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18/11/2020 | FRANCE | N°436471

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 18 novembre 2020, 436471


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération syndicale unitaire (FSU) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2019-1056 du 15 octobre 2019 portant création de l'académie de Normandie ainsi que, par voie de conséquence, le 14° de l'article R. 222-2 du code de l'éducation dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1200 du 20 novembre 2019 relatif à l'organisation des services déconcentrés des ministres chargés de l'éducation nationa

le et de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ;

2°) d'enj...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 décembre 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération syndicale unitaire (FSU) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2019-1056 du 15 octobre 2019 portant création de l'académie de Normandie ainsi que, par voie de conséquence, le 14° de l'article R. 222-2 du code de l'éducation dans sa rédaction issue du décret n° 2019-1200 du 20 novembre 2019 relatif à l'organisation des services déconcentrés des ministres chargés de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation ;

2°) d'enjoindre au ministre chargé de l'éducation nationale et à la ministre chargée de l'enseignement supérieur et la recherche de saisir les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail des ministères chargés, respectivement, de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche de la question des conséquences de la fusion des académies de Caen et de Rouen sur les conditions de travail des personnels.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

- le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Yaël Treille, auditeur,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. L'académie de Normandie a été créée par un décret du 15 octobre 2019, par fusion des académies de Rouen et de Caen. La Fédération syndicale unitaire demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir ce décret ainsi que, par voie de conséquence, le 14° de l'article R. 222-2 du code de l'éducation dans sa rédaction issue du décret du 20 novembre 2019 relatif à l'organisation des services déconcentrés des ministres chargés de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, aux termes duquel la " région académique Normandie " est " constituée de l'académie de Normandie (départements du Calvados, de l'Eure, de la Manche, de l'Orne et de la Seine-Maritime) ".

2. D'une part, aux termes de l'article 34 du décret du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat : " Les comités techniques sont consultés, dans les conditions et les limites précisées pour chaque catégorie de comité par les articles 35 et 36 sur les questions et projets de textes relatifs : / 1° A l'organisation et au fonctionnement des administrations, établissements ou services ; (...) 9° A l'hygiène, à la sécurité et aux conditions de travail lorsqu'aucun comité d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail n'est placé auprès d'eux. Le comité technique bénéficie du concours du comité d'hygiène, de sécurité et de conditions de travail dans les matières relevant de sa compétence et peut le saisir de toute question. Il examine en outre toute question dont il est saisi par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail créé auprès de lui. (...) ".

3. D'autre part, l'article 47 du décret du 28 mai 1982 pris pour l'application de l'article 16 de la loi du 11 janvier 1984, précise, dans sa rédaction issue du décret du 28 juin 2011, que les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail exercent leurs missions " sous réserve des compétences des comités techniques ". Le 1° de l'article 57 du même décret prévoit que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est notamment consulté " sur les projets d'aménagement importants modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'une question ou un projet de disposition ne doit être soumis à la consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail que si le comité technique ne doit pas lui-même être consulté sur la question ou le projet de disposition en cause. Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ne doit ainsi être saisi que d'une question ou projet de disposition concernant exclusivement la santé, la sécurité ou les conditions de travail. En revanche, lorsqu'une question ou un projet de disposition concerne ces matières et l'une des matières énumérées à l'article 34 du décret du 15 février 2011, seul le comité technique doit être obligatoirement consulté. Ce comité peut, le cas échéant, saisir le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de toute question qu'il juge utile de lui soumettre. En outre, l'administration a toujours la faculté de consulter le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

5. Il ressort des pièces du dossier que, lors des séances du 9 juillet 2019 et du 16 juillet 2019, au cours desquelles le projet de décret portant création de l'académie de Normandie était soumis à l'avis du comité technique ministériel de l'éducation nationale et du comité technique ministériel de l'enseignement supérieur et de la recherche, ces comités ont l'un et l'autre adopté un " voeu " demandant que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail soit saisi, avant qu'ils ne rendent leur avis, de la question de l'incidence de la fusion des académies de Caen et de Rouen sur les conditions de travail des personnels. Le projet de décret a néanmoins été soumis au vote des comités techniques ministériels, qui ont émis un avis défavorable.

6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que, dès lors que les comités techniques ministériels avaient à émettre un avis sur un projet de texte, la circonstance que ces comités aient décidé de consulter les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur l'incidence de la création de l'académie de Normandie sur les conditions de travail des agents qui y sont affectés ne faisait pas obstacle à ce qu'ils se prononcent, sans attendre l'avis des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Par suite, le moyen tiré de ce que les avis émis par le comité technique ministériel de l'éducation nationale et le comité technique ministériel de l'enseignement supérieur et de la recherche auraient été rendus en méconnaissance des dispositions de l'article 34 du décret du 15 février 2011, faute que les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail des ministères de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur et de la recherche aient été préalablement saisis de la question des conséquences de la fusion des académies de Caen et de Rouen sur les conditions de travail des personnels, ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que la fédération requérante n'est pas fondée à demander l'annulation des dispositions qu'elle attaque. Ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent, dès lors, qu'être également rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la Fédération syndicale unitaire est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Fédération syndicale unitaire, au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, à la ministre de la transformation et de la fonction publiques et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 436471
Date de la décision : 18/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - STATUTS - DROITS - OBLIGATIONS ET GARANTIES - COMITÉS TECHNIQUES PARITAIRES - CONSULTATION OBLIGATOIRE - EFFET - ABSENCE D'OBLIGATION DE CONSULTER LE CHSCT [RJ1] - CONSÉQUENCE - POSSIBILITÉ POUR UN COMITÉ TECHNIQUE AYANT DÉCIDÉ DE CONSULTER UN CHSCT DE SE PRONONCER SANS ATTENDRE SON AVIS.

36-07-06-03 Il résulte des articles 34 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011, de l'article 47 et du 1° de l'article 57 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 qu'une question ou un projet de disposition ne doit être soumis à la consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) que si le comité technique ne doit pas lui-même être consulté sur la question ou le projet de disposition en cause. Le CHSCT ne doit ainsi être saisi que d'une question ou projet de disposition concernant exclusivement la santé, la sécurité ou les conditions de travail. En revanche, lorsqu'une question ou un projet de disposition concerne ces matières et l'une des matières énumérées à l'article 34 du décret du 15 février 2011, seul le comité technique doit être obligatoirement consulté. Ce comité peut, le cas échéant, saisir le CHSCT de toute question qu'il juge utile de lui soumettre. En outre, l'administration a toujours la faculté de consulter le CHSCT.... ,,Il en résulte que, dès lors que les comités techniques ministériels avaient à émettre un avis sur un projet de texte, la circonstance que ces comités aient décidé de consulter les CHSCT ne fait pas obstacle à ce qu'ils se prononcent, sans attendre l'avis des CHSCT.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - STATUTS - DROITS - OBLIGATIONS ET GARANTIES - COMITÉS D'HYGIÈNE ET DE SÉCURITÉ - CONSULTATION OBLIGATOIRE DU CHSCT - CONDITION - QUESTION OU PROJET CONCERNANT EXCLUSIVEMENT LA SANTÉ - LA SÉCURITÉ OU LES CONDITIONS DE TRAVAIL ET NE DEVANT DONC PAS - PAR AILLEURS - ÊTRE SOUMIS POUR AVIS AU COMITÉ TECHNIQUE [RJ1] - CONSÉQUENCE - POSSIBILITÉ POUR UN COMITÉ TECHNIQUE AYANT DÉCIDÉ DE CONSULTER UN CHSCT DE SE PRONONCER SANS ATTENDRE SON AVIS.

36-07-065 Il résulte des articles 34 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011, de l'article 47 et du 1° de l'article 57 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 qu'une question ou un projet de disposition ne doit être soumis à la consultation du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) que si le comité technique ne doit pas lui-même être consulté sur la question ou le projet de disposition en cause. Le CHSCT ne doit ainsi être saisi que d'une question ou projet de disposition concernant exclusivement la santé, la sécurité ou les conditions de travail. En revanche, lorsqu'une question ou un projet de disposition concerne ces matières et l'une des matières énumérées à l'article 34 du décret du 15 février 2011, seul le comité technique doit être obligatoirement consulté. Ce comité peut, le cas échéant, saisir le CHSCT de toute question qu'il juge utile de lui soumettre. En outre, l'administration a toujours la faculté de consulter le CHSCT.... ,,Il en résulte que, dès lors que les comités techniques ministériels avaient à émettre un avis sur un projet de texte, la circonstance que ces comités aient décidé de consulter les CHSCT ne fait pas obstacle à ce qu'ils se prononcent, sans attendre l'avis des CHSCT.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 2 juillet 2014, Association autonome des parents d'élèves de l'école Emile Glay et Fédération Sud Education, n°s 367179 367190, p. 203.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 nov. 2020, n° 436471
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Yaël Treille
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:436471.20201118
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