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25/03/2021 | FRANCE | N°438669

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 25 mars 2021, 438669


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 13 février et 18 septembre 2020 et le 9 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Interhold demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 décembre 2019 par laquelle le collège de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que soit désigné un administrateur provisoire auprès de la banque Delubac et Cie ;
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Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 13 février et 18 septembre 2020 et le 9 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Interhold demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 décembre 2019 par laquelle le collège de supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que soit désigné un administrateur provisoire auprès de la banque Delubac et Cie ;

2°) d'enjoindre à l'ACPR de désigner un administrateur provisoire auprès de cette banque pour une durée de deux ans ;

3°) de mettre à la charge de l'ACPR la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code monétaire et financier ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Nicolas Agnoux, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme A... B..., rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de l'autorité de contrôle prudentiel et de résolution et à la SCP Ortscheidt, avocat de la banque Delubac et Cie ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du I de l'article L. 612-1 du code monétaire et financier : " L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution veille à la préservation de la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle. / L'Autorité contrôle le respect par ces personnes des dispositions européennes qui leur sont directement applicables, des dispositions du code monétaire et financier ainsi que des dispositions réglementaires prévues pour son application, du code des assurances, du livre IX du code de la sécurité sociale, du code de la mutualité, du livre III du code de la consommation, des articles 26-4 à 26-8 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, des codes de conduite homologués ainsi que de toute autre disposition législative et réglementaire dont la méconnaissance entraîne celle des dispositions précitées ". Aux termes de l'article L. 612-34 du même code : " I. - L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution peut désigner un administrateur provisoire auprès d'une personne qu'elle contrôle, auquel sont transférés tous les pouvoirs d'administration, de direction et de représentation de la personne morale. L'administrateur provisoire dispose des biens meubles et immeubles de celles-ci dans l'intérêt d'une bonne administration./ (...) Cette désignation est faite soit à la demande des dirigeants lorsqu'ils estiment ne plus être en mesure d'exercer normalement leurs fonctions, soit à l'initiative de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution lorsque la gestion de la personne contrôlée ne peut plus être assurée dans des conditions normales ou en cas de suspension de l'un ou de plusieurs de ses dirigeants (...) ".

2. Par un courrier du 12 avril 2019, la société Interhold, associée commanditaire de la banque Delubac dont elle détient 20 % des parts, a demandé au président de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) de procéder à la désignation d'un administrateur provisoire auprès de cette banque en application de l'article L. 612-34 du code monétaire et financier. Par un courrier du 20 décembre 2019, le secrétaire général de l'ACPR l'a informée que le collège de supervision de cette autorité avait décidé, lors de sa séance du 28 mai 2019, de ne pas donner suite à sa demande. La société Interhold demande l'annulation de cette décision.

Sur la légalité externe :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-7 du code monétaire et financier : " Le collège de supervision constitue en son sein deux sous-collèges sectoriels :/ (...) 2° Le sous-collège sectoriel de la banque est composé de huit membres : le gouverneur de la Banque de France ou le sous-gouverneur désigné pour le représenter, le vice-président, les quatre membres mentionnés au 8° de l'article L. 612-5 et deux membres désignés par le collège parmi les membres mentionnés du 2° au 6° de l'article précité ". Il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée a été prise par le sous-collège sectoriel de la banque prévu à l'article L. 612-7, au cours d'une séance où siégeaient la totalité de ses membres. Par suite, le moyen tiré de ce qu'elle aurait été prise par une autorité irrégulièrement composée doit être écarté. Aucun texte ni aucun principe n'imposaient par ailleurs à la décision attaquée d'en porter mention et de rendre compte de la majorité à laquelle la décision a été acquise.

4. En second lieu, la décision attaquée, par laquelle l'ACPR a refusé de faire usage des pouvoirs de police administrative qu'elle tient de l'article L. 612-34 du code monétaire et financier, n'entre dans aucune des catégories d'actes qui doivent être motivés en vertu de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ou d'autres dispositions législatives ou réglementaires. Aucun principe général du droit n'imposait davantage une telle motivation. Le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée ne peut dès lors qu'être écarté.

Sur la légalité interne :

5. L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, chargée par les dispositions de l'article L. 612-1 du code monétaire et financier de veiller à la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle, dispose à cette fin, notamment, en vertu du I de l'article L. 612-34 du même code, du pouvoir, qu'elle peut exercer de sa propre initiative, de désigner un administrateur provisoire. Il lui appartient, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce qu'elle mette en oeuvre ce pouvoir, motivée par des faits qui seraient de nature à le justifier, de procéder à leur examen et de décider des suites à donner à la demande dont elle a été saisie. Elle dispose, à cet effet, d'un large pouvoir d'appréciation.

6. La décision que prend l'Autorité, lorsqu'elle refuse de donner suite à une telle demande, a le caractère d'une décision administrative que le juge de l'excès de pouvoir peut censurer en cas d'erreur de fait ou de droit, d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé par l'Autorité à une demande tendant à la désignation d'un administrateur provisoire réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de prendre une telle mesure. Il s'ensuit que, lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation d'un tel refus, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier son bien-fondé au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.

7. Au soutien de la demande qu'elle a adressée à l'ACPR tendant à la désignation d'un administrateur provisoire en application du I de l'article L. 612-34 du code monétaire et financier, la société Interhold a affirmé qu'il ressortait des pièces d'une information judiciaire en cours à la date de la décision attaquée que certains dirigeants de la banque se seraient rendus coupables d'actes de corruption et de trafic d'influence destinés à exercer des pressions sur l'autorité de régulation bancaire afin de leur permettre d'acquérir en 2011, dans des conditions irrégulières et à un prix minoré, les parts de l'ancien actionnaire de référence. La société requérante a également soutenu qu'ayant acquis par ce biais le contrôle de la majorité du capital, ces dirigeants auraient décidé depuis 2014 le versement de rémunérations excessives et inhabituelles et, lors de l'assemblée générale du 26 avril 2018, un nouveau report de sept ans de la libération du capital souscrit en 2010, à l'encontre des intérêts de la banque. Elle s'est enfin prévalue de l'arrêt du 11 septembre 2017 par lequel la chambre d'instruction de la cour d'appel de Paris a ordonné le renvoi de l'associé premier gérant et d'un membre du conseil de surveillance devant le tribunal correctionnel de Paris des chefs d'abus de biens sociaux et complicité d'abus de biens sociaux.

8. La société Interhold fait également valoir, à l'appui de sa requête, que les gérants associés commandités se seraient assurés la mainmise sur l'ensemble des décisions collectives au gré des modifications statutaires, que la participation de la banque au sein d'une société immobilière aurait été surévaluée dans les comptes sociaux de l'année 2014 tandis que cette société louerait à la banque des bureaux à un loyer très élevé, que le résultat comptable de l'année 2009 aurait été surévalué à hauteur de plus de 32 millions d'euros, que l'analyse des derniers états financiers consolidés de la banque ferait apparaître une violation chronique des ratios prudentiels, que les résultats de l'exercice 2019 seraient inquiétants et que deux membres du conseil de surveillance de la banque feraient l'objet d'une instruction pénale.

9. Il résulte toutefois des dispositions du I de l'article L. 612-34 du code monétaire et financier que la désignation d'un administrateur provisoire peut être décidée par l'Autorité en cas de suspension de l'un ou de plusieurs des dirigeants de la personne soumise à son contrôle ou lorsque la gestion de cette personne ne peut plus être assurée dans des conditions normales.

10. En l'espèce, d'une part, il est constant qu'aucun des dirigeants mis en cause par la société requérante n'a fait, à ce jour, l'objet d'une suspension. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la banque Delubac serait confrontée à une situation de blocage de ses instances de gouvernance ou à des difficultés financières d'une particulière gravité, de nature à compromettre la préservation de la stabilité du système financier et la protection de ses clients. A cet égard, l'ACPR fait notamment valoir, sans être sérieusement contredite, que les ratios prudentiels dont la violation est invoquée ne sont prévus par aucune réglementation, à la seule exception du ratio dit " de levier " qui respecte, en l'espèce, le seuil minimal exigé par la réglementation applicable. Dans ces conditions, alors qu'aucun des faits allégués devant l'ACPR et devant le Conseil d'Etat n'apparaissent, à la date de la présente décision, de nature à établir que la gestion de la banque ne pourrait plus être assurée dans des conditions normales au sens des dispositions du I de l'article L. 612-34 du code monétaire et financier, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le refus de l'ACPR de désigner un administrateur provisoire en application de ces dispositions reposerait sur une appréciation manifestement erronée.

11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l'ACPR, que la société Interhold n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision qu'elle attaque. En conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'ACPR qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. La société Banque Delubac et Cie, appelée à produire des observations, aurait eu qualité pour former tierce opposition si elle n'avait pas été mise en cause et doit, par suite, être regardée comme une partie pour l'application de ces mêmes dispositions. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Interhold la somme de 3 000 euros à verser, d'une part, à l'ACPR et, d'autre part, à la société Banque Delubac et Cie, au titre de ces dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la société Interhold est rejetée.

Article 2 : La société Interhold versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 000 euros à l'ACPR et une somme de 3 000 euros à la Banque Delubac et Cie.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Interhold, à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et à la société Banque Delubac et Cie.

Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la relance.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 438669
Date de la décision : 25/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

CAPITAUX - MONNAIE - BANQUES - POUVOIR DE DÉSIGNER UN ADMINISTRATEUR PROVISOIRE (I DE L'ART - L - 612-34 DU CMF) - DÉCISION PRISE SUR UNE DEMANDE TENDANT À CE QU'ELLE EXERCE CE POUVOIR - 1) A) DÉCISION SUSCEPTIBLE DE RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR [RJ1] - B) CONTRÔLE RESTREINT [RJ2] - C) APPRÉCIATION DE LA LÉGALITÉ DU REFUS À LA DATE À LAQUELLE LE JUGE STATUE [RJ3] - 2) CONDITION TENANT À CE QUE LA GESTION D'UNE BANQUE NE PEUT PLUS ÊTRE ASSURÉE NORMALEMENT - ILLUSTRATION.

13-027 L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), chargée par l'article L. 612-1 du code monétaire et financier (CMF) de veiller à la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle, dispose à cette fin, notamment, en vertu du I de l'article L. 612-34 du même code, du pouvoir, qu'elle peut exercer de sa propre initiative, de désigner un administrateur provisoire. Il lui appartient, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce qu'elle mette en oeuvre ce pouvoir, motivée par des faits qui seraient de nature à le justifier, de procéder à leur examen et de décider des suites à donner à la demande dont elle a été saisie. Elle dispose, à cet effet, d'un large pouvoir d'appréciation.,,,1) a) La décision que prend l'ACPR, lorsqu'elle refuse de donner suite à une telle demande, a le caractère d'une décision administrative que le juge de l'excès de pouvoir peut censurer b) en cas d'erreur de fait ou de droit, d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir.,,,c) L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé par l'Autorité à une demande tendant à la désignation d'un administrateur provisoire réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), de prendre une telle mesure. Il s'ensuit que, lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation d'un tel refus, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier son bien-fondé au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.,,,2) Il résulte du I de l'article L. 612-34 du CMF que la désignation d'un administrateur provisoire peut être décidée par l'ACPR notamment lorsque la gestion d'une personne soumise à son contrôle ne peut plus être assurée dans des conditions normales.,,,Banque dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait confrontée à une situation de blocage de ses instances de gouvernance ou à des difficultés financières d'une particulière gravité, de nature à compromettre la préservation de la stabilité du système financier et la protection de ses clients. A cet égard, ratios prudentiels dont la violation est invoquée n'étant prévus par aucune réglementation, à la seule exception du ratio dit de levier respectant, en l'espèce, le seuil minimal exigé par la réglementation applicable. Dans ces conditions, le refus de l'ACPR de désigner un administrateur provisoire ne repose pas sur une appréciation manifestement erronée.

POUVOIRS PUBLICS ET AUTORITÉS INDÉPENDANTES - AUTORITÉS ADMINISTRATIVES INDÉPENDANTES - ACPR - POUVOIR DE DÉSIGNER UN ADMINISTRATEUR PROVISOIRE (I DE L'ART - L - 612-34 DU CMF) - DÉCISION PRISE SUR UNE DEMANDE TENDANT À CE QU'ELLE EXERCE CE POUVOIR - 1) A) DÉCISION SUSCEPTIBLE DE RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR [RJ1] - B) CONTRÔLE RESTREINT [RJ2] - C) APPRÉCIATION DE LA LÉGALITÉ DU REFUS À LA DATE À LAQUELLE LE JUGE STATUE [RJ3] - 2) CONDITION TENANT À CE QUE LA GESTION D'UNE BANQUE NE PEUT PLUS ÊTRE ASSURÉE NORMALEMENT - ILLUSTRATION.

52-045 L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), chargée par l'article L. 612-1 du code monétaire et financier (CMF) de veiller à la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle, dispose à cette fin, notamment, en vertu du I de l'article L. 612-34 du même code, du pouvoir, qu'elle peut exercer de sa propre initiative, de désigner un administrateur provisoire. Il lui appartient, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce qu'elle mette en oeuvre ce pouvoir, motivée par des faits qui seraient de nature à le justifier, de procéder à leur examen et de décider des suites à donner à la demande dont elle a été saisie. Elle dispose, à cet effet, d'un large pouvoir d'appréciation.,,,1) a) La décision que prend l'ACPR, lorsqu'elle refuse de donner suite à une telle demande, a le caractère d'une décision administrative que le juge de l'excès de pouvoir peut censurer b) en cas d'erreur de fait ou de droit, d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir.,,,c) L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé par l'Autorité à une demande tendant à la désignation d'un administrateur provisoire réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), de prendre une telle mesure. Il s'ensuit que, lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation d'un tel refus, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier son bien-fondé au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.,,,2) Il résulte du I de l'article L. 612-34 du CMF que la désignation d'un administrateur provisoire peut être décidée par l'ACPR notamment lorsque la gestion d'une personne soumise à son contrôle ne peut plus être assurée dans des conditions normales.,,,Banque dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait confrontée à une situation de blocage de ses instances de gouvernance ou à des difficultés financières d'une particulière gravité, de nature à compromettre la préservation de la stabilité du système financier et la protection de ses clients. A cet égard, ratios prudentiels dont la violation est invoquée n'étant prévus par aucune réglementation, à la seule exception du ratio dit de levier respectant, en l'espèce, le seuil minimal exigé par la réglementation applicable. Dans ces conditions, le refus de l'ACPR de désigner un administrateur provisoire ne repose pas sur une appréciation manifestement erronée.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - DEVOIRS DU JUGE - DÉCISION PRISE SUR UNE DEMANDE TENDANT À CE QUE L'ACPR EXERCE SON POUVOIR DE DÉSIGNER UN ADMINISTRATEUR PROVISOIRE (I DE L'ART - L - 612-34 DU CMF) - 1) DÉCISION SUSCEPTIBLE DE RECOURS POUR EXCÈS DE POUVOIR [RJ1] - 2) CONTRÔLE RESTREINT [RJ2] - 3) APPRÉCIATION DE LA LÉGALITÉ DU REFUS À LA DATE À LAQUELLE LE JUGE STATUE [RJ3].

54-07-01-07 L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), chargée par l'article L. 612-1 du code monétaire et financier (CMF) de veiller à la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle, dispose à cette fin, notamment, en vertu du I de l'article L. 612-34 du même code, du pouvoir, qu'elle peut exercer de sa propre initiative, de désigner un administrateur provisoire. Il lui appartient, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce qu'elle mette en oeuvre ce pouvoir, motivée par des faits qui seraient de nature à le justifier, de procéder à leur examen et de décider des suites à donner à la demande dont elle a été saisie. Elle dispose, à cet effet, d'un large pouvoir d'appréciation.,,,1) La décision que prend l'ACPR, lorsqu'elle refuse de donner suite à une telle demande, a le caractère d'une décision administrative que le juge de l'excès de pouvoir peut censurer 2) en cas d'erreur de fait ou de droit, d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir.,,,3) L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé par l'Autorité à une demande tendant à la désignation d'un administrateur provisoire réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), de prendre une telle mesure. Il s'ensuit que, lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation d'un tel refus, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier son bien-fondé au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - CONTRÔLE DU JUGE DE L'EXCÈS DE POUVOIR - APPRÉCIATIONS SOUMISES À UN CONTRÔLE RESTREINT - DÉCISION PRISE SUR UNE DEMANDE TENDANT À CE QUE L'ACPR EXERCE SON POUVOIR DE DÉSIGNER UN ADMINISTRATEUR PROVISOIRE (I DE L'ART - L - 612-34 DU CMF) [RJ1] [RJ2].

54-07-02-04 L'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), chargée par l'article L. 612-1 du code monétaire et financier (CMF) de veiller à la stabilité du système financier et à la protection des clients, assurés, adhérents et bénéficiaires des personnes soumises à son contrôle, dispose à cette fin, notamment, en vertu du I de l'article L. 612-34 du même code, du pouvoir, qu'elle peut exercer de sa propre initiative, de désigner un administrateur provisoire. Il lui appartient, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à ce qu'elle mette en oeuvre ce pouvoir, motivée par des faits qui seraient de nature à le justifier, de procéder à leur examen et de décider des suites à donner à la demande dont elle a été saisie. Elle dispose, à cet effet, d'un large pouvoir d'appréciation.,,,La décision que prend l'ACPR, lorsqu'elle refuse de donner suite à une telle demande, a le caractère d'une décision administrative que le juge de l'excès de pouvoir peut censurer en cas d'erreur de fait ou de droit, d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir.


Références :

(1) Cf. CE, 9 octobre 2013, SELAFA MJA, n° 359161, T. pp. 471-741-746.

Rappr., s'agissant du refus d'une autorité administrative indépendante d'exercer des pouvoirs disciplinaires, CE, Section, 30 novembre 2007, T... et autres, n° 293952, p. 459.,,(2) Rappr., s'agissant du refus du Conseil supérieur de l'audiovisuel de mettre en oeuvre ses pouvoirs de police, CE, 23 avril 1997, Société des auteurs et compositeurs dramatiques et autres, n° 131688, p. 163.,,(3) Rappr., s'agissant du refus d'abroger un acte réglementaire, CE, Assemblée, 19 juillet 2019, Association des Américains accidentels, n°s 424216 424217, p. 296 ;

s'agissant du refus d'adopter des mesures de police, CE, 7 février 2020, Confédération paysanne et autres, n° 388649, à publier au Recueil.


Publications
Proposition de citation : CE, 25 mar. 2021, n° 438669
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Nicolas Agnoux
Rapporteur public ?: Mme Emilie Bokdam-Tognetti
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP ORTSCHEIDT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:438669.20210325
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