA2M a refusé de transmettre à la CNRACL sa demande de validation de ses services et de lui verser une indemnité correspondant à la perte de pension de retraite résultant de ce refus ;
- d'annuler les décisions des 23 avril et 27 juin 2013, par lesquelles la CNRACL a refusé de valider ses services, et la décision implicite du 5 février 2015 par laquelle la CNRACL a refusé de lui verser une indemnité correspondant à la perte de pension de retraite résultant de ce refus ;
- de condamner solidairement la CA2M et la Caisse des dépôts et consignations à lui verser une somme de 169 274 euros en indemnisation de son préjudice financier et une somme de 5 000 euros en indemnisation de son préjudice moral, assorties des intérêts à compter du 27 novembre 2013 et de la capitalisation des intérêts.
Par un jugement n°s 1302482, 1304670, 1403088, 1500798, 1501672 du 30 mai 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes.
Par un arrêt n° 17NC02022 du 3 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. A... contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et trois nouveaux mémoires, enregistrés les 5 décembre 2019, 5 mars 2020, 4 et 23 décembre 2020 et 26 janvier 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la sécurité sociale ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 ;
- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
- le décret n° 2006-708 du 19 juin 2006;
- le décret n° 2007-173 du 7 février 2007 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Yohann Bouquerel, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Me Balat, avocat de M. A..., à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la communauté d'agglomération de Metz Métropole et à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A..., après avoir été recruté le 19 février 1990 par la commune de Bobigny en tant qu'ingénieur subdivisionnaire, a été nommé stagiaire le 1er mars 1993 à la suite de sa réussite au concours externe d'ingénieur subdivisionnaire territorial et titularisé le 1er mars 1994. Par un courrier du 12 septembre 1994, il a demandé à la commune de Bobigny la validation au titre de ses droits à retraite de ses services effectués en qualité d'agent non titulaire pour la période comprise entre le 19 février 1990 et le 28 février 1993. Le 18 décembre 1995, l'intéressé a été recruté par le syndicat intercommunal à vocation multiple (SIVOM) de l'agglomération messine, aux droits duquel sont venus la communauté d'agglomération de Metz Métropole (CA2M) puis Metz Métropole. Par une décision du 23 avril 2013, confirmée le 27 juin 2013 à la suite d'un recours gracieux de M. A..., la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a rejeté comme tardive la nouvelle demande de validation de services présentée par l'intéressé le 21 décembre 2012. Par cinq requêtes, M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, notamment, d'annuler ces décisions de la CNRACL et de condamner solidairement la Caisse des dépôts et consignations et la CA2M à lui verser une indemnité de 169 274 euros au titre du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de l'absence de validation des services en cause, ainsi qu'une indemnité de 5 000 euros au titre de son préjudice moral. Par un jugement du 30 mai 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes. M. A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 octobre 2019 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son appel contre ce jugement.
Sur l'arrêt attaqué en tant qu'il rejette comme manifestement irrecevables les conclusions tendant à l'annulation des décisions de la CNRACL des 23 avril et 27 juin 2013 :
2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / (...) 7° Sur les litiges en matière de pensions ; (...) ". Le recours juridictionnel exercé contre une décision par laquelle le directeur de la CNRACL rejette une demande de validation de services entre dans la catégorie des litiges relatifs aux pensions pour lesquels, en application des dispositions du 7° de l'article R. 811-1 précité du code de justice administrative, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort.
3. Toutefois aux termes de l'article R. 351-4 du même code : " Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi (...) une cour administrative d'appel (...) relève de la compétence d'une juridiction administrative, (...) la cour administrative d'appel (...) est compétent [e], nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, (...) pour rejeter la requête en se fondant sur l'irrecevabilité manifeste de la demande de première instance ". Et aux termes de l'article R. 411-1 du même code, la requête " (...) contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge./ L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".
4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Nancy a relevé que M. A... n'a présenté devant le tribunal administratif de Strasbourg, dans le délai de recours contentieux, aucun moyen spécifique au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation des décisions de la CNRACL des 23 avril et 27 juin 2013 refusant de valider ses services. Compte tenu de cette appréciation souveraine, non arguée de dénaturation, des écritures du requérant, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en rejetant ces conclusions comme manifestement irrecevables en application des dispositions citées au point 3, alors même que le tribunal n'avait pas relevé cette irrecevabilité.
Sur l'arrêt attaqué en tant qu'il statue sur les conclusions indemnitaires dirigées contre Metz Métropole et la Caisse des dépôts et consignations :
5. Revêtent également le caractère d'un litige en matière de pensions, pour l'application du 7° de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, les actions indemnitaires portant sur un refus de validation de services, quel que soit le montant des indemnités demandées.
6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la CA2M et la Caisse des dépôts et consignations à lui verser une indemnité en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait du refus de validation par la CNRACL des services qu'il a accomplis en tant qu'agent non titulaire entre le 19 février 1990 et le 28 février 1993. Ses conclusions présentées devant la cour administrative d'appel de Nancy tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 30 mai 2017 en tant qu'il a rejeté ces conclusions indemnitaires, revêtaient le caractère d'un pourvoi en cassation. Par suite, en statuant sur ces conclusions, la cour a méconnu les règles régissant sa compétence. Dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi de M. A..., son arrêt doit être annulé dans cette mesure.
7. Il appartient au Conseil d'Etat de statuer, en tant que juge de cassation et dans cette mesure, sur le pourvoi formé par M. A... contre le jugement du 30 mai 2017 du tribunal administratif de Strasbourg.
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires dirigées contre Metz Métropole :
8. En premier lieu, aux termes de l'article 8 du décret du 9 septembre 1965 relatif au régime de retraite des tributaires de la CNRACL, dans sa version applicable au litige : " Les services pris en compte dans la constitution du droit à pension sont :/ (...) 3° Les services dûment validés rendus en qualité d'auxiliaire, de temporaire, d'aide ou de contractuel dans une collectivité affiliée à la caisse nationale de retraites (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier soumis au tribunal administratif que M. A... s'est borné, devant lui, à fournir la copie de son courrier, adressé au maire de Bobigny le 12 septembre 1994, tendant à la validation des services qu'il a effectués en tant qu'agent non titulaire pour la période comprise entre le 19 février 1990 et le 28 février 1993. Par suite, en jugeant qu'il n'était pas établi que cette demande avait été effectivement transmise à la CA2M, venant aux droits du SIVOM de l'agglomération messine, le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis.
10. En deuxième lieu, il ne ressort pas des énonciations du jugement attaqué que le tribunal administratif aurait jugé qu'un agent doit renouveler sa demande de validation de services à chaque fois qu'il change d'employeur. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il aurait commis une erreur de droit sur ce point ne peut qu'être écarté.
11. En dernier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable entre le 12 septembre 1994, date de la demande de validation en litige, et le 22 août 2003 : " Les caisses et services gestionnaires de l'assurance vieillesse sont tenus d'adresser périodiquement, à titre de renseignement, à leurs ressortissants, les informations nécessaires à la vérification de leur situation au regard des régimes dont ils relèvent. La périodicité de cette information devra être, en tout état de cause, de durée inférieure au délai de prescription des créances afférentes aux cotisations sociales. / Sans préjudice des dispositions de l'alinéa précédent, les caisses et services gestionnaires des régimes de base obligatoires d'assurance vieillesse sont tenus d'adresser à leurs ressortissants, au plus tard avant un âge fixé par décret en Conseil d'Etat, un relevé de leur compte mentionnant notamment les durées d'assurance ou d'activité prises en compte pour la détermination de leurs droits à pension de retraite ". Aux termes du même article, dans sa rédaction applicable entre le 22 août 2003 et le 1er juillet 2010 : " Toute personne a le droit d'obtenir, dans des conditions précisées par décret, un relevé de sa situation individuelle au regard de l'ensemble des droits qu'elle s'est constitués dans les régimes de retraite légalement obligatoires. / Les régimes de retraite légalement obligatoires (...) sont tenus d'adresser périodiquement, à titre de renseignement, un relevé de la situation individuelle de l'assuré au regard de l'ensemble des droits qu'il s'est constitués dans ces régimes. Les conditions d'application du présent alinéa sont définies par décret. / Dans des conditions fixées par décret, à partir d'un certain âge et selon une périodicité déterminée par le décret susmentionné, chaque personne reçoit, d'un des régimes auquel elle est ou a été affiliée, une estimation indicative globale du montant des pensions de retraite auxquelles les durées d'assurance, de services ou les points qu'elle totalise lui donnent droit, à la date à laquelle la liquidation pourra intervenir, eu égard aux dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles en vigueur. (...) ".
12. D'autre part, aux termes de l'article 8 du décret du 7 février 2007 relatif à la CNRACL : " Afin d'assurer la mise en oeuvre du droit à l'information prévu à l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale, les employeurs des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale ont l'obligation de lui transmettre tout au long de leur période d'affiliation les informations relatives à leur carrière et à leur situation familiale et qui sont nécessaires à la mise en oeuvre de ce droit ".
13. Le requérant ne peut utilement soutenir que le tribunal administratif aurait commis une erreur de droit en jugeant que la CA2M n'a pas méconnu les dispositions citées aux points 11 et 12, dès lors que celles de l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale ne font peser des obligations que sur les organismes gestionnaires de l'assurance vieillesse et non sur les employeurs, et que celles du décret du 7 février 2007 ne prévoient pas davantage d'obligation d'information individuelle des agents par leur employeur.
En ce qui concerne les conclusions indemnitaires dirigées contre la Caisse des dépôts et consignations :
14. Aux termes du I de l'article 50 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la CNRACL, dans sa version applicable au litige : " La validation des services visés à l'article 8 doit être demandée dans les deux années qui suivent la date de la notification de la titularisation. (...) ". Aux termes du I de l'article 65 du même décret : " Par dérogation au délai prévu dans la première phrase du premier alinéa du I de l'article 50, la validation de services définie dans cet alinéa, lorsque la titularisation (...) est antérieure au 1er janvier 2004, doit être demandée avant la radiation des cadres et jusqu'au 31 décembre 2008 ". Il résulte de ces dispositions que la demande de validation de ses services accomplis entre le 19 février 1990 et le 28 février 1993 devait être présentée par M. A... avant le 31 décembre 2008.
15. D'une part, il ne résulte pas des dispositions de l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable entre le 12 septembre 1994 et le 22 août 2003, citées au point 11, que la CNRACL aurait été tenue de donner à ses ressortissants une information individualisée sur les droits spécifiques qu'ils pouvaient éventuellement revendiquer en application des textes législatifs et réglementaires relatifs aux pensions civiles et militaires de retraite. D'autre part, s'agissant de la période comprise entre le 23 août 2003 et le 31 décembre 2008, il résulte des dispositions du même article dans leur version alors applicable, également citées au point 11, que la CNRACL était tenue d'adresser un relevé de situation individuelle aux seuls bénéficiaires ayant atteint l'âge fixé par le décret du 19 juin 2006 relatif aux modalités et au calendrier de mise en oeuvre du droit des assurés à l'information sur leur retraite. Aux termes de l'article 3 de ce décret : " Les obligations incombant aux organismes ou services en application de l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale sont mises en oeuvre de manière progressive selon le calendrier fixé au présent article : 1° Le relevé de situation individuelle prévu au deuxième alinéa de l'article L. 161-17 est adressé chaque année à partir des dates limites suivantes :/ a) 1er juillet 2007 pour les bénéficiaires atteignant l'âge de cinquante ans au cours de l'année 2007 ;/ b) 1er juillet 2008 pour les bénéficiaires atteignant l'âge de quarante-cinq ans ou de cinquante ans au cours de l'année 2008 ;/ c) 1er juillet 2009 pour les bénéficiaires atteignant les âges de quarante, quarante-cinq ou cinquante ans au cours de l'année 2009 ".
16. Il suit de là qu'en jugeant que la CNRACL n'était pas tenue, avant le 31 décembre 2008, de transmettre au requérant, né en 1965 et qui, dès lors, n'avait pas atteint la limite d'âge fixée pour l'envoi d'un relevé de situation individuelle au cours de l'année 2007 ou de l'année 2008 par l'article 3 du décret du 19 juin 2006, une information individuelle concernant les droits qu'il s'était constitué dans les différents régimes de retraite, le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas commis d'erreur de droit.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du 30 mai 2017 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires dirigées contre Metz Métropole et la Caisse des dépôts et consignations.
18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 3 octobre 2019 de la cour administrative d'appel de Nancy est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions indemnitaires dirigées contre Metz Métropole et la Caisse des dépôts et consignations.
Article 2 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. A... dirigé contre l'arrêt du 3 octobre 2019 de la cour administrative d'appel de Nancy et son pourvoi dirigé contre le jugement du 30 mai 2017 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a statué sur les conclusions indemnitaires dirigées contre Metz Métropole et la Caisse des dépôts et consignations sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions présentées par la Caisse des dépôts et consignations et par Metz Métropole sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., à la Caisse des dépôts et Consignations et à Metz Métropole.