Vu la procédure suivante :
Par un arrêt n° 19VE02432 du 10 novembre 2020, enregistré le 13 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Versailles, avant de statuer sur la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 4 juin 2019 annulant son arrêté du
13 décembre 2018 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a décidé, en application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmettre le dossier de cette requête au Conseil d'Etat, en soumettant à son examen les questions suivantes :
1°) Les périodes d'incarcération peuvent-elles être assimilées à des périodes de résidence habituelle en France au sens du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que la personne incarcérée ne peut plus être regardée comme résidant en France de son propre gré '
2°) Dans la négative, selon quelles modalités faut-il tenir compte d'une période d'emprisonnement sur la continuité du séjour en France, eu égard notamment à la gravité des faits à l'origine de la condamnation, et à la durée de la peine '
Des observations, enregistrées le 22 janvier 2021, ont été présentées par le ministre de l'intérieur.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- Le rapport de Mme Stéphanie Vera, maître des requêtes en service extraordinaire,
- Les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public ;
REND L'AVIS SUIVANT
1. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 2° L'étranger qui justifie par tous moyens résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans (...) ".
2. Il résulte de ces dispositions que le législateur a entendu protéger de l'éloignement les étrangers qui sont en France depuis l'enfance, à raison de leur âge d'entrée et d'établissement sur le territoire. D'ailleurs, cette protection, en ce qui les concerne, vaut aussi à l'égard des mesures d'expulsion en application du 1° de l'article L. 521-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous réserve de comportements particulièrement graves que cet article énumère limitativement. Dans ce cadre, les éventuelles périodes d'incarcération en France, si elles ne peuvent être prises en compte dans le calcul d'une durée de résidence, ne sont pas de nature à remettre en cause la continuité de la résidence habituelle en France depuis au plus l'âge de treize ans, alors même qu'elles emportent, pour une partie de la période de présence sur le territoire, une obligation de résidence, pour l'intéressé, ne résultant pas d'un choix délibéré de sa part.
3. Il résulte de ce qui précède que la seconde question posée par la cour administrative d'appel de Versailles est sans objet.
4. Le présent avis sera notifié à la cour administrative d'appel de Versailles, au ministre de l'intérieur et à M. A.... Il sera publié au Journal officiel de la République française.