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02/04/2021 | FRANCE | N°433017

France | France, Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 02 avril 2021, 433017


Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance n° 1912225 du 24 juillet 2019, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête, enregistrée le 8 juin 2019 au greffe de ce tribunal, du Syndicat national des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et des collectivités territoriales - Force Ouvrière (SNITPECT-FO).

Par cette requête et par un mémoire en réplique, enregistré le 10 mars 2

021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le SNITPECT-FO demand...

Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance n° 1912225 du 24 juillet 2019, enregistrée le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête, enregistrée le 8 juin 2019 au greffe de ce tribunal, du Syndicat national des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et des collectivités territoriales - Force Ouvrière (SNITPECT-FO).

Par cette requête et par un mémoire en réplique, enregistré le 10 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le SNITPECT-FO demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'action et des comptes publics ont rejeté sa demande du 25 mars 2019 tendant à l'application, aux inspecteurs des affaires maritimes ayant intégré le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat, du régime indemnitaire de ce corps ;

2°) d'enjoindre à l'autorité compétente d'abroger les dispositions du quatrième alinéa de l'article 3 du décret n° 2012-1494 du 27 décembre 2012, dans le délai de trois mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le décret n° 2012-1494 du 27 décembre 2012 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le décret n° 2018-282 du 18 avril 2018 ;

- le décret n° 2018-623 du 17 juillet 2018 ;

- le décret n° 2020-771 du 24 juin 2020 ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Ranquet, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) dans la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, d'autre part, d'un complément indemnitaire annuel lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, dans les conditions fixées par le présent décret./ Des arrêtés du ministre chargé de la fonction publique, du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé fixent, après avis du comité technique compétent ou du Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat, la liste des corps et emplois bénéficiant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, le cas échéant, du complément indemnitaire annuel mentionné à l'alinéa précédent./ (...) ". L'article 2 du même décret prévoit qu'un arrêté des mêmes ministres fixe, pour chaque corps, le nombre de groupes de fonctions et les montants minimaux et maximaux de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise. Le décret du 24 juin 2020 portant modification de ce décret en a abrogé l'article 7, qui disposait dans sa dernière version en vigueur : " III. - Nonobstant les dispositions de l'article 1er, un arrêté des ministres chargés de la fonction publique et du budget énumère (...) :/ 1° Les corps et emplois qui (...) bénéficient des dispositions du présent décret au-delà du 1er janvier 2017 et, au plus tard, soit le 1er juillet 2017, soit le 1er septembre 2017, soit le 1er janvier 2018, soit le 1er janvier 2019, soit le 1er janvier 2020. (...) ".

2. Un arrêté du 18 décembre 2015 a rendu les dispositions du décret du 20 mai 2014 applicables, à compter du 1er janvier 2016, au corps des inspecteurs des affaires maritimes. En revanche, si le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat a figuré, en vertu de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris en application de l'article 7 de ce décret, au nombre des corps mentionnés au 1° du III de cet article pour lesquels la " date limite d'adhésion " était fixée au 1er janvier 2020, le régime indemnitaire propre à ce corps est demeuré en vigueur en l'absence d'intervention de l'arrêté nécessaire en vertu de l'article 2 du même décret pour l'application à ce corps du RIFSEEP, y compris après la date du 1er janvier 2020. Depuis l'abrogation de l'article 7 du décret du 20 mai 2014 par le décret du 24 juin 2020 et l'abrogation, par un arrêté du même jour, de l'arrêté du 27 décembre 2016, aucune disposition réglementaire n'énonce en outre d'échéance à laquelle le RIFSEEP devrait être appliqué au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat.

3. D'autre part, un décret du 18 avril 2018 a organisé l'intégration des membres du corps des inspecteurs des affaires maritimes, selon la nature des fonctions qu'ils exerçaient, soit dans le corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat, soit dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat. L'article 3 du décret du 17 juillet 2018 modifiant les décrets du 25 août 2003 et du 27 décembre 2012 relatifs à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement a ajouté, à l'article 3 du décret du 27 décembre 2012, un alinéa aux termes duquel : " Les inspecteurs des affaires maritimes intégrés dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat en application des dispositions du décret n° 2018-282 du 18 avril 2018 portant intégration des membres du corps des inspecteurs des affaires maritimes dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat ou dans le corps interministériel des attachés d'administration de l'Etat continuent de bénéficier, dès leur intégration dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'État, du régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel institué par le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 modifié portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat ".

4. Le Syndicat national des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et des collectivités territoriales - Force Ouvrière (SNITPECT-FO) a demandé le 25 mars 2019 au Premier ministre, au ministre de la transition écologique et solidaire et au ministre de l'action et des comptes publics d'appliquer, aux inspecteurs des affaires maritimes ayant intégré le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat, le régime indemnitaire propre à ce corps, demeuré en vigueur dans les conditions mentionnées au point 2, et non le RIFSEEP maintenu aux intéressés par les dispositions de l'article 3 du décret du 27 décembre 2012 issues du décret du 17 juillet 2018. Ce faisant, il doit être regardé comme ayant demandé l'abrogation de ces dernières dispositions en vue de l'adoption d'un régime indemnitaire commun à tous les membres de ce corps. Il demande l'annulation en excès de pouvoir de la décision implicite, née du silence gardé par l'administration, rejetant cette demande.

5. L'égalité de traitement à laquelle ont droit les agents d'un même corps ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes, en particulier en instituant des régimes indemnitaires tenant compte de fonctions, de responsabilités ou de sujétions particulières ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit. L'intérêt général qui s'attache à la création de corps interministériels ou ministériels par la fusion de corps existants justifie ainsi le maintien de régimes indemnitaires différents au sein du nouveau corps, qui ne tiennent pas à la particularité des fonctions, responsabilités ou sujétions dès lors qu'une telle différence, ayant pour objet de faciliter la création du corps, disparaît à l'issue d'une période de transition d'une durée raisonnable.

6. Il ressort des pièces du dossier que la décision de maintenir aux agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes le RIFSEEP dont ils bénéficiaient avant leur intégration dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat était liée à leur incorporation dans ce corps et à la perspective, qui était alors prévue par l'article 7 du décret du 20 mai 2014, de l'application du RIFSEEP à l'ensemble des ingénieurs des travaux publics de l'Etat. Toutefois, il résulte de ce qui a été dit aux points 1 et 2 que depuis l'intervention du décret du 24 juin 2020 mentionné ci-dessus, cette application n'est plus prévue, de sorte que les agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes ont au contraire vocation, comme la ministre de la transition écologique le reconnaît au demeurant, à se voir appliquer le régime indemnitaire propre au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat. Pour apprécier si, à la date de la présente décision, la période de transition pendant laquelle des régimes indemnitaires différents sont maintenus au sein du même corps s'est prolongée au-delà d'une durée raisonnable, il n'y a dès lors plus lieu de tenir compte de la difficulté qu'aurait présenté, pour l'administration, l'application du RIFSEEP à l'ensemble du corps, mais uniquement de celle que présente, une fois cette perspective écartée, l'application aux agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes du régime propre au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat. A cet égard, la ministre de la transition écologique fait valoir que cette application doit encore être différée, pour éviter que les agents intéressés voient le montant des primes versées se réduire pendant la première année d'application de leur nouveau régime indemnitaire, jusqu'à ce que les dispositions régissant l'indemnité spécifique de service, servie entre autres aux ingénieurs des travaux publics de l'Etat, soient modifiées pour prévoir son versement au titre de l'année en cours et non, comme actuellement, l'année suivant celle correspondant au service rendu, et que les outils informatiques de paie soient adaptés à cette fin. Ces considérations ne sont toutefois pas de nature à justifier, à la date de la présente décision, le maintien de la différence de traitement litigieuse, dès lors qu'il est loisible au pouvoir réglementaire, pour prévenir tout risque de discontinuité dans le versement de leurs primes aux agents intéressés, de prévoir des mesures transitoires assorties, au besoin, au terme de cette transition, d'une régularisation assurant effectivement à ces agents une égalité de traitement avec les autres agents du même corps pendant cette transition. Dans ces conditions, le syndicat requérant est fondé à soutenir que la différence de traitement critiquée s'est prolongée, à la date de la présente décision, pendant une durée qui excède le délai raisonnable pendant lequel une telle différence de traitement pouvait être regardée comme justifiée par un motif d'intérêt général, et que le pouvoir réglementaire ne peut maintenir en vigueur les dispositions dont l'abrogation est demandée sans méconnaître le principe d'égalité.

7. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de sa requête, le SNITPECT-FO est fondé à demander l'annulation de la décision implicite rejetant sa demande tendant à l'abrogation de ces dispositions en vue de l'adoption d'un régime indemnitaire commun à tous les membres du corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat.

8. L'annulation de cette décision implique nécessairement que le pouvoir réglementaire abroge, au besoin dans les conditions précisées au point 6, les dispositions du quatrième alinéa de l'article 3 du décret du 27 décembre 2012 modifiant le décret du 25 août 2003 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement. Il y a donc lieu, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'ordonner l'édiction de cette mesure dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser au SNITPECT-FO au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La décision implicite par laquelle le ministre de la transition écologique et solidaire et le ministre de l'action et des comptes publics ont rejeté la demande du SNITPECT-FO du 25 mars 2019 tendant à l'abrogation des dispositions du quatrième alinéa de l'article 3 du décret n° 2012-1494 du 27 décembre 2012 modifiant le décret n° 2003-799 du 25 août 2003 relatif à l'indemnité spécifique de service allouée aux ingénieurs des ponts, des eaux et des forêts et aux fonctionnaires des corps techniques de l'équipement est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au Premier ministre de prononcer, dans le délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision et au besoin dans les conditions précisées au point 6 de ses motifs, l'abrogation mentionnée à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat versera au SNITPECT-FO la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national des ingénieurs des travaux publics de l'Etat et des collectivités territoriales - Force Ouvrière (SNITPECT-FO), au Premier ministre, à la ministre de la transition écologique et à la ministre de la transformation et de la fonction publiques.


Synthèse
Formation : 3ème - 8ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 433017
Date de la décision : 02/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA RÈGLE DE DROIT - PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT - ÉGALITÉ DEVANT LE SERVICE PUBLIC - ÉGALITÉ DE TRAITEMENT DES AGENTS PUBLICS - EGALITÉ DE TRAITEMENT DES AGENTS D'UN MÊME CORPS - DÉROGATION POSSIBLE POUR DES RAISONS D'INTÉRÊT GÉNÉRAL - DÉCISION DE MAINTENIR AUX MEMBRES D'UN CORPS SUPPRIMÉ ET INTÉGRÉS DANS UN CORPS EXISTANT LE RÉGIME INDEMNITAIRE ANTÉRIEUR À LEUR INTÉGRATION [RJ1] - APPLICATION - MAINTIEN DU RIFSEEP PROPRE AUX INSPECTEURS DES AFFAIRES MARITIMES MALGRÉ LEUR INCORPORATION DANS LE CORPS DES INGÉNIEURS DES TRAVAUX PUBLICS DE L'ETAT - MAINTIEN N'ÉTANT PLUS JUSTIFIÉ PAR LA PERSPECTIVE DE LA CRÉATION D'UN RIFSEEP COMMUN À TOUT CE CORPS - CONSÉQUENCE - ILLÉGALITÉ DU MAINTIEN DE LA DIFFÉRENCE DE TRAITEMENT AU-DELÀ DE LA DURÉE RAISONNABLE DE LA PÉRIODE DE TRANSITION.

01-04-03-03-02 La décision de maintenir aux agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) dont ils bénéficiaient avant leur intégration dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat était liée à leur incorporation dans ce corps et à la perspective, qui était alors prévue par l'article 7 du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014, de l'application du RIFSEEP à l'ensemble des ingénieurs des travaux publics de l'Etat.,,,Toutefois, depuis l'intervention du décret n° 2020-771 du 24 juin 2020, cette application n'est plus prévue, de sorte que les agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes ont au contraire vocation à se voir appliquer le régime indemnitaire propre au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat. Pour apprécier si, à la date de la présente décision, la période de transition pendant laquelle des régimes indemnitaires différents sont maintenus au sein du même corps s'est prolongée au-delà d'une durée raisonnable, il n'y a dès lors plus lieu de tenir compte de la difficulté qu'aurait présenté, pour l'administration, l'application du RIFSEEP à l'ensemble du corps, mais uniquement de celle que présente, une fois cette perspective écartée, l'application aux agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes du régime propre au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat.,,,A cet égard, le ministre chargé de l'environnement fait valoir que cette application doit encore être différée, pour éviter que les agents intéressés voient le montant des primes versées se réduire pendant la première année d'application de leur nouveau régime indemnitaire, jusqu'à ce que les dispositions régissant l'indemnité spécifique de service, servie entre autres aux ingénieurs des travaux publics de l'Etat, soient modifiées pour prévoir son versement au titre de l'année en cours et non, comme actuellement, l'année suivant celle correspondant au service rendu, et que les outils informatiques de paie soient adaptés à cette fin. Ces considérations ne sont toutefois pas de nature à justifier, à la date de la présente décision, le maintien de la différence de traitement litigieuse, dès lors qu'il est loisible au pouvoir réglementaire, pour prévenir tout risque de discontinuité dans le versement de leurs primes aux agents intéressés, de prévoir des mesures transitoires assorties, au besoin, au terme de cette transition, d'une régularisation assurant effectivement à ces agents une égalité de traitement avec les autres agents du même corps pendant cette transition. Dans ces conditions, la différence de traitement critiquée s'est prolongée, à la date de la présente décision, pendant une durée qui excède le délai raisonnable pendant lequel une telle différence de traitement peut être regardée comme justifiée par un motif d'intérêt général, et le pouvoir réglementaire ne peut maintenir en vigueur les dispositions dont l'abrogation est demandée sans méconnaître le principe d'égalité.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CADRES ET EMPLOIS - EGALITÉ DE TRAITEMENT ENTRE AGENTS D'UN MÊME CORPS - DÉROGATION POSSIBLE POUR DES RAISONS D'INTÉRÊT GÉNÉRAL - DÉCISION DE MAINTENIR AUX MEMBRES D'UN CORPS SUPPRIMÉ ET INTÉGRÉS DANS UN CORPS EXISTANT LE RÉGIME INDEMNITAIRE ANTÉRIEUR À LEUR INTÉGRATION [RJ1] - APPLICATION - MAINTIEN DU RIFSEEP PROPRE AUX INSPECTEURS DES AFFAIRES MARITIMES MALGRÉ LEUR INCORPORATION DANS LE CORPS DES INGÉNIEURS DES TRAVAUX PUBLICS DE L'ETAT - MAINTIEN N'ÉTANT PLUS JUSTIFIÉ PAR LA PERSPECTIVE DE LA CRÉATION D'UN RIFSEEP COMMUN À TOUT CE CORPS - CONSÉQUENCE - ILLÉGALITÉ DU MAINTIEN DE LA DIFFÉRENCE DE TRAITEMENT AU-DELÀ DE LA DURÉE RAISONNABLE DE LA PÉRIODE DE TRANSITION.

36-02-05 La décision de maintenir aux agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) dont ils bénéficiaient avant leur intégration dans le corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat était liée à leur incorporation dans ce corps et à la perspective, qui était alors prévue par l'article 7 du décret n° 2014-513 du 20 mai 2014, de l'application du RIFSEEP à l'ensemble des ingénieurs des travaux publics de l'Etat.,,,Toutefois, depuis l'intervention du décret n° 2020-771 du 24 juin 2020, cette application n'est plus prévue, de sorte que les agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes ont au contraire vocation à se voir appliquer le régime indemnitaire propre au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat. Pour apprécier si, à la date de la présente décision, la période de transition pendant laquelle des régimes indemnitaires différents sont maintenus au sein du même corps s'est prolongée au-delà d'une durée raisonnable, il n'y a dès lors plus lieu de tenir compte de la difficulté qu'aurait présenté, pour l'administration, l'application du RIFSEEP à l'ensemble du corps, mais uniquement de celle que présente, une fois cette perspective écartée, l'application aux agents issus du corps des inspecteurs des affaires maritimes du régime propre au corps des ingénieurs des travaux publics de l'Etat.,,,A cet égard, le ministre chargé de l'environnement fait valoir que cette application doit encore être différée, pour éviter que les agents intéressés voient le montant des primes versées se réduire pendant la première année d'application de leur nouveau régime indemnitaire, jusqu'à ce que les dispositions régissant l'indemnité spécifique de service, servie entre autres aux ingénieurs des travaux publics de l'Etat, soient modifiées pour prévoir son versement au titre de l'année en cours et non, comme actuellement, l'année suivant celle correspondant au service rendu, et que les outils informatiques de paie soient adaptés à cette fin. Ces considérations ne sont toutefois pas de nature à justifier, à la date de la présente décision, le maintien de la différence de traitement litigieuse, dès lors qu'il est loisible au pouvoir réglementaire, pour prévenir tout risque de discontinuité dans le versement de leurs primes aux agents intéressés, de prévoir des mesures transitoires assorties, au besoin, au terme de cette transition, d'une régularisation assurant effectivement à ces agents une égalité de traitement avec les autres agents du même corps pendant cette transition. Dans ces conditions, la différence de traitement critiquée s'est prolongée, à la date de la présente décision, pendant une durée qui excède le délai raisonnable pendant lequel une telle différence de traitement peut être regardée comme justifiée par un motif d'intérêt général, et le pouvoir réglementaire ne peut maintenir en vigueur les dispositions dont l'abrogation est demandée sans méconnaître le principe d'égalité.


Références :

[RJ1]

Cf., sur le principe de cette dérogation dès lors qu'une telle différence, ayant pour objet de faciliter la création du corps, disparaît à l'issue d'une période de transition d'une durée raisonnable, CE, 6 novembre 2019, Fédération nationale de l'équipement et de l'environnement CGT et autres, n° 424391, T. pp. 541-787.


Publications
Proposition de citation : CE, 02 avr. 2021, n° 433017
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Ranquet
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:433017.20210402
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